Les marchés européens vont rester suspendus aux négociations commerciales (Bourse Hebdo)

Les marchés européens vont continuer à suivre le feuilleton sino-américain sur le commerce comme le lait sur le feu, après avoir été secoués par le durcissement du conflit qui relance les craintes sur la croissance mondiale.

« C’était une semaine Trumpesque qui a commencé dimanche dernier avec deux tweets du président américain qui ont mis le feu aux poudres sur les marchés », résume auprès de l’AFP Laurent Denize, co-directeur des investissements chez Oddo BHF AM.

Le président américain a en effet déterré la hache de la guerre commerciale en annonçant inopinément une hausse de 10% à 25% des droits de douane imposés sur 200 milliards de dollars de biens chinois exportés chaque année aux Etats-Unis.

Ces nouvelles sanctions commerciales américaines sont entrées en vigueur ce vendredi au motif que les négociations avancent « trop lentement » aux yeux de Donald Trump. Elles ont entraîné une réplique immédiate de Pékin qui a promis d’imposer ses propres sanctions.

Elles ne s’appliquent toutefois pas sur les marchandises qui étaient déjà en transit, ce qui laisse plus de marge pour décrocher un compromis alors que les négociations devaient se poursuivre vendredi.

Les marchés financiers ont fait les frais de cette escalade de tensions commerciales, avec un retour de la volatilité, alors qu’ils avaient jusque-là « recouvré quasiment la totalité des baisses du dernier trimestre », affirme Laurent Denize.

Revirement de situation

« Ce qui s’est passé ces derniers mois ne laissait pas présager un tel revirement de situation », a commenté pour sa part Marjorie Sonigo, directrice de la gestion financière chez Pictet Wealth Management. Les marchés ont tablé sur une « issue positive alors que rien n’avait été décidé », ajoute-t-elle.

Mais dans ce tableau plutôt pessimiste, « il y a des éléments positifs », tempère Laurent Denize, notamment le fait que les négociations ne sont pas interrompues.

Selon l’expert, « nous sommes dans des configurations difficiles à appréhender (…) car il faut s’extraire de ces tweets, lettres, etc. qui vont dicter une volatilité à court terme mais qui ne vont pas servir de base d’investissement ».

Aussi, « nous avons eu des publications d’entreprises cette semaine qui ont été bonnes dans l’ensemble et ont surpris positivement les marchés », ajoute pour sa part Marjorie Sonigo, en évoquant notamment Alstom, EssilorLuxottica ou encore Siemens.

Le marché a également pris connaissance d’indicateurs économiques plutôt rassurants, comme la production industrielle allemande meilleure qu’attendu ou la croissance de 0,3% au Royaume-Uni au premier trimestre, un chiffre plus élevé que celui de la zone euro. De son côté, l’inflation mensuelle américaine a été moins forte que prévu en avril, à +0,5%.

De nombreux indicateurs seront également diffusés la semaine prochaine, au premier plan desquels l’inflation en France et Allemagne pour le mois d’avril, le PIB du premier trimestre en Allemagne ou encore la production industrielle aux Etats-Unis en avril.

Difficile d’anticiper

La saison des résultats se poursuivra aussi de son côté mais ce qui restera sous le feu des projecteurs, ce sont les négociations commerciales, insiste Mme Sonigo. « C’est ce sujet-là qui ramènera le calme » ou pas sur les marchés.

« Vraisemblablement le marché va évoluer en fonction des déclarations de M. Trump ou des responsables chinois. Donc il est difficile d’anticiper le positionnement des marchés », confirme Laurent Denize.

Selon lui, « il est dans l’intérêt du président Trump d’obtenir un accord avec la Chine sachant qu’une hausse des prix importés impacterait directement le consommateur américain et heurterait de plein fouet son électorat », alors que les prochaines élections américaines se tiennent en 2020.

Pour Marjorie Sonigo, « une prolongation des discussions pourrait maintenir de la volatilité » sur les places financières. En outre, poursuit-elle, de nombreuses échéances arrivent dans les semaines à venir, notamment le 22 mai, date à laquelle le Royaume-Uni peut encore quitter l’Union européenne, ou le 26 mai où se tiendront les élections européennes.

« Face à ces incertitudes, la position confortable est de rester prudent sur les marchés », conclut-elle.

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