L’Arabie saoudite autorise les femmes à conduire …. par souci d’économie ?

Dans sa grande bonté, le royaume d’Arabie saoudite vient d’autoriser les femmes à conduire dans le pays. Une petite révolution ! Selon un décret royal publié mardi soir par l’agence de presse officielle SPA, le roi Salmane a ainsi ordonné « de permettre d’accorder le permis de conduire aux femmes en Arabie saoudite ».

Rappelons que les femmes – y compris celles détentrices de permis de conduire dans d’autres pays de la planète – n’avaient jusque là pas le droit de goûter au plaisir automobile dans le royaume – ultra-conservateur – saoudien.

Mais, que les ligues féministes se détrompent en criant victoire …. il ne s’agit pas d’une largesse accordée à la gente féminine mais bien d’une mesure pour faire face à la crise qui frappe à la porte du pays, plombé par la baisse de ses revenus pétroliers engendrée par la chute du prix du baril.

Désolée, mesdames pour celles qui croyaient encore aux bisounours. Pas de telles bestioles dans l’un des plus grands pays producteurs de brut de la planète, la question religieuse ayant au final beaucoup moins d’incidences sur le sujet que la raison financière.

Le dernier pays au monde à adopter une telle mesure

Il était tout de même temps ! L’Arabie saoudite était le dernier pays au monde à interdire aux femmes de conduire. Mieux encore – en quelque sorte – le prince Khaled ben Salman, ambassadeur aux Etats-Unis, a tenu à préciser à la presse que les Saoudiennes n’auront pas besoin d’obtenir l’accord de leur tuteur légal pour passer leur permis et la présence de ce dernier ne sera pas nécessaire lorsqu’elles seront au volant. Certaines – mauvaises – langues pourront dire qu’une telle fleur a été faite pour éviter de se retrouver à la place du mort … Que nenni ! Cela permettra aussi de soulager l’emploi du temps dudit tuteur.

L’interdiction de conduire faite aux femmes était combattue de longue date par diverses associations féministes et comités de défense des droits de l’Homme (avec un grand H …). Des activistes ont milité en ce sens depuis près de vingt ans. En 1990, 2011 et 2013, des campagnes pour le droit des Saoudiennes à conduire avaient d’ores et déjà agité le royaume. L’avènement des réseaux sociaux aura permis de faire le reste. Même si celles qui auront tenu tête à l’interdiction ont été systématiquement arrêtées. Si certes, les autorités ne les ont pas poursuivies, elles ont été contraintes à signer des documents garantissant qu’elles ne renouvelleraient pas leur « exploit ».

Une manière de réduire les dépenses des ménages et des entreprises et un moyen d’insertion

Eh oui, le fait d’interdire aux femmes de se mouvoir de manière indépendante dans le royaume n’a pas que des avantages … car il augmente les frais de ces messieurs et des entreprises en les obligeant à s‘acquitter de factures de plus en plus nombreuses et importantes pour payer taxis, services de déplacements tels que Uber et chauffeurs particuliers. Comme quoi l’extrémisme radical a parfois des conséquences financières non négligeables.

Crise oblige, les femmes sont également amenées de plus en plus travailler. Or, qui dit emploi dit souvent nécessite de se déplacer. Et là aussi, le fait de leur autoriser à conduire permet de faciliter leur insertion …. et de réduire les charges des entreprises, lesquelles peuvent grimper très vite en la matière.

Fin 2016, le prince saoudien Al-Walid ben Talal avait même lancé un appel pour que les femmes obtiennent enfin le droit de conduire, mettant en avant le coût financier de cette restriction. Arguments alors invoqués : à cette date, chaque famille saoudienne aurait consacré l’équivalent de 950 euros par mois pour louer les services d’un chauffeur privé ou de taxis pour permettre aux femmes de se déplacer. Autoriser les femmes à conduire est désormais «une demande sociale urgente que la conjoncture économique justifie», avait-il souligné.

Une hausse de la demande des véhicules à prévoir ?

Si le sujet n’est certes pas abordé par la majorité des commentateurs et des journalistes traitant du dossier, on peut certes raisonnablement penser que de telles mesures devraient permettre de doper la demande automobile. Le marché devrait donc attirer les élans de nombreux constructeurs désireux de surfer sur la vague féministe qui vient d’aborder le royaume saoudien avec grands éclats.

Reste que la décision ne prendra effet qu’en juin 2018, cela laisse du temps pour passer commande. Et le permis …

Sources : AFP, SPA, NYT

Crédit Illustration : Saudi Women 2 Drive via Ruba Al-Yamani / Muslim Village

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