Pourquoi Babyzen cartonne avec sa poussette Yoyo

Elle a envahi Paris, Londres, Singapour, Moscou, New York, Dubaï. On en croise à Pékin et Shanghai – pas toujours des vraies -, dans les rues d’Amsterdam et dans les parcs de Madrid. En une demi-douzaine d’années, la poussette Yoyo de Babyzen, ultrapliable, ultralégère, a conquis les ultraurbains.  » La parentalité a changé, explique Julien Chaudeurge, le PDG cofondateur. On a des enfants plus tard, très rapprochés, les deux parents travaillent, veulent continuer à vivre comme avant, et n’ont pas toujours de voiture.  » Il fallait concevoir un engin assez étroit pour passer les portiques du métro, assez léger pour être porté plié sur l’épaule dans l’escalier des immeubles sans ascenseur, assez fin pour ne pas gêner dans un restaurant, assez compact pour passer comme bagage cabine dans un avion. Et ce n’est pas tout :  » On doit pouvoir conduire la poussette à une seule main parce qu’on téléphone, y accrocher ses courses sans la faire verser en arrière, ou installer l’aîné sur une plateforme quand il est fatigué. « 

3 ou 4 réseaux premium

Tout cela, la Yoyo le fait. D’autres marques aussi, mais… elles ne sont pas la Yoyo. C’est là la grande force de la famille Chaudeurge, qui a le design dans le sang : Jean-Michel, le père, a conçu le célèbre Babycook, de Beaba, ce cuiseur mixeur taille bébé, un best-seller mondial, et Julien, le fils, travaillait au marketing chez Fiat au moment de la relance de la 500.  » En 2009, avec mon père, nous rencontrons Gilles Henry, l’ingénieur qui vient nous présenter son système de pliage en carré, se souvient Julien Chaudeurge. Nous avons vu des tubes, des roues, et on a su qu’on allait faire un carton.  » Trois ans plus tard, la Yoyo est lancée, bicolore, avec des roues blanches. Elle n’est pas vendue n’importe où, ni à n’importe qui :  » C’est un très beau produit, de grande qualité, avec un prix conséquent [de 400 à 900 euros] : on a donc attaqué des villes plutôt que des pays, et en y choisissant les trois ou quatre réseaux premium et tendance.  » Natalys, qui fait partie des premiers à avoir référencé la Yoyo, confirme :  » Avec notre réseau de magasins exclusivement en centre-ville, cette poussette compacte, pratique et facile d’utilisation correspond à notre clientèle citadine « , détaille Sarah Pottier, responsable achat puériculture du réseau. Dans les magasins, la Yoyo est systématiquement présentée pliée et accrochée au mur. Julien Chaudeurge y tient :  » Si un client demande à la voir, le vendeur la décroche, la déplie d’une main et là, elle est vendue. Il faut le geste. « 

Pour se déployer, la société, dont le chiffre d’affaires a dépassé les 50 millions d’euros l’an dernier (contre 35 millions en 2017), peut compter sur le soutien de Capital Croissance, un fonds d’entrepreneurs qui a fait évoluer leur stratégie. Et cela, même si les Chaudeurge et les associés fondateurs contrôlent l’affaire à 85 %. « Nous avons beaucoup discuté des risques d’être monoproduit et monofournisseur, affirme Eric Neuplanche, associé fondateur de Capital Croissance, mais Babyzen a un tel potentiel que nous avons renouvelé notre confiance début 2019, pour encore quatre à six ans. » Un financement de 10 millions d’euros permettra d’accélérer à l’international – déjà 80 % des ventes.

3 ou 4 produits phares

Autre défi : la diversification. « Nous lancerons un nouveau produit dans un an, révèle Julien Chaudeurge. Ce ne sera pas une poussette : Apple n’a qu’un seul téléphone, l’iPhone, Babyzen n’a qu’une seule poussette, la Yoyo. Mais ce sera en rapport avec la mobilité des parents urbains. » Eric Neuplanche, lui, pousse pour aller encore plus loin : « Nous estimons qu’il faudrait trois ou quatre produits phares pour asseoir des relais de croissance. »

En 2017, un BabyZen Store a été ouvert à Paris, un autre est prévu en 2020 à Shanghai. Une façon de dupliquer la stratégie d’Apple avec ses Apple store ? « Non, c’est plutôt une vitrine, sourit Julien Chaudeurge. Nous sommes présents dans 88 pays, il nous est pratiquement impossible de nous étendre nous-mêmes dans le monde entier. » Mais le bobo est versatile : comment être sûr que la Yoyo ne va pas passer de mode ? Son statut la protège, selon Cécile Bozzo, maître de conférences en marketing à l’IAE d’Aix-en-Provence : « Le nouveau slogan de Yoyo, “the one you need”, à l’instar du “What else ?” de Nespresso, balaie la concurrence en se positionnant non plus sur la valeur créée par le pliage, mais sur le côté unique de la marque et la satisfaction de posséder l’objet Yoyo. » Il n’y a plus qu’à embaucher George Clooney.

D. Rossi/PhotoPQR/La Provence/MaxPPP

Julien Chaudeurge, cofondateur de Babyzen. Sa cible ? Des parents qui ont « des enfants plus tard, qui travaillent tous les deux et veulent vivre comme avant ».

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La Yoyo. Ultra légère et ultrapliable, elle peut même passer en bagage cabine dans l’avion.

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Boutique Babyzen, dans le quartier du Marais, à Paris. La poussette, commercialisée 400 à 900 euros selon les options, est présentée pliée et accrochée au mur. En un geste, elle est dépliée et… vendue !

SOURCE : SOCIÉTÉ

En une demi douzaine d’années, la Yoyo a conquis les jeunes parents du monde entier, avec 200 000 poussettes vendues l’année dernière.

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