Rencontre entre Lagarde (FMI) et le ministre des finances grec : nouveau plan de sauvetage en vue ?

La Grèce pourrait-elle être prochainement contrainte à recourir une nouvelle fois à un plan d’aide du Fonds monétaire international ? Tel pourrait bien être le cas … Le FMI vient en effet de reconnaître jeudi que la directrice générale du Fonds , Christine Lagarde et le ministre grec des Finances Yannis Stournaras se sont discrètement rencontrés mardi à Paris.

Une entrevue qui intervient alors que des analystes et experts sont de plus en plus nombreux à supputer qu’un nouveau plan de sauvetage pourrait être prochainement mis en place.

« Les discussions ont porté sur l’avenir de la Grèce et sur des sujets d’intérêt commun », a quant à lui précisé le porte-parole du FMI, Gerry Rice, sans fournir de plus amples détails.

Rappelons que la semaine dernière, le FMI a débloqué 3,4 milliards d’euros de prêts à Athènes tout en annonçant le report de la publication de l’audit des comptes grecs, lequel était prévu jeudi. Report justifié – si l’on en croit le porte-parole du Fonds – par des raisons internes purement techniques, ce dernier niant tout lien avec la rencontre entre Christine Lagarde et le ministre grec.

Il n’en demeure pas moins que l’Allemagne vient de remettre sur le devant de la scène un scénario d’un troisième plan d’aide à la Grèce.

Alors que les impôts ne cessent de s’envoler dans le pays, Athènes est désormais confronté à un double problème : l’appauvrissement de sa population pour ne pas dire la descente aux enfers des plus pauvres … et la montée des impayés concernant ses revenus fiscaux. Les citoyens grecs doivent en effet faire face à une situation tellement exsangue qu’ils ne peuvent s’acquitter de leurs dettes fiscales. Mettant en péril le respect des objectifs fixés par la troïka. Laquelle dicte inexorablement sa loi ….

En vue de renflouer les caisses de l’Etat grec en situation de quasi-faillite, les impôts ont en effet grimpé de manière vertigineuse … entraînant parallèlement une hausse notable de ses « factures » impayées. Lesquelles concernent plus d’un tiers des contribuables. Si plus de 5 milliards d’impayés étaient comptabilisé entre 2010 et 2011,  plus 12,5 milliards ont été enregistrés entre 2013 et 2014. Sur les quatre premiers mois 2014, 4,3 milliards de nouveaux impayés ont d’ores et déjà été chiffrés.
En vue de résoudre le problème, le gouvernement d’Antonis Samaras a récemment fait part de sa volonté d’abaisser progressivement les impôts. Selon une source au ministère des Finances en Grèce, des solutions sont actuellement à l’étude. Le gouvernement examinerait ainsi non pas une baisse des prélèvements mais la possibilité de donner des délais. … l’urgence semblant plus être de limiter les impayés que d’assurer une situation descente aux citoyens grecs.

Selon les données du ministères, sur 11 millions d’habitants que compte la Grèce, 3.344.246 contribuables présentent des arriérés de paiement d’impôts. Lesquels correspondaient fin avril  à un montant cumulé de plus de 66 milliards d’euros, soit plus d’un tiers des 182 milliards d’euros du PIB 2013 …

Parmi les scénarios envisagés figurent l’augmentation du nombre de mensualités prévues dans le cadre de la procédure de règlement à l’amiable des impayés. Actuellement prévue en douze versements, elle pourrait passer à 48 versements. Mais la question demeure toutefois soumise à discussion avec la troïka …
En février 2013, le directeur de la Banque Nationale de Grèce, indiquait d’ores et déjà au quotidien grec Kathimerini que fin 2012, près d’un quart des crédits bancaires consentis en Grèce n’étaient pas remboursés. Et ce, malgré de nombreux rééchelonnements. Une manière à peine voilée d’indiquer que les créances douteuses des établissements financiers grecs devraient atteindre des sommes vertigineuses.

En février 2014, s’exprimant dans un entretien accordé au journal allemand Bild, le Premier ministre grec, Antonis Samaras avait assuré pour sa part que son pays n’avait pas besoin d’un nouveau plan de sauvetage.

Une réponse directement en rapport avec l’état financier et économique de l’Etat grec ? Des propos tenus en vue d’obtenir un allègement de la dette grecque ? Volonté parallèle d’échapper au joug de la troika (UE-BCE-FMI) ? laquelle pourrait être elle-même manipulée de près ou de loin, consciemment ou pas, par des banques US telles que Goldman Sachs, alors même que Mario Draghi – le président de la BCE – figurait encore récemment parmi ses membres.

Ou au final, tentative de dernier espoir pour éviter qu’un véritable chaos ne frappe le pays ? contexte, qui, le cas échéant, pourrait ouvrir la voie à une politique économique prônée par les Chicago Boys . Une telle situation pourrait en effet permettre de faire adopter des mesures drastiques ouvrant la voie à ultra-libéralisme via la mise en œuvre d’une politique sociale et financière ultra-libérale, au détriment des couches les plus basses de la population. A moins que cela ne soit déjà le cas …

En tout état de cause, le Premier ministre grec avait martelé lors de l’entretien que son pays n’avait pas besoin d’un troisième plan d’aide. Ajoutant : « nous atteignons notre objectif avec l’actuel plan d’aide, et cela fonctionne « .

Rappelons que la Grèce a été placée en 2010 sous assistance financière de la troïka, laquelle lui a accordé deux programmes de prêts d’un montant total de 240 milliards d’euros. Des sommes allouées certes en vue d’éviter la faillite grecque mais accordées en contreparties de mesures drastiques impactant lourdement la population.

Tentant de calmer l’électorat, le gouvernement affirme ne pas avoir besoin d’une nouvelle aide, tout en revendiquant l’allègement du poids de sa dette, en vertu d’engagements pris par ses partenaires européens en 2012.
En août dernier, un responsable de la Banque centrale européenne (BCE), l’Allemand Jörg Asmussen, avait  quant  à lui laissé entendre  que la Grèce pourrait recevoir un troisième versement financier en vue d’assurer le maintien de son économie. Une aide qui serait toutefois octroyée à condition qu’Athènes respecte scrupuleusement ses engagements financiers. Des propos faisant suite à ceux du ministre des Finances allemand,  allant également dans ce sens. Lors d’une réunion électorale en vue de préparer les élections législatives, Wolfgang Schäuble, avait  en effet déclaré que la Grèce avait besoin d’une nouvelle aide budgétaire.  Position nuancée rapidement par la chancelière allemande Angela Merkel, cette dernière précisant qu’aucune décision ne serait prise avant 2014. Parallèlement, dans un entretien à un quotidien finlandais, le commissaire européen aux Affaires économiques Olli Rehn avait indiqué pour sa part qu’il envisageait une nouvelle aide à la Grèce, cette dernière pouvant s’établir sous forme d’un allongement de la durée de remboursement de ses emprunts.  Fin juillet, le Fonds monétaire international (FMI) avait d’ores et déjà demandé à l’Union européenne d’étudier la possibilité de verser une nouvelle aide à la Grèce en vue de garantir la viabilité de sa dette.

Durant l’été 2013, Athènes avait tenu à rassurer ses créanciers en indiquant que le limogeage du président du fonds grec chargé des privatisations (Taiped) n’allait pas affecter son plan de privatisations auquel elle s’est engagée en échange des prêts consentis. Le Taiped annonçant dans la foulée le lancement d’un concours international pour la cession de 100% de la société de maintenance du réseau ferroviaire Rosco, laquelle figure sur la liste des privatisations.

Elisabeth Studer – www.leblogfinance.com   – 5 juin 2014

Sources : AFP, Euronews, L’Express

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