BNP Paribas : des prêts en francs suisses … remboursables en euros, pratique commerciale trompeuse ?

Nouveau scandale financier en vue ? Tel pourrait bien être le cas … Certaines banques – comme BNP Paribas – ayant semble-t-il un peu trop misé sur la force du franc suisse par rapport à l’euro. A en tromper ses clients ? …
En tout état de cause, une information judiciaire pour pratique commerciale trompeuse a récemment été ouverte à Paris après les plaintes de personnes ayant contracté un emprunt BNP Paribas en francs suisses.

En novembre 2011, ces clients avaient déposé une première plainte pour pratique commerciale déloyale et trompeuse, estimant avoir été mal informés sur les risques de ce produit. Une enquête préliminaire avait alors été ouverte. Une quarantaine de plaintes avec constitution de partie civile devraient prochainement s’ajouter aux quelque 140 déjà déposées.
Désormais, Claire Thépaut, a été désignée comme juge d’instruction chargée de conduire l’enquête.

Au cœur du dossier : le prêt immobilier Helvet Immo conçu par BNP Paribas Personal Finance et mis sur le marché de mars 2008 à décembre 2009. Emprunt destiné pour la majeure partie des 4.000 souscripteurs, à financer l’acquisition d’un logement dans le cadre des dispositifs fiscaux Robien ou Scellier.
Le hic : le prêt a été consenti en francs suisses par la banque, mais remboursable en euros … De ce fait, le montant du capital restant dû dépend de l’évolution du cours du franc suisse par rapport à l’euro. Mécanisme d’autant plus impactant pour les emprunteurs que la monnaie helvétique s’envole depuis quelques mois, rendant le coût de cet emprunt chaque un peu plus élevé pour les souscripteurs.
Précisons que pour attirer le « chaland », les prêts proposés affichaient des taux inférieurs au marché … leurs souscripteurs assumant l’intégralité du risque de change …
Charles Constantin-Vallet, l’avocat du collectif de victimes “Helvet Immo”  rappelle quant à lui que le prêt avait été présenté comme « la meilleure offre du marché offrant sécurité et stabilité » …
Le député socialiste François Brottes (Isère) a indiqué pour sa part à l’Assemblée nationale que « la variabilité du taux d’intérêt n’aurait pas été exposée de manière claire ». Selon Franck Reynier, député-maire de Montélimar (UDI), « 4 000 familles en France » sont concernées « pour un préjudice global estimé à plus de 150 millions d’euros ».
En dehors de BNP Paribas, une cinquantaine d’intermédiaires en opérations bancaires (promoteurs immobiliers, conseillers en gestion de patrimoine, etc.) sont visés par les plaignants, en tant qu’intermédiaires ayant commercialisé ce produit. Le groupe Akerys, Lonlay & Associés, Fidelium et Hermès Conseil figurent notamment par les sociétés incriminées.

Réagissant à cette « attaque », BNP Paribas Personal Finance a tenu à préciser dans un communiqué que 96% des clients qui avaient la possibilité de convertir leur prêt en euros dans le cadre de leur contrat avaient fait le choix de conserver l’évaluation en francs suisses.
Personal Finance refuse également que son offre soit qualifiée de “toxique”, estimant qu’il n’y a pas de spéculation et affirmant ne pas appliquer de marge à la hausse ou à la baisse du taux de change.
Reste que le prêt “Helvet Immo” ressemble étrangement aux prêts dits toxiques indexés sur le cours du yen… et du franc suisse.

Nouveau mauvais point pour le gouvernement, voire affaire dans l’affaire ? Le journal Libération indique pour sa part que répondant dans un courrier à son ami député PS de Paris Pascal Cherki, lequel l’interrogeait sur le dossier des emprunts toxiques, le ministre Benoît Hamon a semble-t-il commis erreurs et approximations, se faisant même l’avocat de la banque.
Citant une enquête de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), le ministre indique ainsi qu’ »à la lumière des constats effectués et compte tenu de la mise en place d’un dispositif adapté de médiation par BNP Paribas Personal Finance, il n’a pas été envisagé d’engager une action contentieuse à l’encontre de cet établissement.»
Benoît Hamon certifie également que «l’enquête de la DGCCRF montre que les établissements de crédit ont commercialisé des prêts en franc suisse essentiellement auprès des particuliers percevant leurs revenus dans la monnaie helvétique, ce qui ne présente pas de risque de change pour ceux-ci». Ce que la banque elle-même reconnaît comme étant inexact …indiquant qu’elle a commercialisé ses prêts en franc suisse à des clients rémunérés en euro.

Sources : AFP, Libération, Dauphiné Libéré
Elisabeth Studer – www.leblogfinance.com  – 13 avril 2013


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