Analyse et Stratégie : L'AMF met en garde contre une « retarification brutale des actifs financiers »

L’exercice revient chaque année mais en 2017, dix ans après le début de la crise des subprimes, il revêt un caractère symbolique. Ce lundi, l’Autorité des marchés financiers a présenté à la presse sa cartographie des risques pour cette année et, selon elle, le plus gros d’entre eux est celui d’une « retarification brutale des actifs financiers », comme en 2015 et 2016, mais qui depuis « ne s’est que ponctuellement réalisé », avertissent Benoît de Juvigny, le secrétaire général de l’AMF, et Stéphane Gallon, le chef économiste de l’Autorité. « Les valorisations élevées et la volatilité faible ne paraissent pas refléter le niveau de la croissance économique, ni l’incertitude ambiante, y compris géopolitique (hausse du protectionnisme, concurrence réglementaire accrue, tensions internationales). » Ni d’ailleurs le risque de ne pas voir se concrétiser les promesses fiscales et de grands travaux du président Trump aux Etats-Unis sur lesquelles les investisseurs, depuis novembre, basent leur stratégie de hausses des profits des entreprises et de la consommation, avec un effet – ne serait-ce que transitoire – sur l’inflation. Autant de raisons, finalement, pour que l’AMF revoit à la hausse cette année le risque d’une correction des actifs financiers. « On voit bien que Trump ne fait pas ce qu’il a annoncé. C’est une des raisons pour laquelle on assiste à un début de correction aux Etats-Unis », pointe Benoît de Juvigny en réponse à l’une de nos questions.

La dette privée fait peser un risque de solvabilité

En plus d’une décorrélation de la Bourse, au plus haut, avec les fondamentaux économiques – une croissance mondiale de 3% contre 5% avant la crise et une inflation de 1 à 2% contre 5 à 6% il y a dix ans -, s’ajoute le risque d’une hausse brutale des taux d’intérêt maintenant qu’a débuté la normalisation monétaire aux Etats-Unis, où la Réserve fédérale a relevé par trois fois ses taux directeurs au cours des douze derniers mois.

« En France, l’endettement total de l’ensemble des sociétés non financières (SNF) a continué de progresser, avec une sensible accélération sur les premiers mois de 2017 (+6,4 % en glissement annuel sur les 3 premiers mois de 2017 contre une moyenne de 4,4 % pour l’année 2016). La France semble être l’un des seuls pays où l’endettement des SNF n’a pas été affecté par la crise financière et progresse de manière continue depuis lors. Rapporté au PIB, le niveau d’endettement des SNF françaises est depuis décembre 2016 supérieur au niveau d’endettement des SNF italiennes », écrit l’AMF dans sa cartographie des risques 2017. 

« En France, l’endettement total de l’ensemble des sociétés non financières (SNF) a continué de progresser, avec une sensible accélération sur les premiers mois de 2017 (+6,4 % en glissement annuel sur les 3 premiers mois de 2017 contre une moyenne de 4,4 % pour l’année 2016). La France semble être l’un des seuls pays où l’endettement des SNF n’a pas été affecté par la crise financière et progresse de manière continue depuis lors. Rapporté au PIB, le niveau d’endettement des SNF françaises est depuis décembre 2016 supérieur au niveau d’endettement des SNF italiennes », écrit l’AMF dans sa cartographie des risques 2017. 

« En France, l’endettement total de l’ensemble des sociétés non financières (SNF) a continué de progresser, avec une sensible accélération sur les premiers mois de 2017 (+6,4 % en glissement annuel sur les 3 premiers mois de 2017 contre une moyenne de 4,4 % pour l’année 2016). La France semble être l’un des seuls pays où l’endettement des SNF n’a pas été affecté par la crise financière et progresse de manière continue depuis lors. Rapporté au PIB, le niveau d’endettement des SNF françaises est depuis décembre 2016 supérieur au niveau d’endettement des SNF italiennes », écrit l’AMF dans sa cartographie des risques 2017.

En fait, ce qui inquiète l’AMF – tout comme le Haut conseil de stabilité financière (HCSF) d’ailleurs -, c’est l’augmentation de la dette privée et notamment, en France, celle des sociétés non financières. Elle compte maintenant pour 70% du PIB, indique Stéphane Gallon. Sur un an, fin 2016, cette dette affichait une augmentation de 11%, selon les chiffres de la Banque de France, soit un rythme bien supérieur au taux de croissance de l’économie, « alors si c’est pour investir, c’est très bien, mais si c’est pour maintenir en vie des entreprises zombies ou alimenter une bulle d’acquisitions, c’est dangereux, a expliqué l’économiste. Si les taux remontent, il va y avoir un problème de solvabilité, sachant que les deux tiers de cette dette est à taux variable. » La politique de la Banque centrale européenne sera donc déterminante pour la zone euro, et en particulier pour la France, l’un des seuls pays de la région qui ne s’est pas désendetté. Il y a péril en la demeure, mais il n’est pas reflété sur les marchés financiers, où l’écart entre le taux auquel les entreprises à risque empruntent et celui auquel les sociétés sans risque le font est en constant repli depuis avril 2016. La raison ? « La BCE intervient directement sur ce marché en achetant [depuis juin de cette même année] des obligations d’entreprises », fait baisser les rendements des titres les mieux notés et pousse donc les investisseurs à prendre plus de risques pour gagner plus.  

L’AMF craint aussi que, s’agissant de certains pays émergents, « le coût de la dette pourrait devenir insoutenable en cas de forte hausse des taux longs ou de dépréciation de la monnaie nationale (compte tenu d’une dette libellée en devise étrangère). »

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