Algérie : la crise liée à la chute du prix du baril se propage aux banques

Alors que la crise née de la chute du prix du baril avait d’ores et déjà lourdement affecté les finances et le budget de l’Algérie, le phénomène se propage désormais, affectant le système bancaire algérien.

Petite lueur toute de même : de nombreux experts estiment que les établissements financiers d’Algérie demeurent encore solvables, compte-tenu du niveau de leur capitalisation.

Cependant, selon des sources proches des milieux financiers, la plupart des banques de la place bancaire locale voient leurs liquidités fondre de jour en jour. Une des rares à faire exception – pour ne pas dire la seule – est la Banque extérieure d’Algérie (BEA), dont le portefeuille est encore fort de la présence de Sonatrach, la société nationale de pétrole algérienne.

Un tel constat ne fait qu’appuyer les propos énoncés la semaine dernière par Mohamed Laksaci, le gouverneur de la Banque centrale, devant les membres de l’Assemblée populaire nationale (APN). Lequel a annoncé le retour dès le mois d’avril prochain au recours par les banques primaires au refinancement par le réescompte auprès de la Banque centrale. Mettant ainsi en relief la tendance à la contraction des liquidités bancaires, phénomène constaté depuis le deuxième semestre 2014.

Désormais, le gouverneur de la Banque d’Algérie (BA) déclare tout net que «les banques commencent réellement à recevoir leur part de choc externe». Une situation justifiant selon lui la nécessité de revenir à «l’injection de liquidités dans l’économie» en vue de financer l’investissement et les PME.

Alors que la situation de sur-liquidité que connaissait jusque-là la place bancaire locale avait conduit à geler depuis 14 ans le réescompte revoit désormais le jour. Son taux – figé à 4% depuis 2001 – devrait être parallèlement révisé tandis que les taux pratiqués aux dépôts bancaires devraient également être améliorés en vue de favoriser l’épargne. « Il revient aujourd’hui à la BA de revoir ce taux à la hausse ou à la baisse en fonction de la politique des crédits » a ainsi souligné la Banque centrale. Et ce d’autant plus que ce taux d’emprunt n’a jamais été pratiqué puisque les banques ne se refinançaient pas auprès de la Banque d’Algérie.

Dans son dernier rapport de conjoncture économique et financière présenté en janvier 2016, la BA relève que depuis septembre 2015, la liquidité globale des banques s’est établie à 1828 milliards de dinars (15,3 milliards d’euros) contre 2104,96 milliards à fin juin de la même année et à 2730,88 milliards observés fin décembre 2014. Selon la BA, cette baisse significative est due essentiellement «au recul des dépôts du secteur des hydrocarbures en contexte de persistance du choc externe».

Si jusqu’à présent, l’Algérie se trouvait dans une situation exceptionnelle où les banques, en excès de liquidités, plaçaient leur argent à la Banque d’Algérie, dorénavant elles déposeront des bons du Trésor auprès de la Banque d’Algérie qui leur fournira des liquidités en échange.

A noter par ailleurs que des exercices de simulation de risques, dits stress-tests, ont été menés au sein des banques, et permettront vers la fin du mois du mars de mesurer «le degré de résilience des banques face aux chocs externes» en contexte de baisse de liquidité.

Une fragilité d’ores et déjà pointée du doigt par le Fonds monétaire international (FMI) dans sa dernière évaluation de l’économie algérienne, ce dernier appelant la BA «à renforcer la gouvernance des banques publiques». Le secteur bancaire «est dans son ensemble bien capitalisé et rentable, mais la persistance de faible prix du pétrole pourrait accroître les risques» sur sa solvabilité estime ainsi le FMI.

A noter enfin que l’Algérie a clôturé l’année 2015 avec un déficit commercial de 13,71 milliards de dollars, contre un excédent de 4,3 milliards de dollars en 2014. L’injection de liquidités dans l’économie à travers le refinancement des banques devrait mécaniquement aggraver le taux d’inflation et la dépréciation du dinar, lequel a déjà perdu 20% de sa valeur face à l’euro.

Sources : El Watan, Jeune afrique