Accord sur la dette argentine

Le dimanche 28 février 2016, le nouveau gouvernement argentin et les fonds spéculatifs qui détiennent une partie de la dette du pays ont scellé un accord qui devrait permettre de mettre fin à un litige de près de quinze ans.

L’enjeu est de taille pour l’Argentine, car s’il est entériné, cet accord lui permettra d’emprunter de nouveau sur les marchés financiers internationaux.

La dette de l’Argentine et les fonds vautours

Au début des années 2000, la dette obligataire de l’Argentine se montait à quelque 100 milliards de dollars. En raison de la crise économique et financière qui le ravage, le pays est alors incapable d’honorer ses échéances de remboursement. L’Argentine fait défaut en 2001, puis le gouvernement parvient entre 2005 et 2010 à restructurer partiellement sa dette avec l’accord de 93 % de ses créanciers. Mais quelques fonds spéculatifs, qui avaient entretemps racheté à faible prix 7 % des titres obligataires argentins, refusent la décote de 70 % proposée par le gouvernement de l’époque. Il s’en est suivi une longue bataille juridique qui s’est conclue en juillet 2014 par une décision de la justice américaine ordonnant le remboursement par l’Argentine de 1,3 milliard de dollars aux fonds spéculatifs, aussi dénommés « fonds vautours ». Le principal argument juridique invoqué par la Cour de New York est l’existence d’une clause « pari passu » dans le contrat d’émission obligataire. Cette clause impose un traitement égalitaire entre tous les créanciers obligataires. Si bien que l’Argentine se devait de rembourser les fonds vautours avant de pouvoir rembourser les autres créanciers selon les modalités renégociées. Mais jusqu’à la fin de l’année 2015, le gouvernement argentin refusait d’appliquer la décision de la justice américaine, ce qui de facto excluait toute possibilité pour lui d’émettre de nouveaux titres sur les marchés financiers internationaux.

Les fonds vautours

Les fonds vautours sont des fonds d’investissement qui sont dénommés ainsi parce que leur activité consiste à racheter sur les marchés financiers des obligations d’entreprises ou d’Etats connaissant de graves difficultés financières. Leur stratégie consiste à acheter ces titres alors qu’ils sont fortement décotés et à réaliser une plus-value lors de la restructuration de la dette si les conditions de remboursement proposées aux créanciers leur sont favorables. Dans le cas contraire, ils refusent la restructuration et visent à obtenir par action judiciaire le remboursement  de la valeur nominale de leurs titres éventuellement majorée des intérêts et d’arriérés de retard. Les fonds vautours visent plus spécifiquement les titres de dettes émis sur les marchés financiers américains ou rédigés selon les règles de droit américain car les litiges entre créanciers et débiteurs nés de ces contrats sont du ressort de la juridiction de New York, dont la jurisprudence leur est favorable.

Un enjeu important pour l’Argentine

La situation a changé avec l’arrivée au pouvoir d’un nouveau président, Mauricio Macri, qui a succédé à Cristina Kirchner en décembre 2015. Le nouveau président a en effet décidé de mettre un terme au conflit et de rechercher une solution de compromis.

L’accord qui vient d’être conclu fin février 2016 avec 4 fonds spéculatifs représentant ensemble 85 % des montants concernés, prévoit que ceux-ci acceptent une décote de leurs créances de 25 % ainsi que l’abandon des poursuites judiciaires contre un versement de 4,65 milliards de dollars. L’annonce de cet accord devrait inciter par ailleurs les autres fonds spéculatifs détenant les 15 % restants à en accepter également les termes.

Afin d’être définitif, l’accord doit cependant être entériné au préalable par le Parlement argentin et le pays devra trouver les fonds nécessaires sur les marchés financiers internationaux avant le 14 avril 2016, date butoir au-delà de laquelle il serait invalidé.

Le président argentin, s’exprimant devant le congrès pour défendre l’accord conclu, a insisté sur l’importance de celui-ci pour l’Argentine, notamment parce qu’il permettrait de restaurer sa crédibilité aux yeux des marchés financiers et ainsi de revenir les solliciter à nouveau mais aussi parce qu’il pourrait également se traduire par un afflux de capitaux étrangers dont le pays aurait bien besoin au vu de sa situation économique peu florissante.