Analyse et Stratégie : Pour Natixis Wealth Management, le marché anticipe mal les hausses de taux à venir en zone euro

Voilà une déclaration qui n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd. S’exprimant devant le Parlement européen, lundi, le président de la Banque centrale européenne a évoqué un « un redressement relativement vigoureux de l’inflation sous-jacente » en zone euro. Dans la foulée, l’euro a touché un pic de trois mois face au dollar, à 1,18, et le Bund allemand à 10 ans, qui fait office de référence, est repassé au-dessus de 0,5 %, au plus haut depuis le mois de juin également.

Pour Jean-Jacques Friedman, le directeur des investissements de Natixis Wealth Management, Mario Draghi a en quelque sorte remis les pendules à l’heure, dans la mesure où les anticipations des investisseurs en matière d’inflation sont trop faibles. Selon lui, les opérateurs sont peut-être en train de reproduire l’erreur qu’ils avaient commise avec la Fed en anticipant très tardivement et trop lentement une remontée des taux aux Etats-Unis. Et d’ajouter qu’une « intervention à l’été 2019 n’est pas impossible », ou, tout du moins, un « calendrier sérieux sur l’évolution des taux » en zone euro. Pour l’heure, bon nombre d’économistes considèrent en effet que le patron de la BCE ne relèvera pas les taux avant la fin de son mandat, prévue en octobre 2019. Si les prochaines communications de Mario Draghi sont de la même teneur que celle d’hier, Jean-Jacques Friedman n’exclut pas que l’euro monte jusqu’à 1,30 dollar et que le Bund flirte avec 0,8 %.

Attention à l’inversion de la courbe des taux

Du côté de la Fed, le chemin de la remontée des taux est bien mieux balisé. L’institution, qui rendra sa décision ce soir, devrait opter pour une hausse de 25 points de base de son principal taux, dans une fourchette allant de 2 % à 2,25 %. Ce sera la troisième de l’année. Elle devrait être suivie d’un nouveau tour de vis monétaire dès le mois de décembre, puis d’un autre en mars 2019. Le taux cible se situe à 3,375 % en 2020, selon la moyenne pondérée des projections du comité de politique monétaire. « L’impact sur les taux longs reste limité tant que l’inflation ne remonte pas trop fortement », souligne Jean-Jacques Friedman, qui guette, comme nombre de ses confrères, les signaux d’une inversion de la courbe des taux. Un tel scénario, qui se traduit par des taux à long terme passant sous le niveau des taux à court terme, augmente le risque d’une récession. « Lorsque la courbe des taux s’inverse, le pic du cycle est généralement passé (historiquement de 2 mois en moyenne), mais le pic du marché actions n’intervient que bien plus tard, entre 8 et 10 mois, et même 13 mois en 2007 », note-t-il.


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