Le ralentissement économique mondial contraint Goldman Sachs à des économies

Signe des temps – et de l’ampleur de la crise qui nous attend ? – le géant Goldman Sachs lui-même éprouve quelques difficultés actuellement … Son PDG Lloyd Blankfein a ainsi déclaré mardi que La banque américaine envisageait de faire des économies pour faire face au ralentissement économique mondial. Une manière aussi – soit dit en passant – de confirmer le mauvais état de santé de l’économie planétaire.

« Nous pouvons absolument faire un peu plus pour ce qui est des coûts », a ainsi déclaré Lloyd Blankfein lors d’une conférence sur le secteur bancaire à Miami. Ajoutant que la banque examinait « particulièrement et de façon attentive les possibles réductions continues de coûts » alors que « les revenus stagnent ». Enfonçant le clou d’une certaine manière, il a ajouté : «  la nécessité est la mère des inventions ».

Rappelons que malgré des suppressions d’emplois de traders et banquiers, Goldman Sachs a dû néanmoins recourir à de nouveaux effectifs en vue de se conformer aux nouvelles exigences réglementaires. Ceux-ci ont ainsi augmenté de 11% depuis 2012 à 36.800 salariés à fin décembre 2015, selon les chiffres indiquées mardi par l’établissement.

Mais selon des informations communiquées à la mi-janvier par une source proche du dossier, Goldman Sachs envisage de réduire au moins 5% ses effectifs totaux en 2016. Les courtiers en obligations, bons du Trésor, taux de devises et matières premières (Revenus fixes ou FICC) pourraient figurer au premier rang des coupes budgétaires. Toujours selon la même source, environ 10% des traders du Ficc pourraient être licenciés.

Comme beaucoup de compagnies internationales, pour pouvoir faire des économies, la banque recrute des jeunes certes talentueux mais surtout le plus souvent moins chers. Goldman Sachs développe également sa banque de détail et souhaite créer sa propre monnaie numérique.
A l’instar des autres grandes banques mondiales, Goldman Sachs s’est lancée dans une cure d’austérité en vue de préserver leur rentabilité face au ralentissement des économies émergentes et des difficultés rencontrées par les secteurs pétrolier et minier, secteurs auxquels elles ont prêté de l’argent. Une situation qui suscite la crainte des investisseurs de plus en plus enclins à liquider leurs titres financiers placés en Bourse. Ainsi, depuis janvier, l’action Goldman Sachs a perdu plus de 15% de sa valeur.

Depuis le début de l’année 2016, les analystes s’inquiètent plus largement d’un possible effet domino de la chute du prix du baril sur la santé des banques américaines. Principaux arguments avancés : la dégringolade du cours du pétrole pourrait déstabiliser le secteur bancaire américain, ce dernier ayant injecté des milliards de dollars pour financer le boom des pétrole et gaz de schisteaux Etats-Unis.

Elément inquiétant : depuis mi-janvier, les institutions financières américaines annoncent les unes après les autres un renforcement de leurs réserves en vue de couvrir les impayés des sociétés d’exploration et de production pétrolière et gazière. Ces dernières sont en effet prises dans une véritable tourmente, alors qu’en l’espace d’un an et demi, le prix du baril a chuté de 100 dollars à moins de 30 dollars.

JPMorgan Chase, la première banque américaine, a quant à elle mis de côté 124 millions de dollars en vue de se prémunir, tout en avertissant que ce montant pourrait être portée à 750 millions si le cours du brut demeurait aux alentours de 30 dollars durant une longue période.

De son côté, Citigroup a porté ses réserves dédiées à ce type de risques à 300 millions de dollars. Un montant qui pourrait s’accroître, la banque tablant au premier semestre sur des pertes de 600 millions de dollars liées aux crédits accordés dans le secteur de l’énergie.

Fin décembre 2015, l’exposition au secteur de l’énergie était de 21,3 milliards de dollars pour Bank of America (BofA), de 20 milliards pour Citigroup, de 17 milliards pour Wells Fargo, de 13 milliards pour JPMorgan, de 10 milliards pour Goldman Sachs et de 4 milliards pour Morgan Stanley.

BofA, la deuxième banque américaine en termes d’actif, a récemment précisé pour sa part que ses provisions pour pertes sur créances avaient augmenté de 264 millions de dollars au quatrième trimestre, en raison principalement de pertes et de hausse des provisions sur le secteur énergétique. Le directeur financier Paul Donofrio a alors confirmé le montant de l’exposition de la banque au secteur de l’énergie – de 21,3 milliards de dollars – ajoutant que cela représentait 2% de son encours total de prêts utilisés.

Histoire de détendre les tensions, la plupart des dirigeants des grandes banques sont montés au créneau. Affirmant que la part des prêts liés à l’énergie est minime comparé à la totalité des crédits accordés, soit 3% en moyenne.  Jamie Dimon, le PDG de JPMorgan, assure pour sa part que ces crédits sont souvent adossés à des actifs – plates-formes pétrolières, puits – que la banque pourrait vendre si nécessaire. Restera alors toutefois à trouver les acheteurs …

Selon la Fed (Réserve fédérale américaine) et les régulateurs bancaires américains FDIC et OCC, le montant des crédits qui ne pourraient être recouvrés s’élevait en 2015 à 34,2 milliards de dollars.
Pire encore : certains experts, reprenant à leur compte les sentiments des investisseurs, estiment même que les banques pourraient n’afficher que la partie émergée de l’iceberg, n’étant pas en mesures de placer en réserves les sommes nécessaires, voire même de quantifier précisément les risques.

En tout état de cause, un tel contexte a d’ores et déjà fortement porté préjudice au KBW, indice regroupant les valeurs bancaires à Wall Street. Ce dernier a en effet reculé d’environ 15% depuis janvier, enregistrant ainsi une de ses plus fortes baisses depuis février 2009, période la plus sombre de la crise financière.

Un effet boule de neige est d’ores et déjà redouté par certains analystes, lesquels s’alarment du fait que les salariés licenciés ne puissent à leur tour rembourser leurs crédits immobiliers, leurs crédits auto et leurs crédits à la consommation, dans un pays où tout ou presque s’achète à crédit.

Reste toutefois que le poids des prêts accordés aux entreprises du secteur de l’énergie est loin d’être comparable aux subprime, lesquels représentaient à l’époque au moins la moitié des prêts accordés par les banques. A noter également que des sommes importantes ont été prêtées à des majors pétrolières telles que ExxonMobil, Chevronet d’autres sociétés solvables, l’argent du subprime ayant quant à lui accordé à des particuliers aux revenus faibles. Les bilans des banques seraient également plus sains qu’en 2008, les régulateurs les ayant contraintes de renforcer leurs fonds propres.

Sources : AFP, Reuters