France : vers une pénurie de juges, un papy-boom mal anticipé ?

Alors que le baby-boom a tout de même débuté il y a plus de 60 ans, Enseignement, Fonction Publique, DRH semblent avoir mal anticipé comme il se doit les conséquences du papy-boom actuel. Des carences importantes apparaissent chaque jour un peu plus, et non des moindres. Et parmi les situations pouvant rapidement être problématiques, notons le cas de la magistrature.
Alors que la profession est loin d’attirer les foules, la chancellerie éprouve désormais des difficultés à compenser les départs à la retraite, le déséquilibre entre les sexes devenant quant à lui préoccupant. Alors que 80,6 % des reçus au concours de l’Ecole nationale de la magistrature (ENM) sont des femmes, ces dernières ne représentent que 25 % des présidents de juridiction.
Dans son récent rapport d’activité, le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) dénombrait 8 407 magistrats au 31 décembre 2012, chiffre en baisse pour la troisième année consécutive.
102 retraités ont dû être maintenus en activité contre 47 en 2005. Au final, 300 emplois restent vacants. Mais le pire reste à venir, alors que 1 200 magistrats affichent aujourd’hui entre 60 et 64 printemps. Dans les cinq années qui viennent, 1400 des 8000 magistrats actuellement en fonction partiront à la retraite.
Une situation d’autant plus tendue, que le nombre de candidats diminue d’année en année, de 4 130 en 1998, ils n’étaient plus que 1 513 en 2010, le plus bas niveau depuis 25 ans.

En 2012, 270 postes ont été ouverts au titre des concours permettant de suivre les 31 mois de formation dispensés par l’ENM mais seuls 206 candidats ont été recrutés. Quant aux recrutements complémentaires lancés en 2012, 53 seulement ont été pourvues sur 90 places offertes.

«Le nombre de magistrats n’a jamais été aussi bas depuis 2009, alors que ces derniers doivent juger de plus en plus d’affaires. C’est un lourd inconvénient pour les justiciables», a souligné quant à lui Frédéric Tiberghien, membre du CSM.

A titre d’exemple, signalons que le Pôle de l’instruction de Bourges ne fonctionne depuis la rentrée qu’avec deux juges, au lieu de trois. La réforme de la collégialité prévue en 2014 risquant d’aggraver les choses.
« On nous demande de faire aussi vite et bien, mais avec encore moins de moyens », s’insurge Paul-Édouard Lallois, dorénavant doyen du pôle à trente ans … par ailleurs délégué régional de l’Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire) pour le ressort de la cour d’appel de Bourges (Cher, Indre et Nièvre).
Rappelons qu’à l’époque de la création des pôles d’instruction, trois juges étaient nécessaires au minimum, en vue notamment de mettre en place une collégialité. « Ces pôles sont liés à la commission d’enquête parlementaire sur l’affaire d’Outreau », précise Paul-Édouard Lallois. « Il s’agissait de tirer des leçons et d’éviter la solitude du juge » ajoute-t-il.  Mais votée en 2007, la collégialité a finalement été repoussée d’année en année, la date butoir étant désormais fixée en 2014.

En l’absence de nouveau juge d’instruction, les juridictions devront compter sur des juges du tribunal de grande instance, lesquels viendront ponctuellement œuvrer en collégialité. Or, les parquets des tribunaux de grande instance ne sont pas mieux lotis … le parquet du TGI de Bourges étant ainsi également touché par un manque de magistrats. Parti en janvier dernier, le vice-procureur de la République, n’a toujours pas été remplacé. « Le parquet se limite pour l’instant au procureur de la République et à trois substituts », en sous-effectif d’au moins deux personnes, précise par ailleurs Paul-Édouard Lallois.

Une situation alarmante dans la magistrature aujourd’hui … et demain, quels métiers seront touchés ? Médecins, pharmaciens, enseignants, ingénieurs ?  et d’autres métiers qui nécessitent plus de 5 ans de formation … et de l’anticipation.
Elisabeth Studer – www.leblogfinance.com  – 1er octobre 2013
Sources : AFP, Reuters, CSM, Le Berry.fr


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