Pourquoi les entreprises gagnent à se délocaliser… en province

« Les salaires des cadres en Ile de France peuvent représenter un surcoût de 30% par rapport à ceux des régions ». C’est ce que plaident, en substance, Antoine Colson et Edouard Chabanon, les cofondateurs du salon Prov’emploi. L’événement vise à promouvoir les jobs mais aussi les possibilités d’implantation en régions, avec 150 exposants (essentiellement des collectivités locales) prêts à tout pour drainer de l’activité économique. Cette année, l’équipe mise beaucoup sur la compétitivité de la Province. Elle a contacté 2000 chefs d’entreprises de moins de 50 salariés pour les faire participer à des ateliers sur « les opportunités d’implantation en Province ». 150 chefs d’entreprises ont répondu à l’appel.

Il y a de quoi : selon les statistiques de l’Insee, comparés aux régions où ils sont les plus bas, les salaires en Ile-de-France peuvent représenter un surcoût de 14 % pour les ouvriers qualifiés et de 30 % pour les cadres.

A la veille de l’édition 2013, qui se tient mardi 15 octobre à la porte de Champerret, Challenges a interrogé Antoine Colson, l’un des co-fondateurs.

Pourquoi l’Ile-de-France n’est-elle plus compétitive ?

L’Ile-de-France, en termes de salaires, est devenue la région la plus chère d’Europe. Cela est essentiellement dû aux prix de l’immobilier. Si vous êtes entrepreneur, vous devez payer votre foncier de bureau plus cher, mais aussi payer vos salariés avec un meilleur salaire pour qu’ils puissent se loger. Dans le cas contraire, ils se logent très loin de leur domicile, passent trois heures par jour dans les transports et cela crée une autre forme de déséquilibre

Vous incitez les chefs d’entreprise à « délocaliser en Province ». Quels sont les avantages d’une telle opération, en dehors des coûts immobiliers ?

Les aspirations des chefs d’entreprises sont souvent les mêmes que celles des individus, et la qualité de vie et les loisirs font partie de leurs principales motivations. D’ailleurs, sur les 3000 entreprises qui quittent l’Ile-de-France chaque année, 60 % sont des TPE, qui n’ont pas de salariés. En réalité, ce sont des travailleurs indépendants, traducteurs, informaticiens, consultants, qui travaillent loin tout en se nourrissant d’un marché parisien dans lequel elles ont déjà fait leur trou.

Bien sûr, il y a d’autres avantages. D’abord, les collectivités locales proposent beaucoup de dispositifs d’aides, centres de télétravail ou de co-working, télésecrétariat, aides financières…

Certains entrepreneurs se plaignent, à paris, d’être un compte en banque parmi tant d’autres. En Province, leurs sociétés sont mieux considérées car elles sont moins anonymes.

Enfin, le turn-over des salariés n’a rien à voir. A Paris, les salariés sont hyper-sollicités. En Province, ils sont souvent plus stables.

Le tableau n’est pas toujours idéal cependant. A quoi faut-il faire attention avant d’installer son entreprise en Province ?

En premier lieu, il faut avoir un planning financier très strict. Dès que vous quittez les grandes métropoles, il faut raisonner avec une voiture, et souvent plusieurs pleins par semaines, pour les salariés comme pour le chef d’entreprise.

Il faut aussi s’assurer que le bassin d’emploi est suffisant pour pouvoir recruter la main-d’œuvre qualifiée. L’accueil des salariés « déménagés » n’est pas toujours favorable, surtout quand ils ont une famille et un conjoint qui tient à son job… Dans certaines entreprises, seule la moitié a suivi.

Enfin, un entrepreneur qui déménage son entreprise d’Ile-de-France vers la Province ne doit pas oublier que personne ne l’attend: il doit être volontaire, courageux, et surtout faire preuve de modestie.


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