Analyse et Stratégie : Les marchés émergents boudés ? Pas chez Robeco !

Le gestionnaire d’actifs néerlandais Robeco tenait ce mardi un déjeuner-conférence sur les perspectives macroéconomiques des marchés émergents au cours duquel il s’est employé à défendre son credo : « c’est le meilleur moment pour investir dans les marchés émergents ». Fabiana Fedeli, gérante marchés émergents et responsable actions fondamentales chez Robeco, affiche son enthousiasme.

Pour F. Fedeli, s’il faut retenir une chose, c’est « Gardez votre objectif en tête ». Voilà ses maîtres mots. Bien au-delà du risque politique, des annonces des banquiers centraux et de la quasi-guerre commerciale entre les États-Unis et le reste du monde, il faut avant tout se concentrer sur les résultats des entreprises, et mettre un peu de côté les réflexes « value » et « rendement » – les marchés émergents étant historiquement peu chers et rapportant plus que les marchés développés – lorsqu’on se concentre sur les marchés émergents.

Pourtant, fin mai, les fonds en actions émergentes ont enregistré des rachats nets hebdomadaires de 2 milliards de dollars, un record depuis 2016 ! Alors que penser dans ce contexte de grands bouleversements macroéconomiques ?

La menace américaine

À l’occasion de son dernier comité de politique monétaire, la Fed a une nouvelle fois remonté ses taux directeurs d’un quart de point, et deux nouveaux resserrements sont à attendre d’ici la fin de l’année. Avec un taux à 10 ans qui frôle les 3%, les obligations américaines offrent des rendements de plus en plus attrayants et les pays émergents redoutent une fuite des capitaux vers les T-bills. Fabiana Fedeli se dit moins pessimiste sur la question, la meilleure performance des marchés émergents datant de la période 2004-2006 où les taux américains avaient grimpé de 450 points de base. L’épisode de forte croissance économique d’il y’a quatorze ans n’est pourtant pas comparable avec la situation actuelle de l’économie.

Pour ce qui est de la « guerre commerciale », elle relève « plutôt de l’effet d’annonce » pour la gérante, malgré l’extension des taxes douanières par Donald Trump à non plus 50 mais 200 milliards de dollars de biens d’importation chinois. Les enjeux sont trop importants pour la Chine d’un point de vue économique (10% de ses exportations) et social. Les deux pays devraient, en toute logique, arriver à un accord. Une méthode de négociation qui inquiète tout de même Robeco, avec une Europe bien plus exposée que ne le sont les marchés émergents.

Enfin, la poussée du billet vert face aux autres devises n’aurait pour Fabiana Fedeli qu’un impact limité : seuls les pays les plus vulnérables comme l’Argentine, le Brésil ou la Turquie seraient fortement pénalisés.

L’émergent a encore beaucoup d’attraits

À l’occasion de sa présentation, la gérante énonce d’autres points en faveurs des émergents : les PMI, qui, bien que très variables d’un pays à l’autre, se sont globalement améliorés pour les marchés émergents, tandis que le cycle économique tendrait à l’amélioration. Robeco salue par ailleurs les changements structurels amorcés par certains pays comme l’Inde et la Corée ces vingt dernières années. Couplés à une meilleure maîtrise des coûts des entreprises, « émergent » ne veut plus nécessairement dire « risqué ». Les gérants ne restent à l’écart que de la Malaisie et de la Turquie.

Il faut, pour Fabiana Fedeli, « garder votre objectif en tête » et se concentrer sur les résultats d’entreprises sans se « laisser distraire par le bruit ». Robeco utilise pour ses fonds émergents ses modèles classiques de valorisation, en y intégrant toutefois une « forte composante pays », difficilement quantifiable. Les critères RSE, à la fois comme sonnette d’alarme et symbole d’opportunité, forment un autre curseur central dans la décision, que le fonds concerné soit labélisé ou non.

Alors que deux de ces fonds émergents « Robeco Emerging Starts Equities » et « Robeco Emerging Markets Equities » connaissent un début d’année difficile, la société de gestion réaffirme sa position sur le sujet. Les marchés émergents, qui représentent 22 milliards de dollars d’encours pour Robeco (soit près de 10% de l’encours total de ses fonds), restent moins chers, rapportent plus et ne sont pas plus risqués que les marchés développés, et leurs fondamentaux sont bien plus solides que par le passé, affirme le gestionnaire néerlandais.


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