Espagne : privatisation de NovaCaixaGalicia (NCG), nouvelle aubaine pour la finance US ?

La crise en Europe, une aubaine pour les ultra-libéralistes … et les banques américaines pour avoir la main-mise sur les banques du « Vieux continent «  ? Qui sait … En tout état de cause, Madrid vient d’annoncer que la vente de la banque NCG NovaCaixaGalicia, une caisse d’épargne galicienne qui avait causé la déconvenue voire la perte de nombreux épargnants , devrait être finalisée d’ici la fin de l’année.

C’est en effet ce qu’a laissé entendre mercredi Fernando Restoy, le dirigeant du Frob, le fonds de restructuration, chargé de restructurer les établissements de crédit espagnols. Le gouvernement a d’ores et déjà fait savoir que la banque – nationalisée en 2012 – avait suscité de nombreuses marques d’intérêt. Santander, BBVA et Caixabank, leaders espagnols du secteur de l’épargne ont indiqué être en cours d’examen du dossier. Les investisseurs intéressés auront jusqu’au 13 décembre pour se manifester.

Rappelons que NCG Banco a obtenu 9 milliards d’euros d’aides de la part de l’Espagne et de l’Union européenne ..  opération lui ayant permis un retour aux bénéfices pour les neuf premiers mois de l’année 2013. Tout n’est pas rose pour autant puisque l’établissement a vu le montant de ses dépôts chuter de 3%  sur cette période par rapport aux neuf premiers mois de 2012. Ses créances douteuses atteignent désormais quant à elles 16,7% de l’ensemble de ses encours.

Fin mai, le gendarme de la Bourse espagnole, la CNMV, a ouvert des procédures à l’encontre de neuf établissements – dont NovaCaixaGalicia et Bankia – dans le cadre de la vente de titres préférentiels et autres produits hybrides en 2008 à des particuliers … désormais quasiment ruinés . Ces enquêtes portant sur environ 6,2 milliards d’euros de « produits toxiques ».

– Une opportunité pour la finance US, voire une stratégie ?

Reste qu’un tel contexte pourrait servir les intérêts de la pieuvre Goldman Sachs , laquelle pourrait ainsi saisir l’occasion pour mettre la main sur les actifs des banques européennes.

Rappelons en effet qu’en mai 2012, la banque d’affaires US avait affirmé avec le plus grand naturel – voire la plus grande franchise – observer d’importantes opportunités dans la crise traversée par ses consoeurs européennes . Ces dernières pourraient en effet être contraintes de céder des actifs …. s’avérant fort intéressants pour leurs concurrentes d’outre-Atlantique.

Alors que le rôle joué par la banque américaine dans la crise de la zone euro est loin d’être des plus clairs, l’établissement semblait ainsi sortir du bois en laissant entrevoir ce qui pourrait bien être une véritable stratégie : plomber les banques européennes pour mieux les engloutir.

Au printemps 2012, Gary Cohn, le directeur d’exploitation de Goldman Sachs, avait ainsi rappelé lors d’une conférence organisée par la maison de courtage Sandford Bernstein, que les banques européennes – désormais contraintes de renforcer leurs fonds propres – devraient céder 607 milliards de dollars d’actifs en 2012, 243 milliards en 2013 et 147 milliards en 2014.

Selon M. Cohn, les cessions de banques européennes pourraient ainsi atteindre 2.000 milliards de dollars au total. Le dirigeant ajoutant que Goldman Sachs était bien positionné pour jouer un rôle d’intermédiation dans ces opérations. Ben voyons …

Rappelons tout de même que la sulfureuse banque anglo-saxonne a été « choisie » pour réaliser l’audit de la banque espagnole Bankia, alors en grande difficulté. Le gouvernement ayant en effet mandaté la société pour procéder à une évaluation « indépendante » de la banque nationalisée et de sa maison mère BFA. Goldman Sachs étant chargé de déterminer la somme devant être injectée par les pouvoirs publics dans la banque pour la remettre à flot … en toute objectivité ?

– Les actifs des banques espagnoles largement convoitées par les géants américains

En septembre 2013, alors que depuis deux ans, les géants du private equity et du distressed américains convoitaient les actifs des banques espagnoles, en attendant avec plus ou moins de patience que ces dernières se voient contraintes de les céder, les noms de l’américain Centerbridge, associé au britannique Anacap avaient fuité dans la presse, son compatriote Apollo remportant au final la mise sur Evo Banco, la filiale immobilière de la banque NCG. Laquelle était en vente … depuis que sa maison-mère avait dû recourir à une aide publique d’urgence de 9 milliards d’euros.

L’acquéreur avait alors déboursé 60 millions d’euros …. soit 55% de sa valeur nette comptable, pour une structure détenant 702 millions d’euros de prêts et 1,2 milliard d’euros de dépôts. Cette transaction suivant de peu l’acquisition par HIG Capital, début août, auprès de la bad bank espagnole Sareb, du « Project Bull » – 900 propriétés réparties dans neuf régions espagnoles – pour un chèque de 100 millons d’euros.

Blackstone ayant auparavant mis la main sur 2 000 appartements à Madrid, les américains Kennedy Wilson et Varde Partners étant quant à eux entrés dans l’unité de gestion immobilière de Catalunya Bank, une dizaine de fonds de private equity se montrant quant à eux intéressés par la filiale immobilière de la Caixa, pour quelque 330 millions d’euros.

Précisons que la Sareb a mis en place une structure spécifique lui permettant de garder une part dans les actifs vendus et de ne taxer le repreneur qu’à 1% …. De quoi attirer les investisseurs …

Rappelons enfin qu’en décembre 2012, la « bad bank » créée par le gouvernement de Madrid, a reçu pour 37 milliards d’euros d’actifs toxiques de quatre banques nationalisées, en vue d’assainir le secteur bancaire espagnol. Ces créances douteuses et biens immobiliers constituant les premiers actifs transférés vers la structure de défaisance mise en place pour restaurer la confiance dans les banques du pays. La plus plus grande partie provenant de Bankia, avec un transfert de 22,32 milliards d’euros d’actifs, suivie par Catalunya Banc (6,71 milliards d’euros), NCG Banco-Banco Gallego (5,71 milliards) et Banco de Valencia (1,96 milliard). La Sareb précisant alors qu’elle s’attacherait à vendre ces actifs avec l’idée d’en tirer « le retour maximum pour ses actionnaires ». En échange des actifs, la Sareb a remis aux banques des obligations garanties par l’Etat. A la demande pressante du gouvernement espagnol, les principales banques espagnoles avaient investi dans la structure aux côtés du Frob.
Sources : Reuters, Agefi, Wansquare

Elisabeth STUDER – www.leblogfinance.com – 5 décembre 2013


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