Manipulation des taux de change, l’autre Libor ?

HSBC aussi. La plus importante banque européenne a confirmé, lundi 4 novembre, qu’elle coopérait avec la Financial Conduct Authority (FCA – le gendarme de la Bourse britannique) et les autorités d’autres pays, qui mènent des investigations sur les pratiques de plusieurs institutions financières en matière de transactions sur le marché des changes.

Depuis plusieurs mois, les autorités de régulation boursière de pays comme les États-Unis, l’Allemagne, la Suisse ou la Grande-Bretagne cherchent à déterminer si des traders employés par certaines des plus grandes banques mondiales avaient manipulé les taux de change pour maximiser leur profit.

La semaine dernière, les choses ont commencé à se préciser. Barclays et JP Morgan ont confirmé avoir suspendu plusieurs de leurs traders. UBS, Citigroup et Deutsche Bank ont reconnu, de leur côté, avoir lancé des enquêtes internes pour déterminer si certains de leurs traders ont contribué à fausser le marché des changes.

Échanges d’informations

Au cœur de l’affaire, un service de messagerie instantané et plusieurs milliers de milliards de dollars. La chaîne économique américaine Bloomberg a été la première, en juin 2013, à affirmer que des traders de banques pourtant concurrentes s’échangeaient des informations sur les ordres de change de devises de leurs clients.

Ces acteurs bien informés du marché s’entendaient ensuite, d’après les accusations, pour gonfler ou minimiser les ordres en fonction de leurs propres paris sur telle ou telle devise, afin d’influencer le taux de change et maximiser leur profit. Ce sont, en effet, les opérations de ces traders qui permettent de fixer le taux de référence quotidien WM/Reuters, essentiel pour determiner le cours de 160 monnaies. Il est calculé, à intervalle régulier, en prenant la médiane des transactions réalisées pendant soixante secondes. La moitié des transactions sur ce marché est, en outre, réalisée par les opérateurs de seulement quatre banques (Deutsche Bank, Citigroup, UBS et Barclays). Une situation d’oligopole sur un marché peu régulé qui, d’après Bloomberg, favorise les ententes.

Certes, ces manipulations supposées n’affecteraient pas l’ensembe de ce marché sur lequel les échanges de devises atteignent tous les jours 5 300 milliards de dollars (3 929 milliards d’euros). « Il est probable que les principales parités, comme l’euro/dollar ou le yen/dollar, des marchés totalement liquides aux énormes volumes échangés ne sont pas concernées », souligne le quotidien Le Monde. Les traders se seraient davantage intéressés à des monnaies secondaires, d’Amérique Latine ou de Scandinavie, qui sont plus facilement manipulables.

Un air de Libor

Ce nouveau scandale en devenir rappelle celui du Libor, qui ébranle depuis plus d’un an le monde financier. Dans cette affaire aussi, des traders s’étaient mis d’accord entre eux pour fausser le Libor, un taux de référence fixé à Londres qui sert d’indice pour établir les taux d’intérêt de centaines d’autres produits financiers comme les prêts étudiants aux États-Unis ou les crédits immobiliers. Les révélations sur l’ampleur des manipulations ont amené les autorités de régulation de plusieurs pays à infliger des amendes à plusieurs banques qui, pour l’instant, dépassent les 2,5 milliards d’euros.

Si les enquêtes officielles permettent de révéler que les taux de change ont bel et bien été manipulé ces dernières années, la « confiance dans les activités des grandes banques risque d’être encore plus ébranlée », regrette le quotidien économique britannique Financial Times. Et d’autres amendes pourraient venir alourdir encore l’ardoise de ces institutions financières.


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