Le France est confrontée à une crise de logement sans précédent, avec une construction neuve en arrêt, des défis majeurs pour accéder à la propriété, et une difficulté croissante à trouver des logements à louer. Les chiffres sont alarmants : 2,6 millions de ménages sont en attente de logements sociaux, tandis que 4,2 millions de personnes sont mal logées en France.
Pour répondre à cette situation critique, le gouvernement a présenté ce vendredi un projet de loi ambitieux visant à apporter des solutions innovantes. Ce texte, soumis par Guillaume Kasbarian, le ministre délégué au Logement, introduit des réformes majeures dans le secteur immobilier, bouleversant ainsi le système actuel.
L’une des mesures phares de ce projet de loi concerne l’intégration des logements intermédiaires dans le calcul des quotas de logements sociaux imposés par la loi SRU. Actuellement, cette loi oblige environ 2 100 communes à atteindre un quota de 20 à 25% de logements sociaux. Avec la réforme proposée, les logements locatifs intermédiaires seraient pris en compte, permettant aux communes en retard dans leur production de logements sociaux de combler ce déficit en construisant ce type de logements.
Cette proposition suscite des inquiétudes chez certains maires de gauche, qui craignent que cela ne dilue l’effort de construction de logements sociaux véritables au profit de logements intermédiaires, réduisant ainsi l’offre accessible aux ménages les plus modestes.
Une autre mesure controversée concerne le durcissement des règles pour rester dans un logement social (HLM), visant à mettre fin au “logement social à vie” pour certains ménages afin de favoriser la mobilité au sein du parc social. Concrètement, les bailleurs sociaux devront examiner plus régulièrement la situation personnelle et financière de leurs locataires. Selon Guillaume Kasbarian, plus de 8% des locataires de HLM ne seraient plus éligibles à un logement social s’ils en faisaient la demande aujourd’hui.
Une des mesures proposées est la possibilité d’expulser du logement les locataires dépassant de 120% les plafonds de ressources pendant 18 mois, après un premier dépassement. Actuellement, le dépassement autorisé est de 150% pendant deux années consécutives. Des exceptions sont prévues pour les personnes âgées de plus de 65 ans ou en situation de handicap.
De plus, le projet de loi envisage d’imposer un supplément de loyer aux locataires HLM dont les revenus dépassent légèrement les plafonds de ressources permettant d’obtenir un logement social. Cette mesure concernerait environ 200 000 ménages, contre 80 000 actuellement, selon l’Union sociale pour l’habitat (USH), qui fédère les organismes HLM.
Le texte ne précise pas encore comment ce supplément de loyer serait calculé, mais l’USH craint une complexité administrative, notamment pour les locataires dépassant légèrement ces plafonds.
Dans le but de faciliter l’accession à la propriété, le projet de loi comprend des mesures de simplification administrative, notamment en accélérant les procédures de recours. Il prévoit également que les locataires de logements intermédiaires puissent les acheter au bout de 5 ans, au lieu de 18 ans actuellement, favorisant ainsi l’accession à la propriété pour les ménages aux revenus modestes ou intermédiaires.
Le projet de loi entend également donner plus de pouvoir aux maires dans la gestion du parc immobilier sur leur territoire, leur permettant notamment de présider systématiquement la commission d’attribution pour les logements neufs et de définir les zones de densification douce des zones pavillonnaires sur leurs communes.
Cependant, aucune mesure d’aide financière aux maires bâtisseurs n’est incluse dans ce texte, ce qui pourrait limiter la portée de ces nouvelles prérogatives faute de moyens suffisants.
Cette réforme suscite des réactions vives, certains craignant qu’elle ne menace le logement social accessible aux ménages les plus modestes, tandis que d’autres y voient une opportunité de diversifier l’offre et de répondre aux besoins variés des Français en matière de logement. Le débat promet d’être animé lors de l’examen du projet de loi au Sénat, prévu pour la mi-juin.