Comment gagner jusqu’à 1.000 euros par mois grâce au « jobbing »

Réparer une fuite d’eau, garder un hamster, traduire un CV… Pour arrondir leurs fins de mois, des milliers de particuliers passent par des sites de « jobbing » pour proposer des services contre rémunération, au risque de tomber parfois dans le travail au noir.

Depuis un an et demi, une douzaine de sites sont apparus: YoupiJob, Frizbiz, Jemepropose, iFastask, MonAbeille, etc. Les sites généralistes de petites annonces, comme Le Bon Coin, se sont aussi positionnés.

Le principe: un internaute publie sa requête et la somme qu’il est prêt à débourser, puis il choisit parmi ceux qui se portent candidats, appelés « jobeurs ». Du petit bricolage au service à la personne, en passant par l’aide informatique ou le jardinage, ces mini-emplois peuvent rapporter d’une dizaine à plusieurs centaines d’euros.

280 euros par mois en moyenne

« Ce complément de revenu m’a souvent sauvée », témoigne Sara Sashka, 23 ans, étudiante en psychologie qui jongle entre un mi-temps de garde d’enfant et ses missions sur YoupiJob. Inscrite sur le site depuis un an, elle y fait « un peu de tout, ménage, repassage, babysitting, traduction », pour « 200 à 400 euros par mois ».

De son côté, François Monchiet est inscrit sur Frizbiz. Le nordiste de 27 ans en tire « entre 300 et 500 euros mensuels » grâce à de « gros travaux », notamment de menuiserie, en parallèle d’un emploi à plein temps chez un fabriquant de fauteuils.

« Rien de pharaonique » non plus pour Eric Lacote, intérimaire de 52 ans, qui gagne « entre 200 et 300 euros par mois » en faisant du bricolage sur YoupiJob.

« Nos jobeurs gagnent en moyenne 280 euros par mois », indique Bertrand Tournier, cofondateur de YoupiJob. Le site revendique « 120.000 membres, dont environ 80.000 qui proposent leurs services ».

Chez le concurrent Frizbiz (plus de 50.000 membres), « les meilleurs jobeurs peuvent atteindre 500 à 1.000 euros par mois », selon son cofondateur, Augustin Verlinde. « L’idée, ajoute-t-il, c’est de permettre aux gens d’arrondir leurs fins de mois. »

Un phénomène récent en France

Le jobbing naît en 2008 dans la tête de l’Américaine Leah Busque, qui cherche quelqu’un pour acheter les croquettes de son chien. Elle crée alors Runmyerrand (« Fais mes courses » en anglais), rebaptisé depuis TaskRabbit. La communauté compte 1,25 million de membres, dont 25.000 prestataires (10% à plein temps).

« En France, ça a vraiment émergé au printemps 2013, avec le lancement en quelques semaines d’une demi-douzaine de sites », se souvient Anne-Sophie Novel, auteur de « La vie share, mode d’emploi » sur l’économie du partage.

Difficile d’évaluer l’ampleur du phénomène, d’autant que les sites restent très discrets sur les sommes d’argent échangées. Tous revendiquent une forte croissance et chacun se dit leader.

« L’argument économique arrive en première place pour expliquer l’émergence de ces nouveaux modes de consommation », selon Anne-Sophie Novel.

YoupiJob a réalisé une cartographie de ses membres, recensant une majorité d’actifs (59%) et un quart d’étudiants (26%). « Il y a beaucoup d’actifs à temps partiel subi, qui ont un petit revenu, un loyer élevé, des enfants et qui ont besoin de ce complément pour faire face au quotidien », assure Bertrand Tournier.

Une mouvance communautaire et collaborative

Au premier trimestre 2014 selon l’Insee, près d’1,6 million de personnes étaient à temps partiel subi en métropole, soit 6,1% de la population active.

Mais pour Augustin Verlinde, la crise n’est pas l’unique facteur: « elle a peut-être engendré le jobbing mais, aujourd’hui, on surfe plus sur la mouvance communautaire et collaborative que sur la solution anti-crise ».

C’est pourtant sur l’aspect « bon plan » que beaucoup de sites communiquent. « Jusqu’à trois fois moins chers qu’une entreprise », scande YoupiJob. « Trouver un artisan ou un service moins cher », promet Jemepropose.

De quoi faire de la concurrence aux acteurs traditionnels du service à la personne ou de l’artisanat. D’autant que le jobbing est parfois accusé de favoriser le travail au noir.

« On est dans cette fameuse zone grise parce que c’est une économie émergente, qui se structure », analyse Anne-Sophie Novel, pour qui « se pose la question de la façon dont c’est encadré en termes d’Urssaf, de déclarations fiscales, s’ils respectent vraiment le cadre juridique ».

Pour prévenir les dérives, la plupart des sites misent sur l’information, mettant les jobeurs devant leurs responsabilités.

« Si un jour, on concurrence l’artisanat, anticipe Bertrand Tournier, ce sera une concurrence complètement loyale. »

(Avec AFP)


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