Italie : Fitch s’inquiète de l’issue du référendum constitutionnel du 6 décembre

Après Grèce, Espagne, Portugal, c’est désormais l’Italie qui est dans le viseur des agences de notation. Fitch a ainsi abaissé vendredi de stable à négative la perspective de la note de la dette publique italienne, arguant de l’issue « très serrée » du référendum constitutionnel. L’agence de notation indique ainsi que la note qui demeure certes à l’heure actuelle à « BBB+ », pourrait être dégradée dans les prochains mois. Et ce, pour des raisons politiques, certes, mais qui pourraient rapidement et aisément se transformer en difficultés économiques.

« L’incertitude politique et les risques à la baisse se sont accrus », affirme Fitch, qui estime qu’un échec du référendum sur une réforme constitutionnelle visant davantage de stabilité gouvernementale en Italie représenterait « un choc politique« .

L’agence juge également que les révisions en hausse des prévisions de déficit budgétaire « réduisent la crédibilité des mesures de consolidation budgétaire ».

Si en avril dernier, lorsque l’agence avait rendu public sa dernière évaluation de la dette de l’Italie, le oui semblait l’emporter dans les sondages, ces derniers laissent désormais entrevoir que l’issue du référendum du 4 décembre prochain est loin d’être gagnée d’avance. Rappelons que les électeurs seront alors invités à dire s’ils approuvent la modification de la Constitution italienne de transformer le Sénat de la République dans un « Sénat des Régions ».

Cette réforme constitutionnelle prévoit de mettre fin au bicaméralisme parfait qui prévaut actuellement. Elle vise à réduire les pouvoirs du Sénat, qui ne pourra plus renverser le gouvernement (via la fin du vote de confiance), et à réduire le nombre de sénateurs (100 élus contre 315 aujourd’hui) qui seront élus non plus au suffrage direct mais par les conseils régionaux, désormais comptables de leurs propres dépenses. Autre mesure permettant à l‘État d‘économiser quelque 500 millions d’euros : les sénateurs ne devraient plus être rémunérés.

Le projet de loi constitutionnelle, proposé par  le chef du gouvernement italien et la coalition de centre-gauche Parti démocrate en 2014, a été approuvé par la majorité absolue des députés et des sénateurs, manquant de peu la majorité requise des deux tiers pour que le projet de loi soit adopté ; par conséquent, en vertu de l’article 138 de la Constitution, un référendum doit être organisé pour que cette réforme devienne une loi. Ce sera le troisième référendum constitutionnel en Italie en 15 ans, les deux derniers datant de 2001 et 2006.

Si les électeurs disent oui à ce projet de loi, ce serait la plus importante réforme constitutionnelle entreprise en Italie depuis la monarchie. Le cas échéant, cette réforme devrait impacter l’organisation du Parlement, mais également améliorer – selon ses partisans – la stabilité du gouvernement italien. A contrario, les partis d’opposition critiquent de façon très virulente ce projet de loi, affirmant qu’il est mal écrit et qu’il rendra le gouvernement beaucoup trop puissant.

L’idée principale est de transformer le Sénat, qui aujourd’hui a les mêmes pouvoirs que l’Assemblée nationale italienne, en une chambre de notables désignés et non plus élus et non rémunérés. Bref, selon certains « en faire un club et plus une assemblée digne de ce nom. »

La réforme vise ainsi à simplifier le processus législatif et à apporter davantage de stabilité politique … dans un pays qui a connu 60 gouvernements depuis 1946, en limitant fortement les pouvoirs du Sénat et en entérinant une réforme électorale offrant une majorité stable au parti arrivé en tête.

Mais au final, donc, Matteo Renzi a commis l’erreur de lier son sort politique au résultat. Ce référendum s’est donc transformé en plébiscite pour ou contre lui. Le danger est si pressant que Matteo Renzi refuse de dire si oui ou non il démissionnera si le NON l’emportait. Il a même profité de sa présence à Washington et de sa visite à Barack Obama pour expliquer que si le non l’emportait, « ce ne serait pas une catastrophe pour l’Italie ».

Certains analystes n’hésitent pas à dire que le président du Conseil des ministres, Matteo Renzi, se retrouve exactement dans la position de David Cameron, l’ex Premier ministre britannique, avant la bataille du Brexit.

Les adversaires de Matteo Renzi – qui vont de l’opposition de droite au puissant Mouvement 5 étoiles en passant par une minorité de frondeurs au sein de son Parti démocrate – comptent sur un échec du référendum pour provoquer sa chute ou, du moins, affaiblir fortement sa position.

Silvio Berlusconi, chef de Forza Italia, qui avait négocié la réforme avec l’actuel chef du gouvernement s’est prononcé mardi soir à la télévision italienne contre un projet risquant selon lui « de confier l’Italie et les Italiens à un seul homme et à un seul parti. »

« Nous voterons Non afin de permettre l’approbation d’une autre réforme, tous ensemble, une vraie réforme, qui prévoie l’élection du président de la République au suffrage direct, une vraie coupe dans le Parlement, l’interdiction de changer de camp une fois élu ou encore un plafond de la pression fiscale », a expliqué Berlusconi.

Sources : AFP, Euronews, France Inter

Elisabeth Studer – 22 octobre 2016 – www.leblogfinance.com

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