Homologation WLTP, les constructeurs auto redoutent un impact financier majeur

Homologation WLTP, les constructeurs auto redoutent un impact financier majeur

Les constructeurs automobiles s’inquiètent de la nouvelle procédure d’homologation, dénommée WLTP. La mesure qui doit entrer en vigueur le 6 septembre prochain devrait engendrer – selon eux –  de la complexité et des coûts supplémentaires.  Mais, au delà de ces difficultés liées à l’organisation elle-même du processus mis en oeuvre,  l’une des conséquences négatives de la nouvelle réglementation est avant tout de voir augmenter la valeur des taux de CO2 ou de gaz polluants issus des résultats.  Et donc d’accroître de manière exponentielle le nombre de dépassements soumis à malus ou amendes. De quoi faire monter au créneau  les constructeurs, ces derniers redoutant qu’une telle législation n’ait au final des incidences négatives sur leur production et leur marge. Le nerf de la guerre …

Coûts en hausse, délais rallongés

Une nouvelle réglementation européenne en matière d’homologation de tous véhicules neufs, doit entrer en vigueur en septembre 2018.
Laquelle impose – aux dires des constructeurs – une procédure plus complexe, plus longue et plus contraignante. Ainsi, les nouveaux tests devront également permettre de chiffrer les émissions liées aux équipements de la voiture. « Une vraie usine à gaz ! » selon certains.

Tant et si « bien » que certains des adhérents de la Chambre syndicale internationale de l’automobile et du motocycle (CSIAM) ont d’ores et déjà tiré la sonnette d’alarme « sur les surcoûts, très significatifs », selon Thierry Archambault, président délégué de la CSIAM. Ainsi,  le constructeur automobile allemand BMW a prévenu que l’opération devrait représenter pour lui un coût de 150 millions d’euros.

Plusieurs industriels s’inquiètent également des risques d’engorgement au niveau des organismes certificateurs. Selon Dieter Zetsche, patron de Daimler, la nécessité de ré-homologuer tous les véhicules, constitue un véritable défi, compte-tenu du goulet d’étranglement.

Une nouvelle réglementation européenne lourde de conséquences

Selon les termes de cette nouvelle réglementation, la consommation de carburant de toutes les voitures mises en ventes, ainsi que leurs émissions (et tout particulièrement CO2, NOx ) devront être mesurées selon la nouvelle réglementation dénommée WLTP. Laquelle s’avère plus proche de la réalité que l’ancien cycle NEDC. Mais c’est là où le bât blesse … car qui dit chiffres plus fiables …. dit dépassements plus nombreux … et donc envolée du nombre d’amendes ou de malus… Les experts s’attendent à un différentiel d’environ 20 %, notamment sur la consommation ou les émissions de CO2.

Or, si le niveau des émissions de CO2  sert de base au calcul du malus auto et permet d’apprécier l’atteinte des objectifs de l’UE à l’horizon 2021 …. les grilles actuelles ont été établies selon le référentiel NEDC. A l’heure actuelle, un certain flou artistique règne autour de leurs adaptations aux nouvelles règles.

L’ACEA (European Automobile Manufacturers’Association), organisme qui représente les constructeurs à Bruxelles s’attend à ce que la transition rende l’objectif européen plus contraignant de 5 % .

Tentant de trouver une solution face à ce nouveau problème, les constructeurs se vient contraints de s’adapter d’urgence sous peine de voir les taux émis par leurs véhicules s’envoler vers des sommets inacceptables. Une nécessaire adaptation  qui « va augmenter le coût de développement des moteurs » selon Thierry Bolloré, directeur général opérationnel de Renault. Et la pression sur les ingénieurs …

Avertissement de Carlos Ghosn en février dernier

En février dernier, déjà, le patron de Renault, Carlos Ghosn avait lancé un avertissement à ce sujet lors de la publication des  résultats du groupe. « Il y a beaucoup d’incertitudes, nous ne savons pas à quel rythme les autorisations seront données, ni si les consommateurs seront prêts à payer. » avait-t-il ainsi déclaré. Laissant ainsi entendre que les résultats 2018 pourraient être impactés par de telles mesures.

Porte ouverte à un cheval de Troie chinois selon  le patron de PSA

Selon Carlos Tavares, le président du groupe PSA, les amendes qui seront infligées par l’Union européenne aux constructeurs qui n’atteindront pas leurs objectifs de réduction des émissions de CO2 pourraient affaiblir financièrement un grand constructeur européen, pouvant même conduire à le mettre « sur les genoux ». Une fragilité qui pourrait être exploitée par un acquéreur chinois. Celui-ci pourrait profiter de l’aubaine – la valeur boursière dudit constructeur devenant alors alléchante – pour pouvoir s’introduire au sein d’un groupe automobile européen avec sa propre technologie de véhicules électriques.

« L’impact est tout à fait évident. Cela va créer un cheval de Troie chinois en Europe », a averti Carlos Tavares. Rappelons à cet égard que PSA est lui-même détenu à 12,2% par le chinois Dongfeng Motor.

Des propos énoncés tant comme patron de PSA que comme président de l’ACEA, groupe de pression de l’industrie automobile européenne, lors d’un événement organisé par le magazine automobile français Le Journal de l’Auto. 

Carlos Tavares ne mâche pas ses mots, pointant du doigt les décideurs politiques, leur reprochant de ne pas avoir anticipé l’impact négatif qui pourrait être induit par les objectifs de l’UE en matière de CO2 à l’horizon 2020. De là à leur imputer une responsabilité si une telle situation se produisait d’ici quelques mois …. il n’y a qu’un pas. Reste effectivement que le patron de PSA a raison de s’alarmer, la pratique du « Cheval de Troie » étant très usitée quoi qu’on en dise …. avec pour net avantage d’être plus discrète … et donc plus insidieuse. A noter également, que le vaillant chevalier chinois pourrait même être vu comme un sauveur dans le cas d’une éventuelle reprise ou association financière avec un constructeur en difficultés.

Sources : Les Echos, ACEA, Journal de l’Auto, Automobilwoche

Elisabeth Studer, le 8 avril 2018, www.leblogfinance.com

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