Les USA redoutent un conflit en mer de Chine méridionale, route énergétique de l’Asie

« Les Etats-Unis sont profondément inquiets d’un risque de conflit en mer de Chine méridionale en raison des revendications territoriales dans cette zone de plusieurs Etats, à commencer par la Chine ». C’est en tout cas ce qu’a déclaré samedi le secrétaire américain à la Défense, Ashton Carter.

Mais une nouvelle fois, les tensions dans la zone pourraient être liées à une forte odeur de pétrole et de gaz.

« Les Etats-Unis partagent les profondes inquiétudes de pratiquement tout le monde dans la région sur le rythme et la portée des revendications territoriales en mer de Chine méridionale », a ainsi déclaré M. Carter lors d’un forum en Californie.

Il s’est par ailleurs dit préoccupé par les perspectives de militarisation accrue, ainsi que par le risque engendré par de telles activités d’accroître l’émergence de stratégies négatives ou de conflit entre les Etats ayant des revendications.

Ces propos interviennent alors que le 28 octobre dernier, les Etats-Unis ont provoqué l’ire de la Chine en faisant croiser un destroyer américain près d’îlots artificiels mis en place par Pékin dans l’archipel des Spratleys.

La Chine revendique des droits sur la quasi-totalité de la mer de Chine méridionale (ou the South China Sea SCS), certaines zones étant parallèlement disputées par le Vietnam, la Malaisie, les Philippines et le sultanat de Brunei.

Pékin s’appuie notamment sur une délimitation en pointillés apparue sur les cartes chinoises dans les années 1940 – une source d’importants différends territoriaux avec ses voisins.

En mai dernier, s’exprimant lors d’une conférence à Singapour réunissant de hauts responsables militaires, y compris des représentants chinois, le secrétaire américain à la Défense avait estimé que « la Chine n’était pas en phase avec les règles et les normes internationales » avec ses «constructions d’îles semi-artificielles dans l’archipel des Spratleys.

Cet archipel de plus de 100 îlots, récifs et atolls, situé à mi-chemin entre le Vietnam et les Philippines, est l’une des zones les plus disputées en raison de son importance militaire stratégique. La Chine y a effectué de gigantesques opérations de remblaiement, transformant des récifs coralliens en ports et en infrastructures diverses. Mais le nerf de la guerre pourrait être encore une fois les richesses en hydrocarbures dont la zone est dotée.

En vue d’obtenir un « règlement pacifique de tous les différends », Ashton Carter a demandé « l’arrêt immédiat et durable des travaux de remblaiement par tous ceux qui revendiquent la souveraineté sur l’archipel ». Ajoutant que les Etats-Unis s’opposaient également à toute militarisation supplémentaire de la zone et indiquant que les soldats américains continueraient à évoluer en mer de Chine méridionale.

« Il ne devrait pas y avoir de méprise : les Etats-Unis voleront, navigueront et opéreront partout où les lois internationales le permettent, comme les forces américaines le font dans le monde entier », avait-t-il souligné.

Si Ahston Carter a certes reconnu que d’autres pays avaient développé des avant-postes dans la zone, à des échelles diverses, le Vietnam à hauteur de 48 avant-postes, les Philippines de 8, la Malaisie de 5 et Taïwan 1, le gouvernement américain estime que la Chine est «allé beaucoup plus loin et beaucoup plus vite que n’importe quel autre ». Lors des 18 derniers mois, «la Chine a aménagé plus de 800 hectares, soit plus que tous les autres réunis et plus que dans toute l’histoire de la région », avait-t-il poursuivi en mai dernier.

– Pétrole et gaz : les réels enjeux du dossier

Le réel enjeu du dossier ? Selon le ministère américain de l’Énergie, jusqu’à 5,4 milliards de barils de pétrole et jusqu’à 55 100 milliards de mètres cubes de gaz pourraient être extraits dans la région de Reed Bank  de l’archipel …

L’Energy Information Administration estime également que la mer de Chine méridionale (SCS) détient environ 11 milliards de barils (BBL) de pétrole et 190 billions de pieds cubes (TCF ) de gaz naturel.

Cette estimation grimpe même à 22 milliards de barils de pétrole et 290 billions de pieds cubes de gaz naturel, selon une étude du US Geological Survey. La Société chinoise National Offshore Oil ( CNOOC ) est peut-être le plus optimiste, considérant que les ressources estimées de pétrole et de gaz de la zone pourraient s’élever au total espectivement à 125 BBL et 500 TCF.

– Une voie maritime cruciale pour la sécurité énergétique de l’Asie

Même si les recherches d’hydrocarbures dans la zone des Spratleys s’avéraient infructueuse, il n’en demeure pas moins que ces territoires revêtent une importance géo-stratégique notable. En effet, plus de la moitié du commerce maritime mondial transite par la mer de Chine méridionale, la voie maritime la plus achalandée du monde passant même juste à côté des Spratleys.

Cela signifie en clair des milliards de barils de pétrole par an et des centaines de milliards de pieds cubes de gaz naturel liquéfié (GNL ou LNG). Contrôler ce flux équivaut à contrôler la sécurité énergétique de l’Asie.

Environ 14 millions de barils de pétrole brut et plus de la moitié du commerce mondial de GNL transitent quotidiennement par la mer de Chine méridionale. Au total, 5,3 trillions de dollars empruntent chaque année cette route commerciale. En contrôlant pas moins de 80 % de la zone, la Chine pourrait bientôt être en mesure d’imposer sa volonté sur la structure des échanges mondiaux.

Sources : AFP, WSJ, Sputniknews, Forbes,oilprice.com

Elisabeth Studer – 8 novembre 2015 – www.leblogfinance.com


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