Immobilier : les impacts du coronavirus sur les particuliers bailleurs

Pour les particuliers qui ont mis à louer un logement ou un local commercial, l’épidémie de coronavirus et le confinement soulèvent probablement de nombreuses questions. Paiement de loyers, arrivée de nouveaux occupants, trêve hivernale… Réponses aux principales interrogations que vous vous posez probablement.

Les loyers durant le confinement sont-ils annulés ?

Non, se loger ne devient pas gratuit durant l’épidémie ! « En aucun cas, les bailleurs particuliers ne peuvent se permettre d’annuler tout bonnement les loyers », nous explique Pierre Hautus, directeur de l’Union nationale des propriétaires immobiliers (UNPI). En revanche, leur versement peut être décalé, sans pénalité, pour certains types de locataires.

Ce que prévoient en effet les mesures d’urgence est « de reporter intégralement ou d’étaler le paiement des loyers […] afférents aux locaux professionnels et commerciaux et de renoncer aux pénalités financières et aux suspensions, interruptions ou réductions de fournitures susceptibles d’être appliquées en cas de non-paiement de ces factures, au bénéfice des microentreprises […] dont l’activité est affectée par la propagation de l’épidémie », peut-on lire dans le rapport du ministère de l’Economie en amont de la publication de l’ordonnance dédiée. Mais « suspension ne veut pas dire annulation », insiste Pierre Hautus.

Combien de temps ce report de loyer peut-il durer ?

Il peut aller au-delà de la période du confinement. En effet, l’absence de sanction en cas de non-paiement s’applique « aux loyers et charges locatives dont l’échéance de paiement intervient entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai de deux mois après la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire », dispose l’ordonnance publiée le 26 mars au Journal officiel.

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Cette suspension concerne-t-elle les loyers d’habitation ?

Non. Bien que des associations de consommateurs – la Confédération nationale du logement (CNL) et l’association Consommation logement cadre de vie (CLCV) en tête – ont appelé à un moratoire des loyers pour les particuliers en difficultés, l’exécutif n’a annoncé aucune mesure concernant les baux d’habitation. « Pour les particuliers, la logique c’est que l’Etat soutient les revenus de celles et ceux qui n’ont plus de revenus […]. Quand vous êtes salarié, on vous donne le chômage partiel, quand vous êtes indépendant vous avez le fonds d’indemnisation. La logique est de dire qu’on se substitue aux revenus pour que les gens puissent faire face à leurs échéances et à leurs loyers […], expliquait ainsi sur Sud Radio, le 20 mars, Julien Denormandie, ministre de la Cohésion des territoires.

Vos locataires particuliers doivent donc continuer à verser leurs loyers. « En cas d’impayé, n’oubliez pas d’activer les garanties habituelles (Visale, caution personnelle, assurance loyers impayés…) », rappelle l’UNPI. Néanmoins, même si cette loi ne le prévoit pas, vous pouvez tout à fait négocier avec votre locataire le report de son loyer, par solidarité mais aussi parce qu’un contentieux s’avère souvent long et coûteux…

Pouvez-vous accueillir un nouveau locataire ?

Oui. « Les déménagements [et donc les emménagements, ndlr] restent possibles s’ils ne peuvent pas être reportés, par exemple si le préavis est déjà posé et que le bail arrive à sa fin, en respectant les gestes barrières et sauf restrictions locales spécifiques », confirme à MoneyVox la communication du ministère de la Cohésion des territoires. Une attestation sur l’honneur expliquant le motif du déménagement avec la date et les deux adresses de départ et de destination est nécessaire », précise-t-elle.

A condition de respecter les consignes de sécurité, vous pouvez donc organiser l’état des lieux (d’entrée et de sortie) et la remise des clés. Mais, dans ce cas, vos locataires devront être prêts à mouiller le maillot… Interdiction pour eux de se faire aider par des proches. Quant à faire appel à des déménageurs professionnels, la tâche risque d’être complexe… Les organisations professionnelles du déménagement ayant suggéré aux salariés de faire usage de leur droit de retrait. Tolérés, l’installation de nouveaux locataires et le départ des anciens s’avèrent donc, en pratique, compliqués.

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Pouvez-vous organiser des visites durant le confinement ?

Non. « Sauf circonstances particulières, l’organisation de la visite d’un logement ne présente pas en général un caractère d’urgence ou de nécessité qui permet de se déplacer », rappelle la communication ministérielle.

Un locataire dont le bail est arrivé à échéance peut-il rester dans le logement ?

Oui, avec ou sans votre accord selon les situations. Mesures de confinement obligent, la trêve hivernale est prolongée de 2 mois, soit jusqu’au 31 mai prochain. Attention, « elle n’est repoussée que pour ceux qui se trouvent sans solution de relogement », précise Pierre Hautus. Si c’est le cas de votre locataire, il ne peut donc pas être expulsé.

Pour ceux qui ont une solution de repli, il reste recommandé de limiter au strict nécessaire les déplacements. Les déménagements doivent donc rester exceptionnels. C’est pourquoi votre locataire risque de vous demander de rester dans l’habitation le temps du confinement. Si vous êtes d’accord, précise la communication ministérielle, « il faudra alors signer une « convention d’occupation précaire » pour contractualiser cet accord temporaire. Si la signature de ce document pose des difficultés, un échange d’emails peut suffire comme preuve écrite de l’accord trouvé entre le propriétaire et le locataire ».

Durant cette période transitoire, les loyers, ou plutôt le versement d’indemnités compensatoires, restent dûs. En effet, « pour les baux arrivés à échéances, nous conseillons aux propriétaires et aux locataires de convenir d’indemnités d’occupation des lieux le temps de la crise », recommande le directeur de l’Union nationale des propriétaires immobiliers. Cela ne fait pas office de bail, et donc les locataires n’ont pas de préavis à respecter une fois le confinement terminé. Ces indemnités peuvent correspondre au loyer habituel. « Il est aussi possible pour ceux encore sous préavis de faire un avenant pour décaler la date de départ », ajoute Pierre Hautus.

D’autres questions encore sans réponse…

Pour l’heure, le gouvernement a acté le report des loyers des locaux professionnels et commerciaux dont l’activité est paralysée par l’épidémie. Mais, concrètement, à partir de quelle baisse de chiffre d’affaires l’absence de pénalités s’applique-t-elle ? Les critères d’éligibilité doivent faire l’objet d’un décret à paraître dans les prochains jours.

Selon Pierre Hautus, certains bailleurs s’inquiètent aussi du paiement des charges de copropriété en cas de report de loyer. « Elles risquent de ne pas être versées. Et derrière, il y a le danger que les syndics n’aient pas la trésorerie suffisante pour payer les factures, comme l’électricité pour les parties communes, qu’ils règlent pour le compte des copropriétaires ». Des tractations sont en cours avec le gouvernement et les représentants des syndicats de copropriété, affirme le directeur de l’UNPI.

Interrogation et discussion également s’agissant des échéances de crédit des bailleurs : « Nous appelons en même temps à ce que les banques suspendent et rééchelonnent les prêts sans pénalités pour les bailleurs mis en difficultés par le non-paiement des loyers », ajoute Pierre Hautus.

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