Wolfgang Schäuble reste ministre des Finances

A 71 ans, Wolfgang Schäuble affiche une longévité politique sans pareil en Allemagne: figure de proue du parti conservateur CDU, cinq fois ministre (la première fois en 1984), député depuis plus de 40 ans, il est le plus âgé du nouveau gouvernement Merkel.

Celui qui a été agressé par un déséquilibré en 1990 et se déplace depuis en fauteuil roulant est considéré comme un des artisans de la Réunification allemande.

Il a « presque tout réussi », selon le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung.

Mais « presque » tout seulement: longtemps dauphin d’Helmut Kohl, qui l’a trahi, il n’a finalement jamais accédé à la chancellerie.

Son nom a circulé pour la présidence de la République, mais Angela Merkel en a préféré un autre.

Il rêve d’une Europe fédérale

Et fin 2012 il s’était incliné devant les réticences de plusieurs partenaires européens de l’Allemagne en renonçant à prendre la tête de l’Eurogroupe.

Dans la gestion de la crise de la dette, Wolfgang Schäuble, juriste de formation, n’a pas été tendre avec les autres Européens, même s’il a oeuvré à maintenir l’intégrité de la zone euro.

Celui qui s’est décrit comme « impitoyable » dans sa gestion des deniers publics allemands applique depuis 2010 cette même intransigeance à ses partenaires, faisant campagne pour un renforcement de la discipline budgétaire, posant des conditions strictes aux aides auxquelles Berlin est le plus gros contributeur.

Têtu et belliqueux, ne mâchant pas ses mots, il s’est attiré les foudres d’Athènes pour ses « railleries », parce qu’il avait remis en question le calendrier électoral grec.

Il est pourtant profondément pro-européen. Né en 1942 à Fribourg-en Brisgau, non loin de la frontière française, c’est l’une des rares personnalités politiques allemandes à avoir connu la guerre, ne serait-ce qu’enfant. C’est là qu’est ancrée sa propre conviction européenne, lui qui rêve à haute voix d’une Europe fédérale.

« Je ne suis pas facile »

Son handicap est source répétée de problèmes de santé, mais, bourreau de travail, Wolfgang Schäuble a tout de même continué en 2010 à diriger son ministère depuis son lit d’hôpital, alors que l’Europe était secouée par la crise.

Sa patronne avait alors refusé qu’il rende son tablier, a-t-il confié à la presse.

Leur relation, houleuse par le passé, « est à leur avantage à tous les deux: elle a besoin de quelqu’un comme Schäuble, qui s’oppose aux projets utopiques de baisses d’impôts (…), il a besoin de quelqu’un comme Merkel, qui le soutienne », analyse le magazine politique Cicero.

« Je suis tellement loyal que je n’ai plus à en faire la preuve (…), mais je ne suis pas facile », a-t-il affirmé lui avoir dit quand elle lui a proposé le poste de ministre des Finances en 2009.

Son biographe Peter Schütz parle de l’homme « le plus direct » qu’il connaisse, même s’il n’est « pas toujours le plus charmant ». La façon dont il a humilié en public son porte-parole en 2010 est restée dans les annales.

« Une capacité d’analyse et une logique hors du commun »

S’il semble souvent perdre le fil de son propos -le Berliner Zeitung évoque ses « monologues interminables »-, Cicero rappelle que « quand Schäuble dit +premièrement+, il suit forcément un +deuxièmement+, même s’il paraît s’égarer entre temps ».

« Ses capacités d’analyse et sa logique sont hors du commun », reconnaît l’hebdomadaire Die Zeit, « mais sa connaissance des hommes ne l’est pas ». Une référence à sa fidélité contre-nature à Helmut Kohl.

Son biographe Peter Schütz voit dans cette loyauté sans faille le trait caractéristique de « l’homme de devoir protestant » qu’est Wolfgang Schäuble, profondément croyant. En revanche « il lui manque cette soif de pouvoir égotiste qu’il faut manifestement pour arriver (…) au sommet », écrit le journaliste dans sa biographie parue l’an dernier.

(Avec AFP)


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