Code du travail: « Tout reste entre les mains du gouvernement »

Comment expliquez vous la dislocation du front syndical sur la loi El Khomri ? 

Il y a deux approches de cette loi. L’une d’entre elles est plus dans le refus, c’est celle de la CGT et de Force Ouvrière. L’autre est dans l’amendement du texte, c’est la nôtre. Le côté le plus clivant pour les syndicats, c’est d’accepter ou non de renvoyer la négociation vers l’entreprise. Il y a une division de fond sur la méthode à adopter : faut-il enterrer le projet de loi ou chercher à le faire évoluer ? Aujourd’hui, il n’y a plus vraiment de dialogue avec la CGT, qui ne cherche plus à faire changer le texte. Reste à savoir quel sera leur positionnement si le gouvernement accepte d’apporter des modifications en faveur des droits des travailleurs dans le projet de loi. Continueront-ils de réclamer sa suppression pure et simple ? C’est toute la question. 

Irez-vous manifester avec la CGT et Force Ouvrière le 9 mars ?

Non. Nous n’irons pas parce que le mot d’ordre de la mobilisation c’est le retrait de la loi, ce qui n’est pas notre position. Nous, ce que nous souhaitons, c’est l’amender.

Sur quels points espérez-vous faire évoluer le projet de loi ?

Il y a trois points qui nous paraissent fondamentaux. Le premier concerne la barémisation des indemnités prud’homales, leur plafonnement si vous-voulez. Nous sommes contre. Nous pensons que c’est au juge de décider. Le deuxième point, c’est le changement de législation sur les licenciements économiques, et notamment le fait que les grandes entreprises puissent recourir à des licenciements pour des activités déficitaires dans un secteur alors qu’elles sont en bonne santé économique générale. Le dernier élément concerne la négociation en entreprise. Avec la loi El Khomri, s’il y a un blocage, si les négociations s’enlisent, la décision peut être prise unilatéralement par le chef d’entreprise. Ce n’est pas acceptable. Nous réclamons la primauté de la branche.

Y croyez-vous ?

Je pense que sur ces points là, il y a un bon espoir que ça bouge. Ce dont j’ai peur, c’est que ça ne soit pas suffisant. Si nous ne sommes pas satisfaits, nous ferons tout pour faire pression afin que la loi ne soit pas votée telle quelle lors de son passage à l’Assemblée nationale. Nous espérons tout de même ne pas avoir à en arriver là. Manuel Valls a accepté de reporter le texte, c’est déjà un signe. Tout reste entre les mains du gouvernement. Ce qui compte, c’est que nous arrivions à un projet équilibré, qui défende les droits des travailleurs.

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