Mali / El Amena : une « aubaine » pour installer une base de l’AFRICOM au Niger ?

La situation au Mali et l’attaque sur le site du pétrolier britannique British Petroleum à El Amena, en Algérie, auront-elles servi au final les intérêts des Etats-Unis ?  Cela y ressemble bigrement … et bien au delà de la stratégie du chaos que le Pentagone et les lobbies pétroliers et militaires US semblaient vouloir orchestrer ces derniers temps.

Tout comme le 11 septembre avait permis de justifier une surveillance accrue au nom de la chasse aux terroristes, l’épopée des rebelles touaregs et des djihadistes maliens et des terroristes sévissant en Algérie aura permis ni plus ni moins de justifier à sa manière l’installation d’une base militaire US en Afrique via l’Africom. Le tout assorti d’envois de drones pour pouvoir surveiller l’Afrique du Nord et le Sud Algérien. Pour le moins édifiant …. Une information en effet relayée par le quotidien américain New York Times  et confirmée par Reuters.

Plus de 300 personnels de l’Africom devraient ainsi s’installer prochainement dans la région du Sahel, voire plus précisément au Niger, pays pour le moins stratégique pour le groupe nucléaire français Areva, ce dernier exploitant un important site d’extraction d’uranium sur son territoire.

Selon le NY Times, des drones Predator seront ainsi chargés d’effectuer des missions de surveillance dans la région «afin de combler le manque d’informations plus détaillées sur un certain nombre de menaces régionales dont celles relatives aux groupes terroristes activant dans le nord du Mali et au flux de combattants et d’armes en provenance de Libye».

L’Africom envisagerait par ailleurs l’établissement d’une base de drones au nord-ouest de l’Afrique afin nous dit-on d’augmenter les missions de surveillance des groupes extrémistes. Si les drones de surveillance seraient dans un premier temps non armés, des responsables militaires américains n’excluent pas toutefois le recours à des tirs de missiles «en cas d’aggravation de la menace».

Des autorités nigériennes, sous couvert de l’anonymat, ont par ailleurs confirmé à Reuters que le Niger venait de donner son accord pour l’implantation d’une base aérienne américaine sur son territoire.

«L’ambassadrice des Etats-Unis au Niger, Bisa Williams, s’est adressée lundi soir à Mahamadou Issoufou, président nigérien, qui a immédiatement accepté sa demande», a précisé la source. Lequel  avait récemment exprimé sa volonté de mettre en place «une relation stratégique à long terme avec les Etats-Unis».

«Les drones seront positionnés dans le nord du Niger, dans la région désertique d’Agadez, à la frontière avec le Mali, l’Algérie et la Libye», a par ailleurs indiqué la même source à l’agence Reuters. Cette dernière ajoutant toutefois que le Commandement de l’armée américaine pour l’Afrique (Africom) n’avait fait aucun commentaire sur le sujet à l’heure actuelle.

«Cela est directement lié à l’intervention militaire au Mali, mais il pourrait aussi donner à l’Africom une présence plus durable pour les missions de renseignement, de surveillance et de reconnaissance (ISR)», ont justifié quant à eux les militaires US, précise pour sa part le NY Times.

Reste que certains responsables à la Maison-Blanche pourraient s’opposer à un plan de cet ordre, peu enclins à engager des forces américaines supplémentaires en Afrique du Nord, alors que les Etats-Unis sont au bord d’une falaise fiscale (fiscal cliff).

– Quand  le général Carter Ham multipliait les visites à Alger

Rappelons par ailleurs  qu’en visite à Alger au début du mois d’octobre, le général Carter Ham, chef du commandement américain pour l’Afrique (Africom), avait déclaré que son pays privilégiait une solution diplomatique et politique à la crise malienne. Une manière – selon le site « Sahel Intelligence » – « d’ajouter à la confusion générale de la communauté internationale » sur la question. Le journal indiquant par ailleurs qu’en l’espace de cinq mois, le commandant de l’Africom s’était  rendu deux fois en Algérie. 

Officiellement, pour le général Carter Ham, il était alors impératif de faire la distinction entre les groupes armés terroristes et ceux qui ne le sont pas. Une manière de justifier les investigations menées par les Etats-Unis en vue de faire la lumière sur les rôles du MUJAO, du MNLA, le mouvement indépendantiste touarègue, et d’Ansar Dine, la milice des Défenseurs de l’Islam. 

Certes, parallèlement, le général américain en visite à Rabat (Maroc) avait réitéré les réserves de Washington quant à une action militaire au Sahel. «Aucune intervention militaire n’est envisageable dans cette région ni dans le nord du Mali», avait alors insisté le général Carter Ham estimant que « le déploiement de forces militaires ne fera que compliquer la situation en ce moment ». 

Une « prudence » bien surprenante pour les Etats-Unis, toujours prompts à dégainer … à moins que l’objectif ne soit de provoquer le chaos chaque jour un peu plus … en manipulant justement des groupes extrémistes … alors même que le pays détient des ressources en matières premières fort convoitées telles que pétrole, gaz, uranium, or et coltan. 

Alors que la Mauritanie est soumise elle aussi à de fortes turbulences, précisons également que le responsable militaire américain s’était entretenu dans sa capitale, Nouakchott, avec le président mauritanien, Mohamed Ould Abdel Aziz, lequel était encore début octobre opposé à une intervention militaire au Mali, tout comme l’Algérie.

On est alors en droit de se demander si au final, Washington, le lobby pétrolier US et le lobby militaire n’auraient pas intérêt à miner la situation … histoire de vendre des armes et éviter que des concurrents un peu trop zélés ne raflent la mise sur le potentiel énergétique du pays, avais-je suggéré  alors. A quelques jours à peine des élections présidentielles US, qu’il fallait gagner … et financer … 

– AFRICOM et Sénégal  : des relations  plus que cordiales

Précisons également qu’en décembre 2011, provoquant  l’incompréhension mais également les craintes de la population sénégalaise, Washington avait  lancé officiellement une alerte en direction de leurs ressortissants, exhortant ses officiels à éviter tout voyage « non essentiel » vers le Sénégal. Raisons invoquées : des risques « de troubles » dans le pays à la veille « de la présidentielle du 26 février 2012 ».

Simple coïncidence ? Rappelons que le 21 avril 2011, le Général américain Carter Ham, tout frais nommé commandant du Commandement des États-Unis pour l’Afrique (AFRICOM) avait effectué sa première visite au Sénégal, reçu alors tour à tour par le chef d’Etat major des Forces armées sénégalaises, le général Abdoulaye Fall, le ministre des Forces armées, Bécaye Diop, et le président de la République alors en place Abdoulaye Wade …

Certes, en août 2011  un officier américain avait affirmé à des journalistes sénégalais en visite à la base américaine de Stuttgart en Allemagne que le Commandement des Etats-Unis pour l’Afrique (AFRICOM) »n’a(vait) pas besoin de base » sur le continent et n’en a(vait) jamais fait la demande … Mais est bien idiot celui qui ne change pas d’avis …

A l’occasion de sa visite, en avril 2011, le général américain Carter Ham avait également assuré pour sa part que le partenariat entre le Commandement régional américain pour l’Afrique (AFRICOM) et le Sénégal allait s’accentuer dans l’avenir.

Le ministre des Forces armées du Sénégal  indiquait pour sa part que l’AFRICOM était « très proche » de l’armée sénégalaise et »échange(ait) beaucoup » avec celle-ci pour trouver des solutions aux conflits dans la sous-région. »Sur le plan de la formation, nous souhaitons que ça aille de l’avant. Nous voulons que les échanges soient plus permanents », avait également précisé le ministère des Forces armées.
« Le Sénégal n’aura pas le privilège d’accueillir le siège de l’Etat-major d’Africom » affirmait pour sa part en juin 2010 la presse sénégalaise alors que les Etats-Unis avaient laissé entendre qu’ils souhaitaient déplacer les 1300 membres de leur personnel de Stuttgart vers l’Afrique. 

« Nous sommes ici pour un temps indéfini », avait alors déclaré l’ambassadeur Antony Holmes, adjoint civil du général William Ward, commandant de l’Africom interrogé par Radio France internationale. A cette date, le Sénégal était candidat pour accueillir le siège, comme le Libéria ou l’Ethiopie. Voire le Maroc … ? 

Rappelons que l’AFRICOM est formée de quelque 1.500 personnes dont le travail principal est la planification des activités militaires en Afrique. Sa mission consiste – officiellement – à protéger et à défendre les intérêts sécuritaires des Etats-Unis à travers le renforcement des capacités de défense des Etats et des organisations africaines.

Il mène des opérations militaires, afin – nous dit-on – « de dissuader et de vaincre les menaces transnationales et de fournir un environnement sécuritaire favorable à la bonne gouvernance et au développement ».

Basé à Stuttgart, l’AFRICOM est ainsi l’un des six états-majors de commandement géographique du Département de Défense US. Annoncé par l’administration Bush le 6 février 2007, il a commencé à fonctionner le 1er octobre 2008 et a été placé sous le commandement du général afro-américain William E. Ward.

Officiellement l’AFRICOM oeuvre pour un partenariat fructueux entre les Etats-Unis et 53 nations d’Afrique et pour l’instauration d’espaces de sécurité et de stabilité sur le continent. Des missions qui pourraient être loin d’être totalement désintéressées …

Sources : APA, www.politicosn.com, Allafrica.com, www.lexpressiondz.com, Reuters, Afriquejet.com , La Tribune (Algérie)

Elisabeth STUDER – 01 février 2013 – www.leblogfinance.com


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