Pétrole : la géopolitique fait bondir le cours, le Yemen inquiète les marchés

Le cours du pétrole a bondi jeudi à New-York, dopée par le contexte géopolitique au Moyen-orient, lequel inquiète fortement les investisseurs. La tension est telle qu’elle aura occulté à leurs yeux la présence d’une offre surabondante.

Le prix du baril de light sweet crude (WTI) pour livraison en mai se sera ainsi envolé de 2,22 dollars, affichant une progression de 4,5% pour cloturer au final à 51,43 dollars à la clôture sur le New York Mercantile Exchange (Nymex), ce qui correspond à un plus haut depuis plus de trois semaines.

Les raisons d’une telle envolée : le Yemen,  où l’Arabie Saoudite, à la tête d’une coalition militaire, est intervenue en vue de contrer l’avancée de rebelles chiites. L’enjeu associé : les menaces qui planent sur une des plus grandes routes maritimes du commerce mondial et plus particulièrement du pétrole et du gaz. Une éventuelle prise de contrôle du détroit de Bab al-Mandeb  par les miliciens chiites houthis rallongerait les temps de transit sans toutefois interrompre les approvisionnements, les tankers pétroliers se voyant alors contraints de faire le tour de l’Afrique.

Le site de Bab el-Mandeb, le détroit séparant Djibouti et le Yémen, et au delà la péninsule arabique et l’Afrique et qui relie la mer Rouge au golfe d’Aden, est l’un de ceux que le gouvernement US considère comme les sept goulets d’étranglement stratégiques sur les voies mondiales d’acheminement de l’or noir.

L’US Government Energy Information Agency déclare ainsi que «  la fermeture de Bab el-Mandeb empêcherait les pétroliers venant du Golfe Persique d’atteindre le Canal de Suez et le complexe du pipeline de Sumed, les forçant à contourner la pointe sud de l’Afrique. Le détroit de Bab el-Mandeb est un goulet d’étranglement entre la Corne de l’Afrique et le Moyen-Orient et un lien stratégique entre la Mer Méditerranée et l’Océan Indien.  »
Toute raison invoquée par les Etats-Unis ou l’OTAN pour militariser les eaux autour de Bab el-Mandeb offrirait à Washington une avancée de taille dans sa soif de contrôle des routes de transit de l’or noir. Mieux encore, une occupation militaire – que pourraient justifier à sa manière des des aléas sécuritaires – permettrait aux Etats-Unis de maitriser le flux pétrolier à destination de la Chine, de l’Union Européenne ou de tout autre région ou pays s’opposant à sa politique. Un contrôle militaire US pourrait également décourager l’Arabie saoudite de de réaliser des transactions pétrolières avec la Chine ou d’autres pays souhaitant s’affranchir du dollar. Une telle suprématie américaine offrirait également à Washington la possibilité de menacer le principal lien vital de la Chine pour satisfaire ses besoins énergétiques. A la lumière des ces éléments, il est donc tout à fait compréhensible que les tensions géopolitiques au Yemen  fassent réagir les marchés ….

Au delà du conflit qui affecte un pays dont les ressources pétrolières sont loin d’être pléthoriques, le marché redoute également que le conflit ne provoque une escalade dans la rivalité entre chiites et sunnites, et plus largement entre l’Iran chiite et l’Arabie Saoudite sunnite.

Le contexte aura au final déclenché un mouvement massif d’achat à New York comme à Londres. En effet, sur la place britannique, le cours du baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en mai enregistrait parallèlement une hausse de 2,71 dollars à 59,19 dollars, sur l’Intercontinental Exchange (ICE).

Néanmoins, certains analystes mettent en garde. Selon eux, il pourrait s’agir ni plus ni moins d’un réflexe des marchés face au contexte géopolitique, un retournement du marché dans les prochains jours, à la faveur d’une accalmie au Moyen-orient demeurant fort probable.

Car les fondamentaux demeurent inchangés : mercredi dernier, le rapport sur l’état des stocks de brut aux Etats-Unis a affiché une progression bien supérieure aux attentes.

Sources : AFP, Nymex

Elisabeth Studer – 26 mars 2015 – www.leblogfinance.com


Le Blog Finance