La très secrète banque du Vatican veut être plus Net

Un site web peut-il transformer la “banque la plus secrète au monde” d’après le magazine « Forbes » en symbole de transparence financière ? Ernst von Freyberg, président de l’Institut pour les œuvres de religion (OIR) aussi connu sous le nom de banque du Vatican, pense que c’est en tout cas un pas dans la bonne direction.

L’industriel et baron allemand, qui a pris la tête de la controversée institution financière en février dernier, a décidé que l’OIR publierait ses comptes sur Internet avant la fin de l’année sur un site dédié. Il ne s’agira pas de publier les noms des clients ou de pouvoir gérer ses comptes en ligne a précisé, jeudi 16 mai, Greg Burke, responsable de communication pour le Vatican. L’idée serait plutôt d’expliquer “ce qu’est l’institution, de dire quels sont ses actifs financiers et ses activités”, a-t-il précisé au site américain EconomyWatch.

Cette nouvelle initiative intervient alors que l’OIR essaie, depuis quelque temps, de redorer son blason terni par des années de scandales financiers. Le Vatican a ainsi signé, le 8 mai, un accord avec les autorités américaines pour un échange d’informations dans le cadre de la lutte contre les crimes financiers. L’OIR tente aussi depuis l’année dernière de figurer sur la liste blanche de l’Union européenne des institutions financières qui luttent pour empêcher le blanchiment d’argent et l’évasion fiscale. Pour l’heure, la banque du Vatican ne remplit que neuf critères sur 16, mais Ernst von Freyberg a assuré que la situation allait s’améliorer d’ici à la fin de l’année.

Far west financier

Pour le patron de la banque, l’urgence est aussi renforcée par les récentes prises de positions du Pape François sur les questions économiques et sociales. Le souverain Pontife a, en effet, fustigé, jeudi 16 mai, le “fétichisme de l’argent” et mis en garde contre “la dictature de la finance sans visage” qui aboutit à la “négation du primat de l’homme”.

Cette attaque frontale visait en premier lieu les dérives de la finance internationale, les propos ayant été tenus en présence des nouveaux ambassadeurs auprès du Saint-Siège de puissantes places financières comme la Suisse et le Luxembourg. Mais, comme l’a souligné le quotidien français « La Croix », c’est aussi “une feuille de route qui guidera la réforme de la banque du Vatican envisagée par le pape ”.

Certes, l’OIR actuelle ne sent plus autant le souffre que dans les années 60 à 90. À cette époque, selon plusieurs livres consacrés à cette banque fondée en 1942 pour gérer l’argent des prélats du Vatican, les mafias italiennes et américaines auraient largement réussi à utiliser cette institution financière pour blanchir de l’argent. L’ombre de la banque du Vatican plane également au-dessus de la mort, en 1982, de Roberto Calvi. Surnommé le “banquier de Dieu” à cause de ses liens avec le Saint-Siège, il était également soupçonné d’être en affaires avec la mafia.

Si cette ambiance de Far west financier n’entoure plus l’institution financière autant qu’auparavant, les soupçons de blanchiment d’argent sont prompts à ressurgir. En 2010, des magistrats romains soupçonnant des transactions frauduleuses ont gelé 23 millions d’euros détenus par l’OIR dans une banque italienne. Ils les ont finalement rendus de nouveau accessibles un an plus tard, mais l’enquête sur l’origine des fonds est toujours en cours. Les États-Unis ont, de leur côté, inscrit en mars 2012 le Vatican sur sa liste de pays soupçonnés d’être un centre de blanchiment d’argent.


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