Sécu: le régime spécifique étudiant bientôt supprimé

Chose promise, chose due : le gouvernement a confirmé lundi 30 octobre la suppression du régime de sécurité sociale spécifique des étudiants, qui seront progressivement rattachés au régime général à partir de la rentrée 2018, au grand dam des mutuelles étudiantes qui géraient leur couverture santé depuis l’après-guerre.

« Conformément aux engagements pris, tous les nouveaux étudiants entrant dans l’enseignement supérieur seront rattachés dès la rentrée 2018 au régime général de l’Assurance maladie », a ainsi annoncé la ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, lors d’une conférence de presse. « En 2019, ce sera le cas de l’ensemble des étudiants », précise le plan dévoilé par Mme Vidal et le Premier ministre Edouard Philippe pour améliorer logement, pouvoir d’achat et santé des étudiants… Et faire passer la réforme de l’entrée à l’université.

Ce n’est pas une surprise mais « forcément nous sommes déçus », a déploré auprès de l’AFP le président de la LMDE, Romain Boix, pour qui la menace planait depuis une promesse du candidat Macron. Contrairement à une idée reçue, les mutuelles étudiantes ne jouent pas forcément un rôle de complémentaire santé pour leurs affiliés : elles ont avant tout vocation à s’occuper de leur couverture maladie de base.

Celle-ci a été déléguée en 1948 à la Mnef, devenue la LMDE (la mutuelle des étudiants) et présente sur tout le territoire, puis, à partir de 1972, à une dizaine de mutuelles régionales, qui proposent par ailleurs des complémentaires santé au même titre que les mutuelles traditionnelles. Frais de gestion trop élevés, remboursements tardifs, carte vitale non délivrée… Ces dernières années, le Sénat, la Cour des comptes mais aussi l’association de défense des consommateurs UFC-Que Choisir ont multiplié les critiques.

La LMDE, alors plombée par une dette colossale de 35 millions d’euros, avait été placée sous sauvegarde judiciaire en 2015, avant de voir la majorité de ses prérogatives transférées à l’Assurance maladie en octobre de la même année. Depuis, les affiliés de la LMDE ont ainsi, déjà, leur couverture de base gérée par le régime général, la LMDE s’occupant des affiliations ou des actions de prévention.

Questions « en suspens »

La réforme annoncée par le gouvernement prévoit d’aller plus loin avec la « suppression » pure et simple du régime des étudiants et la fin de l’affiliation par les mutuelles, selon Romain Boix et son homologue du groupe de mutuelles étudiantes régionales EmeVia, Ahmed Hegazy. « C’est un acquis qui disparaît », a regretté M. Hegazy, soulignant l’expertise des mutuelles pour des jeunes mal informés des complexités du système de santé.

De « nombreuses questions restent en suspens », estime-il en outre, inquiet pour les 600 salariés des mutuelles régionales, même si le gouvernement propose à une partie d’entre eux de rejoindre les caisses primaires d’assurance maladie (CPAM). Un peu plus de 430 salariés de la LMDE ont ainsi déjà rejoint les rangs du régime général, selon son président Romain Boix.

Par ailleurs, tous les étudiants seront-ils concernés par ce rattachement, y compris par exemple les enfants d’agriculteurs affiliés à la MSA? s’interroge M. Hegazy. Autre point d’interrogation, le financement de la sécu des étudiants, le Premier ministre ayant annoncé la suppression de la cotisation dédiée, de 217 euros par étudiant non boursier, pour leur redonner 100 millions d’euros de pouvoir d’achat. Celle-ci sera remplacée par une « cotisation de vie étudiante » couvrant les champs de la santé mais aussi du sport ou de la culture.

« Revendication historique » de la Fage, ce rattachement constitue « une avancée », a estimé le premier syndicat étudiant dans un communiqué. Pour M. Hegazy, la réforme fait justement office « de cadeau » à la Fage « dans le cadre de son combat contre l’Unef », l’autre grand syndicat étudiant, lui opposé à la suppression du régime étudiant.

Les mutuelles étudiantes espèrent désormais conserver un rôle dans les actions de prévention à destination des étudiants, comme le leur promet le gouvernement, sans plus de précisions. Le groupe Emevia recense 1 millions d’affiliés, la LMDE 850.000.

(Avec AFP)

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