Des indicateurs américains calamiteux font rechuter le CAC lourdement

Un flot de mauvaises nouvelles s’est abattu sur les investisseurs mercredi, entre les prévisions alarmistes du FMI, la rechute des cours de l’or noir après la publication des stocks de pétrole américains et des indicateurs d’activité industrielle et de ventes de détail catastrophiques outre-Atlantique. Dans ce contexte, le CAC connaît un brusque coup d’arrêt et lâche près de 4%.

Une prise de conscience semble s’être opérée sur le marché parisien mercredi. Alors que les investisseurs avaient fait fi de la première vague d’indicateurs économiques historiquement bas ces dernières semaines, permettant au CAC de reprendre près de 25% depuis son plus bas du 18 mars dernier, la nouvelle salve d’indicateurs calamiteux a ramené le marché à la réalité. En réaction à l’ouverture en baisse des principaux indices à Wall Street, le baromètre du marché parisien a nettement accru ses pertes dans l’après-midi pour boucler la séance 3,76% à 4.353,72 points. Le volume de transactions resserré (3,2 milliards d’euros) témoigne de l’appétit pour le risque qui s’étiole, alors que débute la saison des publications trimestrielles.

Résumant les craintes des économistes, le Fonds monétaire international (FMI) a dévoilé mardi ses nouvelles prévisions sur l’économie mondiale, anticipant désormais une chute de 3% du PIB cette année (au lieu d’une croissance de +3,3%), soit la plus grande récession depuis la Grande dépression post-1929. De sombres perspectives qui semblent être validée par les deux banques américaines qui ont publié hier leurs résultats, à savoir JPMorgan et Wells Fargo, souligne Vincent Boy chez IG. En effet ces dernières ont publié des résultats décevants mais plus important, toutes deux ont provisionné un montant de 12,8 milliards de dollars au total au cours du premier trimestre pour assurer les défauts de paiement à venir de ses clients.

Un marché « un peu trop confiant »

La saison des résultats s’est poursuivie sur la même tendance mercredi avec Bank Of America (bénéfice trimestriel en baisse de 48% à 3,5 milliards, 4,8 milliards de dollars de provisions), Citigroup (-46,5% à 2,5 milliards de dollars de bénéfice net, 7 milliards de provisions) tandis que Goldman Sachs (moins exposé aux crédits à la consommation et aux PME) a multiplié ses provisions par 4 à près d’un milliard de dollars.

Si ces résultats étaient plus ou moins attendus, c’est du côté des statistiques économiques que le couperet est tombé. Les ventes au détail ont plongé de 8,7% en mars aux États-Unis, un record, ce qui constitue « sa plus forte contraction historique (selon les données Reuters depuis 1990) souligne Vincent Boy, qui rappelle que la consommation représente environ 70% du PIB des Etats-Unis ». La production manufacturière a pour sa part subi sa chute la plus brutale (-5,4%) depuis près de 75 ans, selon les statistiques publiées mercredi par la Fed, un repli nettement supérieur au consensus des économistes interrogés par Reuters (-4,0%).

Pourtant, « malgré la saison des résultats sous pression, les perspectives du FMI, la poursuite de l’épidémie et une économie mondiale à l’arrêt, les investisseurs continuent de se porter à l’achat sur les actifs risqués », ajoute Vincent Boy. En effet « la perspective d’une réouverture de l’économie dans les semaines à venir et le boom économique soutenu par le président américain contribuent à une confiance un peu trop importante des marchés » à ses yeux…

Wall Street dans le rouge vif

Les principaux indices new-yorkais évoluent en forte baisse mercredi matin, fragilisés par des indicateurs et des résultats d’entreprises confirmant le choc infligé par la pandémie à l’économie américaine. Encouragés par des signes de stabilisation de la propagation du Covid-19 laissant entrevoir un retour prochain à une situation plus normale, Wall Street avait terminé en nette hausse la veille (+2,4% pour le Dow, +3,95% pour le Nasdaq, tiré par Amazon). À 18h mercredi (11h heure de New York), le Dow relâche abandonne ses gains de la veille (-2,6%), le S&P (-2,8%) et le Nasdaq (-2%) reculent aussi.

Le pétrole rechute

La réalité rattrape également le marché pétrolier, alors que l’effondrement de la demande semble toujours largement excéder les engagements des producteurs à réduire la production. Dans l’après-midi, les investisseurs ont pris connaissance d’une hausse hebdomadaire record des stocks commerciaux de pétrole américains (+19,2 millions à 503 millions de barils), ce qui a provoqué de nouvelles secousses sur les cours de l’or noir. À 18h, le baril de Brent européen, la référence mondiale, rechute de 6,86% à 27,57 dollars. La demande mondiale de pétrole devrait chuter d’un niveau record de 9,3 millions de barils par jour cette année, a indiqué l’Agence internationale de l’énergie dans son rapport mensuel, avec un effondrement de 29 millions de barils par jour sur le mois d’avril, du jamais vu. Le cours des contrats à terme sur le brut américain WTI limite son repli à 2,83%, ce qui suffit à refaire passer le prix sous le seuil des 20 dollars le baril, à 19,56 dollars, un plancher depuis 2002.

Les valeurs les plus exposées à la crise rechutent

La cote des valeurs parisienne en cette mi-journée reflète une prime de risque croissante sur les titres exposés à l’économie. Plus forte baisse de l’indice phare, Publicis lâche 9,6%, suivi de Sodexo (-9,4%) et Unibail (-8,9%). Les compartiments aéronautique (-8,7% pour Airbus, -7,2% pour Safran), bancaire (-8,2% pour Société Générale, -8,1% pour Crédit Agricole, -7,2% pour BNP Paribas) et automobile (-8% pour Renault, -7% pour Peugeot) ont également souffert.

Le secteur pétrolier n’a pas été épargné par la rechute des cours de l’or noir et Total abandonne 6% à la clôture. En dehors de l’indice phare, Vallourec (-10,4%), TechnipFMC (-11,4%) ou Schlumberger (-8,2%) sont d’ailleurs encore plus touchés.

Parmi les petites valeurs qui s’étaient enflammées au cours des dernières séances, le retour de bâton est souvent douloureux pour les derniers entrés, à l’image d’un repli de 43% sur Biophytis, et de 13% sur Novacyt entre autres.

Du côté des devises, l’euro subit également le renversement de l’humeur des investisseurs, perdant 0,72% face au billet vert à 1,0909 dollar peu après 18h10.