Cet homme veut devenir le Leclerc de la presse

En 2015, il ose encore parier sur le secteur de la distribution des produits culturels : Arnaud Ayrolles, 36 ans, à la tête de la centrale d’achat NAP qu’il a fondé en 2008, vient d’acquérir les enseignes « Maison de la Presse » et « Mag Presse » auprès de Presstalis. « Mon objectif est de faire de Maison de la Presse et Mag Presse le premier réseau de commerces multi-spécialistes de proximité, déclare-t-il. C’est un réseau de 1.600 points de ventes, plus gros que celui des Carrefours Markets. Nous sommes la trentième enseigne de France ! ».

Arnaud Ayrolles est tombé dans la potion de l’entrepreneuriat étant petit. Après une scolarité très moyenne (il reconnaît volontiers qu’il n’était pas intéressé par les études), il s’inscrit en BTS d’action commerciale à Toulouse. « J’étais en alternance, précise-t-il tout de suite, je travaillais en même temps dans une entreprise dont j’étais actionnaire ».  Il enchaîne avec un MBA dans une école de commerce, toujours à Toulouse, tout en continuant à créer des start-up. En 2001, c’est l’effondrement de la bulle internet. Il entre chez Barclay ’s comme on entre dans les ordres. Il s’y morfond en tant qu’agent de placement de produits financiers.

Concurrencer Panini

 Quand deux copains d’enfance lui proposent de créer une start-up pour concurrencer les autocollants Panini, il saute sur l’occasion. Une nouvelle vie commence : tout comme son illustre concurrent, il est distribué dans les kiosques à journaux, si bien qu’il découvre le monde de la distribution de la presse. Très vite il constate que la profession n’est pas structurée. « Il y a des enseignes dans la boulangerie, la pharmacie, explique-t-il. Dans la presse, rien, à part les Relay du groupe Lagardère ». En 2008, c’est le grand tournant : il crée NAP. « J’ai voulu fédérer la distribution de la presse en créant une centrale d’achat. J’ai quitté la position du vendeur pour passer de l’autre côté et devenir acheteur ». Du coup, il lui faut créer son propre réseau de distribution. C’est chose faite avec l’accord qu’il vient de passer avec Presstalis. « Avec le rachat de Maisons de la Presse et de Mag Presse, nous allons faire dans le non alimentaire ce que Carrefour ou Monoprix ont fait dans l’alimentaire ». Il reconnaît pourtant que la profession ne se porte pas bien : « Elle souffre pour beaucoup de raisons. La baisse des ventes de la presse, la hausse des prix du tabac, les jeux d’argent comme le PMU ou le loto commencent à plafonner et la librairie commence à s’éroder sous l’effet du numérique ». Mais le maillage très fin de ce réseau reste séduisant. « C’est un réseau qui compte 27.000 points de vente, s’exclame-t-il. Avec nos 1.600 enseignes nous allons devenir tête de réseau ».

 Son maître mot : la diversification

Son programme ? La diversification. Il veut revenir au commerce de proximité. « Les grandes enseignes alimentaires l’avaient tué, confie-t-il, mais ça revient ». C’est ce que fait Monoprix ou Carrefour market qui multiplient les ouvertures de petits magasins en centre-ville. Il veut profiter de la tendance et proposer de nouveaux services en proximité : des points de dépannage, des piles, des ampoules, des jeux et des téléphones portables. Il a même passé un accord avec Xavier Niel. « Quand j’ai vu que Xavier Niel voulait ouvrir des boutiques Free, tout en restant sur un modèle à bas coûts, cela m’a étonné », raconte-t-il. Car il sait bien que l’installation d’un réseau est gourmande en capitaux. Il prend contact avec le turbulent patron des télécoms. Résultat, en avril dernier, il a implanté sa première borne de distribution d’un abonnement Free. « C’est un vrai abonnement Free, s’enthousiasme-t-il, il suffit de venir devant la borne avec un e-mail et une carte bancaire. La machine distribue une carte Sim prête à l’emploi, déjà activée, en moins de trois minutes ». A l’heure du tout internet, il ne doute pas un instant qu’il y a un marché. « Si vous vous abonnez par internet, il faut attendre trois ou quatre jours que la carte SIM arrive par la poste… ». Et même Amazon commence à ouvrir des boutiques physiques.

A l’égal des grands

Arnaud Ayrolles pense être en mesure de négocier à l’égal des grands. « Nous sommes la 30ème enseigne en France, affirme-t-il, nous représentons un volume de vente de 2 milliards d’euros, plus gros que But ou Bricomarché ». Il n’a pas encore la taille d’un Leclerc, mais il a l’ambition d’y parvenir. Pour l’heure, il prévoit de réaliser un chiffre d’affaires de 40 millions d’euros tandis que ses enseignes dépasseront un volume de 2 milliards d’euros.


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