Le pétrole bon marché n’est pas pour demain

En un an, le prix du baril de pétrole est passé de 42 à 77 dollars. Ce qui a réduit la croissance de la zone euro d’un tiers de point. A quoi peut-on s’attendre dans les mois et les années à venir? L’exercice est compliqué car la prévision des prix dépend en grande partie de la demande. Or, une variation de 1% de la demande peut avoir une influence de 20% sur les prix.

Ces dernières années, la demande mondiale de pétrole a augmenté d’environ 1,6 million de barils/jour par an (voir graphique ci-dessous). Cette croissance régulière vient des pays émergents, dont la consommation pétrolière s’accroît chaque année de 3%, et du boom de la pétrochimie. Aujourd’hui, le transport mondial est en forte croissance (le nombre de véhicules en circulation dans le monde augmente de 6% par an). La hausse de la consommation pétrolière devrait donc se poursuivre. Et cela malgré la multiplication des programmes d’efficacité énergétique.

Pression de Trump

Les prix du pétrole dépendent aussi de l’attitude des Etats-Unis, le seul endroit de la planète où la production augmente. Grâce au schiste, qui représente la moitié de leur production, Washington fournit 1 million de barils/jour supplémentaire par an. Une hausse significative, mais qui reste insuffisante pour équilibrer le marché. En ce moment, Donald Trump fait donc pression pour faire baisser les prix du baril. Pour complaire à leurs alliés américains, l’Arabie saoudite pourrait décider lors de la prochaine réunion de l’Opep, le 22 juin, de remonter légèrement sa production.

Mais Riyad n’a aucun intérêt à faire baisser les prix. Il a toujours 6 points de PIB de déficit public et doit emprunter 50 milliards de dollars sur les marchés pour boucler son budget. Et si les Saoudiens veulent introduire en Bourse leur compagnie nationale Saudi Aramco, ils ont besoin d’un prix du baril élevé. Mais ils ne cherchent pas à revenir à la situation des années 2012-2014, quand le baril cotait à plus de 110 dollars, car cela relancerait les développements pétroliers très coûteux en Arctique, au Canada (sables bitumineux) et dans l’offshore profond.

Cette année, le pétrole devrait rester autour de 76-77 dollars le baril. Il pourrait ensuite se stabiliser un moment autour de 80-90 dollars. Le marché pétrolier fonctionne en cycles de quatre à cinq ans. Quand la matière première est chère, les compagnies surinvestissent. Il y a alors trop de pétrole et les prix baissent. Comme les compagnies ne veulent pas couper leurs dividendes, elles diminuent leurs investissements. Et le cycle repart. Aujourd’hui, les prix sont élevés. Et on est au stade où les compagnies n’ont pas débuté leurs réinvestissements.

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Ces dernières années, la demande mondiale de pétrole a augmenté d’environ 1,6 million de barils/jour par an.

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