Le casse-tête des amendes pour les trottinettes à Paris

Stationnées au milieu du trottoir, entassées aux carrefours ou renversées dans les rues, une partie des quelque 15.000 trottinettes électriques en libre-service poursuivaient vendredi leur occupation anarchique de Paris, malgré l’arrêté municipal du 30 juillet interdisant leur stationnement sur les trottoirs, les aires piétonnes et la chaussée. La Ville verbalisait déjà le stationnement gênant depuis mars, mais vient de renforcer la réglementation en instaurant « une interdiction totale de stationner sur le trottoir ». Désormais, l’usager est obligé de garer sa trottinette sur les places de stationnement des deux-roues et voitures. Autre changement notable: avant mardi, l’amende était envoyée à l’opérateur de trottinettes. Depuis, l’usager écope lui-même d’une amende de 35 euros s’il est pris en flagrant délit.

Jacky Menau, retraité et motard, informé de la récente interdiction, prend bien soin de garer la sienne sur une place de parking, tout en vilipendant ceux qui les laissent sur la chaussée. « Il faudrait presque un permis pour ça », estime l’ancien boulanger. Un incivisme que la mairie de Paris tente de contenir comme d’autres métropoles étrangères confrontées à la même problématique et qui, comme Lisbonne ou Singapour, ont opté pour des législations similaires.

Trottinette à la main devant le Louvre, Thérèse Salvisberg, touriste suisse, n’est pas au courant de la récente interdiction mais n’aurait pas laissé l’engin « n’importe où », seulement là « où les autres sont garés ». Thomas, son mari, juge de son côté que la mairie de Paris aurait dû « laisser un temps de transition » avant de verbaliser. Depuis mardi, la municipalité a dressé plus de 130 verbalisations pour stationnement gênant de trottinettes et mis en fourrière plus de 110 engins. Elle souligne toutefois que « la mise en place progressive d’emplacements dédiés a commencé, pour un objectif de 2.500 à la fin de l’année ». Chaque emplacement pourra contenir « environ » 6 trottinettes – soit 15.000 places.

 La prévention plutôt que la répression 

Quand l’usager est pris en flagrant délit, l’amende de stationnement gênant lui est directement adressée par les policiers municipaux. Mais quand la trottinette a été abandonnée, « c’est à l’opérateur » de s’acquitter dans un premier temps de l’amende puis de retrouver le fautif, explique la mairie de Paris. Toutefois, la plupart des loueurs affirment privilégier la prévention plutôt que la répression et promettent pour l’instant de ne pas envoyer les amendes à l’utilisateur.

VOI incite ainsi les utilisateurs à garer leur trottinette aux endroits dédiés avec un système de « parking bonus », qui récompense financièrement ceux qui le font. Ces parkings sont signalés sur l’application (6.000 pour VOI, 4.500 pour Bird, par exemple). Un dispositif qui donne de « très bons résultats », notamment au Danemark, selon Lucas Bornert, directeur général de VOI France. Les opérateurs misent également sur la diffusion de messages prévenant de l’interdiction en vigueur, comme Bird qui va « contacter les utilisateurs dans les jours qui viennent ».

Lime, de son côté, a « déployé une patrouille urbaine » de 50 personnes dont la mission est « de repositionner les trottinettes mal garées », indique Arthur-Louis Jacquier, responsable à Paris. N’ayant à ce jour « sanctionné [aucun] utilisateur », Lime prévient: « Si, dans le futur, nous constatons que certains clients, de manière systématique, se garent mal, on serait éventuellement en mesure d’impacter cela sur les utilisateurs ».

Avec, en plus de l’amende, une mise en fourrière de 49 euros pour chaque véhicule, reste à savoir si la bienveillance des loueurs va résister à l’arrivée prévue par la mairie de Paris des quelque 20.000 trottinettes supplémentaires d’ici 2020.

(avec AFP)

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