Automobile : le Nigeria a la faveur des constructeurs … pour contourner les taxes

Décidément le Nigeria semble être particulièrement prisé par les constructeurs ces derniers temps. Après Peugeot, Nissan, Kia Motors, Honda et Volkswagen, c’est au tour de Ford d’annoncer sa volonté d’ouvrir une usine d’assemblage de sa gamme de pick-up Ford Ranger dans le pays avant la fin de l’année. Une stratégie liée en tout premier lieu à des raisons fiscales même si le Nigeria pourrait certes le troisième pays le plus peuplé de la planète à l’horizon 2050.

L’usine du constructeur américain devrait être installée à Ikeja, près de Lagos. Son ouverture est prévue pour le quatrième trimestre 2015.

Le site de type « semi-knockdown » (SKD) assemblera des véhicules à partir de pièces et des composants pré-assemblés en Afrique du Sud. Sa capacité de production devrait être de 5 000 unités par an, entièrement destinées au marché nigérian.

A l’heure actuelle, les seules unités de production du groupe US sur le continent africain sont situées en Afrique du Sud, pays dans lequel Ford produit environ 85 000 véhicules par an, lesquels sont écoulés à travers 24 pays sur le continent, dont 4.000 au Nigeria.

« Le Nigeria est un marché prioritaire pour nous en Afrique subsaharienne », a déclaré à cette occasion Jeff Nemeth, directeur Afrique subsaharienne de Ford.  Ajoutant dans une interview accordée à l’agence Reuters, que selon l’évolution des activités du groupe au Nigeria, l’usine nigériane pourrait être mise au service de tout le marché ouest-africain.

En s’implantant dans le pays, les constructeurs souhaitent contourner la mise en place en 2014 d’une taxe de 35 % sur les véhicules neufs importés dans le pays – en plus des 35 % de droits de douane.

Suite aux vives réactions provoquées par l’annonce de cette taxe en juillet 2014, Olusegun Aganga, ministre de l’Industrie, du Commerce et de l’Investissement du Nigeria, avait indiqué, au cours d’une conférence de presse, que cette mesure visait principalement à « encourager l’assemblage local ainsi que la création d’emploi et à réduire les pressions inutiles sur les réserves de change » du pays.

Il avait alors tenu à préciser que la nouvelle taxe ne s’appliquerait pas aux voitures usagées, ni aux pièces détachées ou aux véhicules partiellement assemblés dans le pays.

Reste que le Nigeria est confronté à un tel manque de liquidités – provoqué par la chute du cours du pétrole – qu’il a été obligé d’emprunter massivement pour payer les salaires des fonctionnaires.

Mercredi 6 mai, la ministre nigériane des Finances a ainsi indiqué que le Nigéria était confronté à de sérieuses difficultés. « Cela s’aggrave depuis le début de l’année et va se poursuivre jusqu’à la fin de l’année » a précisé Ngozi Okonjo-Iweala. La ministre a par ailleurs ajouté que le gouvernement avait un programme d’emprunt de 882 milliards de nairas (4 milliards d’euros) pour 2015, et que 473 milliards (soit plus de la moitié de la somme) avaient déjà été utilisés pour payer les salariés du secteur public.

Le gouverneur de l’Etat d’Imo, Rochas Okorocha a déclaré pour sa part que la plupart des Etats de la fédération et le gouvernement lui-même n’avaient pu payer les salaires en avril.

Si la Banque Centrale nigériane (CBN) affirme que les réserves en devises du Nigeria s’élèvent à 29,6 milliards de dollars, les experts estiment toutefois que si l’Etat piochait dans ces réserves, une éventuelle opération de ce type pourrait entraîner une baisse de la confiance mondiale en l’économie nigériane.

Selon la presse financière du Nigeria, en vue de garantir les compagnies étrangères, méfiantes vis-à-vis du Nigeria, la CBN fournit des lettres de crédit aux entreprises locales important des produits étrangers. A l’heure actuelle, la CBN doit garder en réserve les garanties de l’équivalent de six mois d’importations. Or, si la Banque Centrale nigériane ne dispose plus du niveau de réserves en devises nécessaire, les importations pourraient commencer à être gelées, paralysant ainsi toute l’économie du pays.

Sources : Ford, Reuters, Jeune Afrique

Elisabeth Studer – www.leblogfinance.com  – 13 aout 2015


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