Déficit commercial US à un niveau record : de quoi justifier les critiques sur la vente de Mistral à la Russie ?

Selon le département du Commerce US, le déficit commercial américain a atteint en avril un niveau sans précédent, ce qui au final pourrait pénaliser la valeur du produit intérieur brut pour le deuxième trimestre.

De quoi justifier les critiques à peine voilée de Barack Obama sur de possibles ventes par la France de navire Mistral à la Russie ? Allez savoir … Ceci pouvant expliquer cela, la politique étant toujours très proche de l’économie et de la finance dans ce bas monde …

En tout état de cause le département du Commerce a fait état mercredi d’une hausse de 6,9% du déficit commercial mensuel, lequel s’établit désormais à 47,24 milliards de dollars. Un tel montant n’avait plus été observé depuis avril 2012. Ajusté à l’inflation, le déficit ressort même à 53,8 milliards contre 50,9 milliards en mars.

Un malheur n’arrivant jamais seul, le déficit du mois de mars, initialement annoncé à 40,4 milliards de dollars, a été révisé à 44,2 milliards.

Une dégringolade que n’avaient pas prévu les analystes interrogés par Reuters, lesquels tablaient en moyenne sur un déficit de 40,8 milliards de dollars en avril.

Les importations ont augmenté de 1,2% à 240,6 milliards de dollars, ce qui constitue leur plus haut niveau historique. A noter que la progression est due essentiellement à la hausse des achats d’automobiles, de biens d’équipements, de produits alimentaires et de biens de consommation.

Une publication de chiffres pour le moins inquiétants qui intervient en plein différend France/Etats-Unis sur de juteux contrats dans le domaine militaire … permettant de booster la croissance de l’heureux pays fournisseur …

Rappelons ainsi que début mai, à quelques jours d’une visite officielle aux Etats-Unis du ministre français des Affaires étrangères, Laurent Fabius, Washington s’était inquiété du contrat passé entre Paris et Moscou pour la vente de navires militaires de type Mistral. Le tout sous fond de crise ukrainienne … et d’âpres négociations entre le géant US General Electric et le français Alstom.


Le gouvernement américain voudrait mettre la pression sur le gouvernement français qu’il ne s’y prendrait pas autrement avais-je alors indiqué … La remise en cause de l’accord passé entre Paris et Moscou pouvant être vue comme une menace brandie par Washington pour infléchir la position française sur le dossier Alstom. Voire même intervenir comme une sorte de chantage sur le dossier Paribas …

Rappelons à cet égard que si un contrat de 1,2 milliard d’euros, signé en 2011, prévoit la livraison par la France à la Russie de deux navires de guerre de type Mistral, son exécution est remise en cause par l’annexion de facto de la Crimée par la Russie et les sanctions adoptées en représailles par les Occidentaux.

Selon les termes de l’accord, les chantiers navals français de Saint-Nazaire devraient livrer la le premier bâtiment, le Vladivostok, en octobre prochain. Le second navire, le Sébastopol, destiné à la Flotte russe de la mer Noire, a une date de livraison prévue fixée à fin 2015.

Fin mars, Laurent Fabius avait déclaré que Paris pourrait annuler le contrat en l’absence de changement politique de Moscou vis à vis de Kiev. Le ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, avait par la suite reporté la décision du gouvernement français au mois d’octobre, date de livraison prévue du premier bâtiment. En retour, Moscou avait averti Paris qu’elle ferait « valoir ses droits jusqu’au bout en cas de rupture des accords passés », et exigerait notamment « la compensation de tous les préjudices qu’elle pourrait subir ».

Le vice-ministre russe de la Défense, Iouri Borissov, avait alors rappelé que des pénalités étaient prévues en cas de rupture du contrat, sans toutefois en citer le montant. Il avait également estimé que la rupture du contrat porterait atteinte à la réputation de la France « face à la communauté internationale ».

« Alors que la France devenue une puissance moyenne peine de plus en plus à exporter ses armements pourtant très performants pour des raisons géostratégiques, que vont penser les pays clients de l’industrie d’armement français en voyant la France rompre son engagement avec la Russie ? » avait-il indiqué.

Il est vrai qu’une décision de cet ordre éliminerait tout espoir de nouvelle signature de contrat entre Paris et Moscou, bloquant de facto l’accès à son immense programme de réarmement naval (civil et militaire), estimé à plus de 50 milliards de dollars. Une aubaine en quelque sorte pour les concurrents de l’industrie française …

Les « mésaventures » russes pourraient quant à elles refroidir quelques acquéreurs potentiels alors que Dassault tente désespérément d’obtenir une référence pour son Rafale à l’international et que les négociations en vue de la vente de 126 appareils à l’Inde sont actuellement en cours. Le tout pour un montant de 12 milliards d’euros. Pourraient également se retrouver sur la sellette plusieurs contrats en voie d’aboutir avec le Liban via un financement de l’Arabie Saoudite pour 3 milliards de dollars, tandis que les Emirats arabes unis envisagent d’acquérir deux satellites espions …

Sources : AFP, Ria Novosti, La Tribune

Elisabeth Studer  – www.leblogfinance.com  – 6 juin 2014


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