Le Nigéria bientôt importateur net de pétrole brut ?

Souci à se faire pour le Nigeria …. même si, certes, le pays pourrait diversifier son économie via le secteur automobile, il n’en demeure pas moins que sa manne pétrolière pourrait dangereusement s’épuiser.

Plus encore, des experts affirment même que le pays pourrait devenir un importateur net de pétrole brut dans un avenir proche. Le pourquoi du comment ? Une vague de destruction des installations pétrolières du pays et la politique menée par le gouvernement pour y faire face.

C’est en effet le constat qui se dégage de la table ronde organisée par la Chambre des représentants, le comité des organisations de la société civile et les partenaires au développement en vue d’échanger sur la pénurie d’essence qui prévaut depuis quelques jours dans certaines villes du Nigeria.

Selon Peter Akpatason, l’un des organisateurs, ce retour de la pénurie est dû à la nature même de la plupart des mesures adoptées il y a quelques mois pour résoudre la crise. Mesures sans effet durable qui  a conduit  – selon lui – à des violences dans certaines grandes agglomérations du pays. Les autorités avaient, à l’époque, attribué la cause de cette situation aux actes de vandalisme perpétrés à l’encontre des infrastructures pétrolières.

Emboîtant le pas aux experts, certains participants à la table ronde ont affirmé que les autorités minimisaient l’impact des attaques des militants armés du delta sur le niveau futur de la production, déplorant parallèlement le manque d’efficacité d’Abuja dans les négociations avec les NDA (Niger Delta Avengers).

Les responsables en charge du secteur, et tout particulièrement Ibe Kachikwu, le ministre du pétrole, estiment pour leur part avoir la maîtrise de la situation. Ils en veulent pour preuve la remontée de la production à 1,9 million de barils.

Néanmoins, le 17 mai dernier, s’exprimant devant les parlementaires du pays il avait indiqué : « les attaques dans le Delta du Niger ont fait chuté la production d’une moyenne de 2,2 millions de baril/jour nous en sommes aujourd’hui à 1.4 million de barils/jour ».  Conséquences immédiates des actes de sabotage perpétrés par des miliciens armés dans la région du Delta du Niger.

Au final, le Nigeria n’est plus à l’heure actuelle, le principal producteur de brut de l’Afrique. Une place qui revient désormais à l’Angola, lequel affiche selon diverses sources pas moins de 1,8 million de barils chaque jour.

Déjà confronté à la violence de Boko Haram, le Nigeria doit aussi faire face à une recrudescence des actes des milices armées du Delta du Niger et à leur vieille revendication portant sur un « partage équitable » des revenus du pétrole.

Les accords signés en 2009 et la loi d’amnistie entre le Mouvement d’émancipation des peuples du Delta du Niger (Mend) et le gouvernement d’alors (sous Goodluck Jonathan) laissait pourtant croire que le conflit était résolu.  Mais l’actuel président Muhamadu Buhari, qui a placé son mandat sous le signe de la bonne gouvernance, entre autres priorités, est largement revenu sur les concessions – essentiellement financières – faites par son prédécesseur à l’endroit du Mend.

Pour rappel, plus de 90% de la production de brut provient de la région du Delta du Niger, laquelle regroupe neuf Etats de la république fédérale du Nigeria, marquée paradoxalement par une grande pauvreté.  Un contexte propice à l’émergence au cours des années 2000 d’une insurrection armée sous la houlette du Mend, ce dernier réclamant plus d’équité dans la répartition de la richesse pétrolière. L’action des insurgés du Mend prenait  essentiellement la forme d’actes de sabotage de pipeline et au kidnapping du personnel des multinationales, en poste dans la région.

Il semble que la région soit en train de renouer avec une telle violence. Le gouvernement est en effet désormais confronté doit faire, avec l’avènement d’un nouveau groupe, nommé « The Niger Delta Avengers » , (NDA) qui ont revendiqué plusieurs attaques de pipelines, se félicitant même sur son site internet d’avoir à l’heure actuelle « bloqué 50% de la production de brut du pays ».

Principale victime des attaques du NDA, la compagnie US Chevron a dû se résoudre à fermer un site de production qui assurait 35.000 barils par jour, tandis que Shell a rapatrié une bonne partie de son personnel qui travaillait dans le Delta du Niger.

La recrudescence des attaques dans le Delta est également à rapprocher de la douzaine de mandats d’arrêts lancés contre d’anciens dirigeants du Mend au début de l’année 2016. Une situation qui brise une certaine accalmie observée depuis plus de cinq ans.  En effet, nombre d’observateurs voit la main des anciens du Mend (devenu un parti politique) derrière les actes revendiqués par le NDA.

Selon le ministre nigérian de l’Energie, Babatunde Fashola, les actes de sabotages constatés étaient en mai dernier à l’origine d’un manque à gagner de 2,4 millions de dollars par jour. Et ce, alors même que le Nigeria voit ses finances publiques largement impactées par la baisse des prix du baril de pétrole.

Sources : Agence Ecofin, Ouestafnews

Elisabeth Studer – 25 juillet 2016 – www.leblogfinance.com

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