OMV – allié de Gazprom – signe un accord à Abou Dhabi

OMV – allié de Gazprom – signe un accord à Abou Dhabi

Nouvelle prise de choix pour la major pétrolière autrichienne OMV : la compagnie pétrolière nationale d’Abou Dhabi (ADNOC) a signé dimanche dernier avec elle un accord de concession offshore de 1,5 milliard de dollars. Information transmise par la société des Emirats arabes unis dans un communiqué.

Une transaction qui pourrait également servir son très proche partenaire russe Gazprom, tout en assurant aux parties une certaine discrétion, le nom d’OMV étant convenez-en beaucoup moins connu que celui du géant russe. Lequel fait pousser des cris d’effraie dès qu’il est prononcé, ce qui est loin d’être le cas quand il s’agit d’OMV. Et pourtant les deux groupes pétroliers ont de sérieux et ambitieux intérêts communs, nous le rappellerons jamais assez.

OMV, société internationale intégrée de pétrole et de gaz basée à Vienne, a ainsi signé un accord pour l’attribution de 20% de la concession offshore Abu Dhabi – SARB  (avec les champs satellites Bin Nasher et Al Bateel) et Umm Lulu ainsi que la infrastructure associée. Les frais de participation convenus s’élèvent à 1,5 milliard de dollars et la durée du contrat est de 40 ans. La concession sera rétroactive au 9 mars 2018.

Rainer Seele, Président du Directoire et PDG d’OMV a déclaré à cette occasion que son entreprise était en train « d’établir une position importante en tant que producteur de pétrole aux Emirats Arabes Unis ». Ajoutant que cette concession offshore constituait « une étape importante dans la mise en œuvre de la stratégie 2025 d’OMV », alors que la société « étend sa présence dans l’un des principaux pôles pétroliers et gaziers au monde. »

Selon Johann Pleininger, membre du conseil d’administration d’OMV et vice-président du directoire, cette acquisition constitue “un pas en avant vers l’objectif stratégique” de la société de doubler ses réserves. Selon lui, l’accord permettra d’augmenter considérablement la base de réserves d’OMV d’environ 450 millions de barils. Ajoutant que la position de la compagnie pétrolière à Abu Dhabi équilibrait le portefeuille de production d’amont et augmentait ses capacités à générer de la trésorerie à long terme.

Le champ de Satah Al Razboot (SARB) est situé dans les eaux peu profondes, à 120 km d’Abu Dhabi. Le premier pétrole devrait être disponible avant la fin de 2018. La production de pétrole devrait être supérieure à 20 kbbl / j (net pour OMV) et devrait être atteinte au début de la prochaine décennie.

Le champ Umm Lulu est quant à lui situé au large, à environ 30 km d’Abu Dhabi, dans les eaux peu profondes. La production initiale a débuté au quatrième trimestre de 2016. Le plateau de production de pétrole devrait également être atteint au début de la prochaine décennie et devrait atteindre 20 kb / j (net pou OMV).

Pour la durée de la concession, la quote-part d’OMV au sein des réserves s’élèverait à environ 450 millions de barils de pétrole pour les deux champs principaux, avec une hausse potentielle pour les champs satellites de Bin Nasher et Al Bateel. Les dépenses d’investissement d’OMV sur la durée du contrat sont estimées à environ 2 milliards USD, dont environ 150 millions USD seront dépensés par an au cours des cinq premières années.

Accords entre ADNOC et d’autres compagnies étrangères

D’autres transactions de ce type ont été préalablement conclus avec des compagnies pétrolières étrangères pour développer trois champs pétroliers offshore : Lower Zakum et Umm Shaif et Nasr.

Ainsi, ADNOC a déjà signé des contrats de concession avec Total (France), ENI (Italie) INPEX (Japon) et CNPC (Chine), en plus de CEPSA (Espagne) et d’un consortium indien dirigé par ONGC Videsh. Levant ainsi près de 8 milliards de dollars.

Selon la compagnie pétrolière nationale d’Abou Dhabi, ces accords garantissent également des marchés pour environ 40% de la production pétrolière du pays. Laquelle s’élève actuellement à 2,8 millions de barils par jour. ADNOC multiplie désormais ses efforts pour faire évoluer sa capacité de production actuelle de 3,2 millions de bj à 3,5 millions de bj d’ici la fin 2018.

Au début du mois d’avril 2018, la société a lancé un appel d’offres pour des contrats d’exploration portant sur six blocs majeurs dotés de réserves inexploitées de pétrole et de gaz. C’est la première fois que Abou Dhabi, qui produit plus de 90% du pétrole des Emirats arabes unis, met aux enchères ces licences.

ADNOC souhaite également doubler sa capacité de raffinage, actuellement de l’ordre de 800.000 bj, et tripler sa production pétrochimique.

OMV et Gazprom : tractations autour d’échanges d’actifs

Alors que nous laissons entendre depuis de nombreux mois qu’OMV pourrait être un bien utile bras armé de Gazprom pour discrètement obtenir des licences d’exploration et de production au niveau mondial sans effrayer d’éventuels partenaires, redoutant que les transactions n’accentuent leur dépendance au géant énergétique russe, en février dernier, le directeur général d’OMV a confirmé les intentions du groupe de conclure un accord d’échange d’actifs avec Gazprom d’ici la fin de l’année 2018, ajoutant toutefois que les deux sociétés étaient toujours en désaccord sur les questions de gouvernance.

Pour rappel, en décembre 2016, les deux groupes ont convenu d’échanger une participation de 38,5% dans l’unité norvégienne d’OMV contre une participation de 25% dans une partie du champ gazier Urengoy de Gazprom.

“Nous avons besoin d’un accord sur la gouvernance d’entreprise au sein des deux sociétés, et sur l’influence des deux entreprises en Russie et en Norvège en terme de direction et d ‘organisation”, a déclaré le PDG d’OMV, Rainer Seele, lors d’une conférence de presse en février 2018. Ajoutant que les négociations étaient difficiles.

“Dès que nous serons parvenus à un accord sur ce point, la procédure d’approbation sera lancée dans les deux pays » avait-il indiqué.

OMV, cheval de Troie de la Russie en Libye ?

Alors que nous laissons entendre que le groupe pétrolier autrichien OMV pourrait être le cheval de Troie guidé par la Russie pour pouvoir s’insérer chaque jour un peu plus sur le marché européen du gaz via notamment la plate-forme – autrichienne – de transit gazier de BaumgartnerOMV semble depuis quelques mois affublé d’un nouveau rôle, sa méconnaissance du grand public lui permettant de grignoter plus discrètement que Gazprom les ressources pétrolières du monde entier.

C’est ainsi que la compagnie pétrolière vient de relancer en février 2017 sa production pétrolière en Libye, arguant de l’amélioration de la situation politique pour ce faire. Le pétro-gazier autrichien a ainsi augmenté sa participation dans quatre accords de partage de production et d’exploration dans le bassin de Syrte ( fief de Daesh …. ) signant parallèlement un accord en vue de renforcer son partenariat avec la société d’Etat du pétrole  (NOC).

Grâce au renforcement de ses actifs libyens et la mise en production récente des champs pétroliers de Syrte et Sharara, OMV envisageait alors de faire passer sa production pétrolière de 3 000 b/j au dernier trimestre de 2016 à 10 000 b/j en moyenne avant la fin 2017. Rainer Seele, le PDG de l’entreprise avait  toutefois conditionné ce développement à la pérennité de la situation sécuritaire actuelle. L’objectif à moyen terme du groupe est de porter sa production libyenne à 50 000 b/j.

«OMV a été un partenaire fiable de la NOC durant les temps difficiles que nous avons connu. Nous sommes satisfaits de son engagement à continuer à investir dans notre pays », s’est réjoui à cette occasion Mustafa Sanalla, le patron de la NOC.

OMV et Gazprom : partenaires stratégiques sur le marché européen 

Pour rappel, OMV est une régie autrichienne de gestion du pétrole et compagnie pétrolière privée, fondée en 1956, ayant son siège à Vienne … tout comme l’Opep. La compagnie qui achète 6,5 milliards de mètres cubes de gaz par an au géant pétrolier russe Gazpromfait partie des rares compagnies européennes autorisées à revendre le gaz russe hors de son marché domestique.

Fin janvier 2017, Manfred Leitner, membre du Conseil de direction d’OMV avait déclaré dans la presse russe : « Notre compagnie a créé un partenariat  très solide avec nos partenaires russes en matière de pétrole et de gaz. Ce partenariat fonctionne infailliblement depuis déjà presque 50 ans et le gouvernement autrichien comprend son importance. Le partenariat avec la Russie est un élément clé pour assurer la sécurité de la livraison du gaz. L’Europe doit revoir sa position à l’encontre de la Russie d’un point de vue géopolitique », avait-il conclu.

Rappelons enfin qu’en décembre 2009, le groupe d’hydrocarbures autrichien, premier groupe gazier et pétrolier d’Europe centrale, et la Bourse de Vienne ont créé une « Bourse du gaz ». Son ambition d’alors ? Devenir numéro un en Europe continentale …. en partenariat avec le géant gazier russe Gazprom. Comment ? via la plate-forme de Baumgarten qui permet – notamment – d’assurer la livraison du gaz russe à l’Europe occidentale, disposant ainsi d’une position stratégique au coeur de l’Europe centrale.

Elisabeth Studer – www.leblogfinance.com –  30 avril  2018

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