Analyse et Stratégie : L’Allemagne doit choisir ses priorités, peut-être au détriment de l’Europe

En Europe, la forte élasticité de la demande aux prix, associée à une concurrence accrue entre entreprises, ne leur permet pas de répercuter la hausse des salaires dans les prix de vente. Notamment, les secteurs-clés de l’industrie allemande sont durement touchés par cette spirale récessionniste de contraction des marges, puisque la productivité stagne. En outre, les services n’ont aucune chance de résister à une récession industrielle, l’économie allemande est donc en mauvaise posture. Face à ces difficultés en Europe et en Allemagne, différentes perspectives de sortie de crise se confrontent. L’une d’elles pourrait remettre en question le « modèle allemand » sur le continent, l’autre est en rupture avec l’initiative européenne globale (Green New Deal, cohésion industrielle européenne…).   

Le divorce avec la France semble déjà prononcé

L’Allemagne, c’est « toute une histoire à réécrire », avançait l’économiste Véronique Riches-Flores, à l’occasion d’une conférence de presse cette semaine. Médiocres performances économiques, remise en cause du modèle historique de développement et perte d’influence régionale sont les difficultés de la puissance à ce jour. En effet, l’Allemagne est une économie industrielle ouverte qui perd des parts de marché depuis cinq ans ; car si elle est de plus en plus dépendante des exportations, elle est aussi de plus en plus concurrencée par la Chine. Parallèlement, l’Allemagne est confrontée à des problèmes structurels (vieillissement de la population, consommation au ralenti). Le poids de son PIB dans celui de la zone euro ne cessant de faiblir, elle pourrait très mal vivre sa perte d’influence sur le continent.

Tandis que la France compte sur un renforcement de l’Union européenne dans un monde multipolaire (montée en puissance de la Chine, Russie…) afin de sortir de la crise en Europe, l’Allemagne, elle, compte sur un renforcement de son industrie pour mettre fin à ses propres problèmes. Dans cette optique, les meilleurs partenaires de l’Allemagne se situent plutôt à l’Est qu’à l’Ouest. Il s’agit plus précisément du groupe de Visegrad (Pologne, République Tchèque, Hongrie et Slovaquie) avec lequel les liens d’amitié se sont considérablement resserrés. Notamment, l’Allemagne s’y approvisionne, puisque 23% de ses importations en proviennent. Les quatre pays de cette union informelle, très industrialisés, sont de loin ses premiers partenaires, tandis que le divorce avec la France semble déjà prononcé. 


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