Paris sportifs : l’espoir d’un gain plus important signalé hors-jeu

courseEn septembre 2010, un parieur avait misé sur 14 résultats d’une journée de championnat de football de Ligue 1. Ses 13 premiers pronostics étaient tous corrects. Pour le 14ème, il avait espéré un match nul entre les équipes de Lille et d’Auxerre. Alors que le score était encore de parité entre les deux équipes, un joueur lillois a inscrit un but en position de hors-jeu, néanmoins validé par l’arbitre, qui donna ainsi la victoire au LOSC. Cette victoire de l’équipe lilloise signait la fin des espoirs du parieur, ses gains chutant de presque 1,5 millions d’euros à la somme nettement inférieure de 5.538,30 euros, pour ses seuls 13 bons résultats.

Le parieur a alors assigné le joueur « fautif » et son club en réparation pour perte de chance d’un gain plus important. La Cour de Cassation vient de juger qu’un but inscrit en position de hors-jeu, sans vouloir fausser sciemment le résultat du match, ne constitue pas un fait de nature à engager la responsabilité du joueur et de son club envers un parieur.

En l’occurrence, débouté en première instance, le parieur déçu avait essuyé à nouveau un rejet devant la Cour d’appel de Riom, à la suite d’un arrêt rendu le 19 avril 2017. Après avoir rappelé que seules la violation grave, délibérée ou caractérisée des règles du jeu est de nature à engager la responsabilité de l’auteur ou de son employeur, celle-ci a considéré que c’était « à juste titre que les premiers juges ont considéré que la rapidité qui caractérise les actions menées au football, de même que le rôle conféré à tout joueur qui, recevant le ballon et se trouve en position offensive, se doit de réagir immédiatement dans le cadre de l’action de jeu, mettant obstacle à ce qu’une telle action puisse recevoir une faute civile génératrice de responsabilité ».

Poussant le débat jusque devant la Cour de Cassation, la Cour vient de trancher que « seul un fait ayant pour objet de porter sciemment atteinte à l’aléa inhérent au pari sportif est de nature à engager la responsabilité d’un joueur et, le cas échéant, de son club, à l’égard d’un parieur », et ce même si le joueur était effectivement en position illicite au moment d’inscrire le but litigieux.

La solution apportée par la Cour de cassation apparaît particulièrement justifiée à deux égards :

  • d’une part, le fait qu’il ne manque qu’un seul bon résultat au parieur ne pouvait être connu par le joueur « fautif », puisqu’aucun lien n’est démontré entre ces acteurs. La Cour précise bien que seul le fait de porter volontairement atteinte à l’aléa inhérent au pari sportif est de nature à engager la responsabilité d’un joueur et de son club, par référence aux délits de corruption active et passive, qui, bien que revêtant une qualification pénale, peuvent également donner lieu à une réparation devant le juge civil ;
  • d’autre part, le seul fait de transgresser la règle sportive ne constitue pas un fait de nature à engager la responsabilité du joueur ou celle de son club envers un parieur, ce que la Cour de cassation précise bien, ce qui n’empêche pas, dans d’autres circonstances, que la responsabilité civile du joueur ou de son club puisse être engagée notamment dans le cas de blessures infligées à l’adversaire au cours d’un rencontre.

Néanmoins, l’on relèvera, pour s’en étonner, que le parieur n’a pas assigné les arbitres de la rencontre ni la Fédération française de Football, à laquelle ils sont rattachées, alors que ce sont eux qui ont pris la décision de valider le but litigieux.

Cette solution ferme ainsi la porte à toute remise en cause du résultat des rencontres officielles du championnat de football professionnel sur le terrain des paris sportifs.

La frappe du parieur était cadrée, mais a été détournée par un raisonnement juridique imparable…

Cass. Civ.1, 14 juin 2018, n°17-20046, publié au Bulletin

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