Grève : faute de trêve, le risque d’enlisement

Déjà 19 jours de grève dans les transports et pas de porte de sortie à l’horizon. Malgré les concessions lâchées par le gouvernement et l’essoufflement de la mobilisation, le trafic reste perturbé à la fois à la SNCF et à la RATP. Cette situation instable pour les entreprises et les usagers devrait se prolonger pendant les fêtes de fin d’année avec le risque de débordements sporadiques comme à la gare de Lyon à Paris, ce matin.

Des centaines de grévistes de la SNCF et de la RATP ont organisé une manifestation « surprise » à la gare de Lyon à Paris, envahissant les quais de métro de la ligne 1. Le trafic sur cette ligne a dû être interrompu jusque vers 12h30. Sur Tweeter, la ministre de la transition écologique, Elisabeth Borne, a immédiatement réagi : « Le libre exercice du droit de grève n’est pas un droit à envahir, à bloquer, à intimider les voyageurs a-t-elle fustigé. Le quotidien de ceux qui ont besoin se déplacer est déjà suffisamment difficile pour ne pas leur faire subir de telles actions inadmissibles. »

Pas de quoi intimider Laurent Brun. Le secrétaire général de la CGT-Cheminots qui réclame un retrait pur et simple de la réforme sur les retraites, a prévu « tout un ensemble d’initiatives pour fêter Noël entre grévistes » lundi et mardi. Au programme : concert à Austerlitz, repas en gare ou rassemblement devant des mairies ou permanences LREM. La CGT-Cheminots, la CFDT-Cheminots et SUD-Rail prévoient également des “actions” le 28 décembre.

Jusqu’à présent, il n’y a pas eu de gros débordements ni à la SNCF, ni à la RATP. Mais, « à ce stade du conflit, on entre dans une période de tensions, » observe-t-on dans l’entreprise ferroviaire où l’on compte sur une reprise individuelle du travail par les cheminots après les propositions mises sur la table par le gouvernement pour limiter les effets de la réforme sur les régimes spéciaux, en excluant notamment les cheminots nés après 1980 et 1985.

Une base très remontée

Reste que, le 20 décembre, la CFDT-Cheminots n’a pas voulu suspendre son mot d’ordre de grève à la SNCF, malgré la volonté du patron national, Laurent Berger, favorable à une trêve de Noël. Pour les cheminots grévistes les mesures proposées par l’exécutif n’empêchent pas une élévation progressive de l’âge de départ à la retraite et suscitent encore des interrogations sur les niveaux de pension.

Même position à l’Unsa, deuxième syndicat à la SNCF et premier à la RATP où l’appel à la « pause pour les fêtes de fin d’année » au niveau national n’a pas été suivi sur le terrain. A la SNCF, sept sections locales de l’Unsa-Ferroviaire, dont celle de Paris-Sud-Est ou de Bretagne, restent mobilisées.

Idem au sein de la section Unsa Traction de la RATP, les conducteurs du métro et du RER, ouvertement opposés à leur conseil national. « On avait prévenu l’exécutif que ce serait difficile de sortir du conflit, une fois lancé, rappelle un représentant de l’Unsa de la régie de métro parisienne. Une trêve c’est quasiment impossible à obtenir. Surtout au niveau des Assemblées générales, où la CGT et Sud sont très présents pour mobiliser la base ».

Pas facile de sortir de cette impasse. La prochaine journée de mobilisation interprofessionnelle a été fixée au 9 janvier. D’ici là, le gouvernement compte sur un essoufflement du conflit.

Dans une interview au Journal du Dimanche (JDD) dimanche 22 décembre, le nouveau secrétaire d’Etat aux retraites, Laurent Pietraszewski, réitère les appels à la trêve : « les propositions qui ont été mises sur la table à la RATP et à la SNCF (…) doivent permettre de reprendre le travail », exhorte-t-il.

En attendant, le soutien des Français à la grève s’effrite légèrement. Selon un sondage IFOP pour le JDD le 22 décembre, 31 % des Français soutiennent le mouvement de protestation et 20 % ont de la sympathie pour lui, soit 3 points de moins par rapport à une précédente enquête menée par le même institut une semaine plus tôt. A l’inverse, ils sont 34% à se dire désormais opposés (19 %) ou hostiles (15 %) au mouvement de grève, soit 4 points de plus par rapport à la semaine dernière. 15 % se disent indifférents.

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