Le secteur bancaire grand gagnant de la victoire de Trump, Goldman Sachs en 1ère ligne

Ironie de l’histoire, alors que le secteur bancaire avait largement contribué à la victoire du démocrate Barack Obama en 2008, la victoire du républicain Donald Trump en 2016, devrait grandement lui bénéficier. Que s’est-il passé entre-temps ? La promulgation de la loi Dodd-Frank, le texte qui encadre depuis 2010 le secteur bancaire aux Etats-Unis, au grand détriment d’établissements financiers tels que Goldman Sachs.

Les valeurs des banques américaines ont enregistré un spectaculaire rebond à Wall Street après l’élection de Donald Trump à la Maison blanche. Selon certains analystes, ce nouvel engouement des marchés pour le secteur bancaire ne serait-ce même qu’à ses prémices, tant les promesses du candidat Trump pourraient nettement favoriser les banques. Les investisseurs considèrent en effet que leur position leur permettra de bénéficier en plein de la remontée – de plus en prévisible – des taux d’intérêt la  Réserve fédérale américaine (Fed) et d’un allègement de la réglementation promise par Donald Trump.

Si le candidat désormais Président élu tient ses promesses – qui ont fait l’objet de discours enflammés ces dernières semaines – il s’agirait d’une véritable bouffée pour les établissements bancaires, fortement pénalisés ces dernières années par le maintien de taux bas et des réglementations plus strictes, limitant ainsi leur possibilité de faire fructifier leurs réserves de cash.

Or, depuis quelques jours, les taux voient leur niveau remonter, les investisseurs pariant sur le fait que Donald Trump maintienne sa promesse de réduire la portée de la loi Dodd-Frank.

Ainsi, rien que durant les trois jours qui ont suivi la victoire du candidat républicain, l’indice S&P-500 du secteur bancaire a bondi de 10,2%, enregistrant sa meilleure performance en trois séances depuis août 2009. Entre mercredi et vendredi, Wells Fargo Co a bondi de 13,6%, JPMorgan Chase & Co de 9,5% Bank of America de 11,9%. Le titre de Goldman Sachs n’était pas en reste, progressant de 12,38 % en 5 séances et de 5,89 % rien que pour la journée de jeudi.

Leur valorisation a ainsi retrouvé un niveau comparable à celui des années 2002-2008, avant le durcissement du cadre législatif, observent les spécialistes. Si la valeur des actions des banques américaines correspond globalement à 11,2 fois la valeur de leurs résultats estimés, ils rappellent qu’en février dernier leur valorisation était tombée à un multiple de 9, le plus faible chiffre depuis mai 2013, mais qu’en mai 2009, le ratio avait observé un pic de 33.

Certes, désormais, leur marge de progression demeure importante …. mais l’atteinte de ce niveau record s’avère réalisable.

Le site internet de l’équipe de transition de Donald Trump (www.greatagain.gov) a d’ores et déjà mis en ligne des propositions visant à démanteler la loi Dodd-Frank. A l’heure actuelle, les banques ayant plus de 50 milliards de dollars (46 milliards d’euros) d’actifs entrent dans la catégorie des institutions financières dites d’importance systémique (« too big to fail »), soumises à une réglementation draconienne. Si le nouveau Président élu obtient le rehaussement de ce seuil à 250 milliards de dollars, nombre d’établissements bénéficieraient alors d’une flexibilité accrue leur permettant de faire remonter leur valorisation boursière.

Certes, lorsque Barack Obama s’est lancé dans la course à la présidence en 2008, aucune grande société américaine n’a davantage contribué au financement de sa campagne que Goldman Sachs. Mais en 2012, le vent a tourné.

Ulcérés par ce qu’ils considèrent comme des attaques contre leur activité et leur réputation, cadres et employés de Goldman Sachs ont dès lors en majorité abandonné Barack Obama et ont constitué les principaux soutiens financiers du candidat républicain Mitt Romney et du parti conservateur. Si les employés de Goldman Sachs avaient donné plus de 1 million de dollars à Obama en 2008, en 2012, ils n’ont versé que 136 000 dollars pour la campagne du président. Mettant fin à la période de 23 ans durant laquelle la sulfureuse banque d’affaires était le premier bailleur de fonds des démocrates.

Les cadres supérieurs de Goldman Sachs avaient alors expliqué leur désengagement par le fait que la banque n’ait pas été consultée lors de la mise au point de nouvelles réglementations souhaitées par le gouvernement Obama en vue de répondre à la crise financière. Bien au contraire, ils avaient été pris de court par la mesure surnommée la “règle Volcker”, portant atteinte à l’une des activités les plus lucratives de Goldman Sachs.

Les cadres de la banque, notamment ceux qui avaient réuni des millions de dollars pour l’élection de M. Obama en 2008, soulignaient également qu’ils s’étaient sentis offensés par la rhétorique populiste du président, et notamment par sa célèbre saillie à propos des “Fat Cats de Wall Street” [les gros bonnets de la finance].

Or, selon les termes mêmes du WSJ, en octobre 2012, « le changement d’allégeance de Goldman Sachs reflète un retournement de plus grande ampleur du secteur de la finance, qui constituait autrefois une source majeure de financements pour le parti démocrate ». La messe semblait dès lors être dite ….

Les cadres de Goldman se sont plaints également de ne pas être entendus par Washington, notamment au sujet de la loi Dodd-Frank, soutenue par Obama et les élus démocrates du Congrès. Les nouvelles règles – exigences concernant les réserves de liquidités des banques, restrictions sur l’utilisation des produits dérivés et limitations de la prise de risque – auront au final restreint les bénéfices des établissements financiers.

La “règle Volcker”, conçue pour limiter la prise de risque, et empêcher notamment les “négociations pour compte propre”, c’est-à-dire le fait pour les banques de négocier pour leur propre compte plutôt que pour celui de leurs clients aura également conduit Goldman Sachs à mettre fin à ses activités pour compte propre, avant même que la loi ne soit rentrée en vigueur. Or,ces activités généraient environ 200 millions de dollars de chiffre d’affaires par trimestre et pouvaient représenter, certaines années, jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires.

La règle ne ciblait pas Goldman Sachs, mais elle aura au final davantage touché la société que d’autres firmes de Wall Street, car Goldman Sachs ne propose pas de services de détail, comme des cartes de crédit ou des crédits immobiliers hypothécaires, qui permettraient de compenser le manque à gagner.

Au final, si les employés de JPMorgan Chase, Citigroup, Bank of America, Morgan Stanley et Goldman Sachs ont versé 3,5 millions de dollars à M. Obama en 2008. Pour la campagne de 2012, ils ne lui auront donné « que » 650 000 dollars, contre 3,3 millions de dollars pour M. Romney.

Quant à 2016, les promesses alléchantes de Donald Trump pour le secteur / en auront certainement appâté plus d’un … tel que Lloyd Blankfein, le patron de banque.

Avant même sa victoire, Donald Trump a réuni autour de lui une équipe de lobbyistes réputés liés à Disney, Koch industries et … Goldman Sachs en vue de préparer son arrivée à la Maison blanche. Selon The Intercept, des réunions ont été organisées avec des représentants de plusieurs secteurs économiques, dont ceux de la finance et de la technologie.

Si certes, le candidat républicain a largement axé sa campagne électorale sur un discours de rejet des élites de Washington et de Wall Street, il se prépare néanmoins à nommer une équipe qui accordera une large place aux intérêts économiques et financiers …

Steven Mnuchin, ancien de Goldman Sachs, patron de la firme d’investissement Dune Capital Management et principal conseiller économique de Trump … est ainsi favori pour la position de secrétaire au Trésor.

Sources : Reuters, WSJ, presse US

Elisabeth Studer – le 13 novembre 2016 – www.leblogfinance.com

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