Airbus va-t-il battre Boeing sur le fil en matière de commandes?

Airbus a mis les bouchées doubles en décembre pour tenter de battre sur le fil Boeing en matière de commandes et boucler sur une note positive une année dominée par des problèmes de gouvernance et une série d’enquêtes sur des soupçons de fraude. Les contrats annoncés cette semaine ont permis de confirmer une commande record de 430 appareils de la part de la société de financement Indigo Partners pour le compte de quatre compagnies aériennes, qui ont probablement bénéficié de remises importantes du constructeur européen, soucieux de rattraper le retard sur son rival américain.

Le contrat avec Indigo et une série de commandes portant sur un maximum de 275 appareils sont un peu le chant du cygne de John Leahy, le directeur des ventes d’Airbus qui a prévu de prendre sa retraite en janvier après avoir quasiment triplé la part de marché d’Airbus pendant ses 23 années aux manettes. L’année 2017 a été particulièrement éprouvante pour Airbus, d’abord distancé brutalement par Boeing, le moral de ses commerciaux étant ébranlé par les enquêtes judiciaires en France et au Royaume-Uni sur l’utilisation d’intermédiaires par une entité du groupe aujourd’hui dissoute.

Ce contexte n’a pas empêché Airbus de battre des records en Bourse. L’action affiche une progression de plus d’un tiers devant début janvier, la quatrième plus forte de l’indice CAC 40, le groupe s’étant montré capable de surmonter ses récents problèmes de production. Soucieux de partir en beauté, John Leahy s’est lancé le défi de vendre au moins autant d’avions que les 700 appareils qu’Airbus prévoit de livrer en 2017, ceci après avoir revu à la hausse l’objectif interne de 400 commandes, qui avait été arrêté au moment où leur rythme ralentissait fortement.

Egaler Boeing?

De nombreux observateurs s’attendent à ce que le New-Yorkais fasse encore mieux et tente d’égaler Boeing, qui a enregistré 844 commandes nettes à la date du 19 décembre et qui serait plus proche de la barre des 900 aujourd’hui. Airbus a annoncé pour sa part un total de 705 commandes de monocouloirs à fin novembre, ce qui pourrait lui permettre de passer d’ici la fin de l’année la barre des 1.000, en fonction toutefois de la proportion de commandes nettes (après annulations).

Le groupe a enregistré récemment des commandes pour 100 appareils de la part de Delta Air Lines, pour 50 chacun de la part des loueurs aéronautiques AerCap et China Aircraft Leasing (CALC) et pour 75 de la part de deux autres compagnies aériennes. La compagnie hongroise Wizz Air a précisé que sa part de la commande d’Indigo – qui porte sur 146 avions – devait encore être approuvée par ses actionnaires.

Si toutes les transactions annoncées par Airbus depuis début décembre étaient comptabilisées en 2017, les deux tiers de l’activité de l’année auront été réalisés au cours du dernier mois, contre une moyenne de 20% lors des 10 années précédentes. Selon des analystes et des sources industrielles, une telle frénésie pourrait peser sur les marges bénéficiaires en raison des rabais importants consentis par Airbus.

Indigo Partners aura négocié des prix exceptionnellement bas, tout comme les loueurs AerCap et CALC, ajoutent-ils. « Indigo engrange des commandes pour les compagnies aériennes mais ce n’est pas bon pour les marges car ça accroît le pouvoir de négociation des acheteurs », observe Richard Aboulafia, analyste chez Teal Group.

Chez Airbus, on souligne que les prix sont établis en fonction de la taille des commandes et que le constructeur n’a donc consenti aucun rabais exceptionnel. « Nous sommes avant tout dans une industrie de volumes », a observé Richard Aboulafia.

46 gros porteurs

En revanche, l’année a été mauvaise pour les commandes de gros porteurs Airbus. Le constructeur en a vendu 46 depuis le début de l’année et a été battu par Boeing, qui en a vendu trois fois plus environ en raison du succès de son Dreamliner dont les ventes sont à leur plus haut niveau depuis 2013.

En dépit des interrogations sur l’avenir de l’A380, le plus gros avion commercial du monde, Airbus espère toujours décrocher une commande de 36 de ces appareils auprès de la compagnie Emirates. Les discussions ont échoué au salon aéronautique de Dubaï le mois dernier mais ont depuis repris, selon des sources industrielles.

Tout ceci n’empêche pas Airbus d’examiner différents scénarios permettant d’arrêter progressivement la production de l’A380 s’il ne décroche pas la commande d’Emirates, a-t-on déclaré récemment à Reuters de sources proches du dossier. Airbus a qualifié cette information de « spéculation ».

(Avec Reuters)

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