Mohamed Merah : comment a-t-il financé ses armes ?

alqaiida-qaeda-terrorism-fiannce.jpgRevenons quelques instants sur l‘aspect financier de l’affaire dite de Toulouse et de Mohamed Merah.

Certes si le sujet pourrait surprendre, voire même pourrait être considéré comme déplacé compte-tenu de la souffrance des familles endeuillées et de l’impact de l’évènement sur les consciences, il n’en demeure pas moins que c’est un élément fondamental du dossier.

Car si on nous affirme à corps et à cris que « l’individu » a agi seul, on voit mal comment il a pu se constituer un véritable arsenal de guerre à son domicile.

Alors que le frère de Mohamed Merah et sa compagne sont en route pour le siège de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) dans la banlieue de Paris, prouvant ainsi que les policiers toulousains peuvent être prompts à faire appel aux spécialistes de l’anti-terrorisme en fonction des circonstances, se pose en effet l’épineux problème du fianncement de ses armes.

La réponse pourrait permettre de déterminer quel est le niveau du soutien que Al Qaïda aurait pu lui « offrir » …. tout en donnant des éléments sur l’existence d’une forte mouvance islamiste radicale à Toulouse. Pensée qui effleure voire qui effraie toutes les pensées ce matin à Toulouse et ailleurs.

Le fait que Mohammed Merah habitait la « Côte Pavée« , l’un des quartiers les plus bourgeois et feutrés de la vile n’arrangeant rien à l’affaire.

A noter que les policiers pourront interroger Abdelkader Merah et son épouse jusqu’à dimanche matin, lorsqu’expirera la durée maximale de la garde à vue, laquelle est de 96 heures.

Ils devraient ensuite être déférés devant un juge qui décidera s’il y a suffisamment d’éléments pour les mettre en examen.

Rappelons que les gardes à vue des trois proches de Mohammed Merah, l’auteur des tueries qui a ensanglanté Montauban et Toulouse ont été prolongées jeudi, en vue de déterminer s’il a bénéficié de complicités.

Certes, le patron de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), Bernard Squarcini, a affirmé dans « Le Monde » ne pas croire à l’existence d’un réseau. Mais il ne convainc pas tout le monde …

Si à l’heure actuelle, la justice a la conviction que le jeune homme a participé seul aux tueries, l’enquête devra déterminer s’il a agi pour le compte d’une organisation et s’il a bénéficié d’un soutien logistique.


« Le parcours de Mohamed Merah, était le fruit d’une dérive solitaire
 » affirment aujourd’hui formellement la justice et la police françaises. Son « profil d’autoradicalisation salafiste atypique » en faisait un individu indépendant de toute « organisation structurée connue« , déclarait ainsi François Molins, le procureur de Paris, lors d’une conférence de presse, à Toulouse, mercredi 21 mars.

Mais les enquêteurs se demandent néanmoins comment le jeune homme, supposé vivre de l’aide de l’Etat, a pu se constituer un arsenal, dont un pistolet mitrailleur Sten et un pistolet mitrailleur Uzi, puis louer une Renault Mégane et se procurer un second véhicule, une Clio.

Mais également financer les nombreux voyages à l’étranger qu’il a effectués ces dernières années.


Le Monde
précise notamment que le 22 novembre 2010, lors d’un séjour à Kandahar, dans le sud de l’Afghanistan, région à forte activité insurrectionnelle, Mohamed Merah avait attiré l’attention de la police afghane qui l’interpellait.

Un officier supérieur américain, en poste à Kandahar, a assuré au Monde, mercredi, que sur le passeport de l’intéressé figurait un certain nombre de tampons révélant ses derniers déplacements. Le plus ancien mentionnait sa présence en Israël, puis en Syrie, en Irak et en Jordanie. Avant d’être arrêté, il se serait rendu au consulat d’Inde à Kandahar en vue d’obtenir un visa pour pouvoir rentrer sur territoire indien.

Le même officier  américain évoque par ailleurs des éléments issus de son audition à Kandahar, permettant d’affirmer que Mohamed Merah « aurait pu ou tenté » de se rendre dans les territoires palestiniens. Des repérages pour commettre d’éventuelles attaques n’ont pas été non plus exclus, toujours selon Le Monde.

Son voyage en Irak aurait été facilité par son frère Abdelkader connu des services de police français pour avoir participé à l’organisation d’une filière islamiste basée dans la région toulousaine et à destination de ce pays.

Ce frère et sa sœur, considérés comme les « religieux de la famille Merah« , selon un policier de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), auraient séjourné au Caire (Egypte) dans des milieux proches de réseaux salafistes régionaux, ce qui aurait permis de mettre  en place cette filière.

Sous la houlette d’un chef religieux autoproclamé, surnomme l’émir blanc, Olivier Corel,  ce Français d’origine syrienne naturalisé en 1983 vivant au cœur de l’Ariège dans le petit village d’Artigat, des jeunes partaient en Syrie avant de tenter le passage en Irak.

Une source militaire française en Afghanistan affirme quant à elle la présence en Iran « à deux reprises »  de Mohamed Merah. Information démentie par la DCRI, chargée du contre-espionnage et de la lutte antiterroriste, dans  Le Monde, mercredi.

Précisons également que les services de police français ont également mis en évidence, au moins à partir de 2008, des liens forts  entre les frères Merah et le groupe d’apprentis-djihadistes issu de l’Ariège (village d’Artigat)  et de la ville de Toulouse.

Rappelons que les membres de ce groupe  ont été interpellés, le 15 février 2007, puis condamnés, pour la plupart, en juin 2009, pour « association de malfaiteurs  en relation avec une entreprise terroriste ». 

Ainsi, en février 2007, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’Intérieur , « se félicitait » « de l’arrestation de neuf personnes soupçonnées d’être en liaison avec l’organisation terroriste Al Qaïda », lors d’un coup de filet à Toulouse et en région parisienne .

Dans les premiers jours suivant le « coup de filet », le ministère indiquait que « ces individus originaires du Sud-Ouest de la France » étaient « mis en cause dans l’organisation d’une filière d’acheminement de djihadistes vers l’Irak « .

Le ministre de la Défense avait alors adressé ses fèlicitations à tous les services qui ont permis l’arrestation des des 11 personnes sur le territoire national dont neuf en Midi-Pyrénées

 Six d’entre elles avaient été arrêtées dans la banlieue toulousaine (quartiers du Mirail et de la Reynerie), trois en banlieue parisienne (Seine-et-Marne) et deux dans le département de l’Ariège (à  Artigat). Le coup de filet avait débuté à  l’aéroport d’Orly par l’interpellation de deux hommes âgés de 23 et 27 ans, expulsés de Syrie, où ils avaient été arrêtés en décembre en se rendant en Irak, avait précisé l’Intérieur.

Si la Dépêche du midi (propriété de Jean-Michel Baylet … PRG) avait pu titrer « Al-Quaïda recrute à Toulouse« , précisant que la «filière toulousaine» avait été démantelée suite à  l’arrestation de différentes personnes dans la Ville Rose mais également en Ariège, il semblait depuis plus politiquement correct de parler d’islamistes … la Ville Rose n’ayant pas refermé toutes ses plaies suite à la catastrophe AZF et les morts n’ayant pas encore livrés tous leurs secrets.

Elément pour le moins troublant, la fameuse « note blanche » des RG mise en cause par Maître Casero en première instance du procès AZF et qui avait circulé  dans toutes les rédactions à  l’époque de la catastrophe en 2001 – mentionnait d’ores et déjà  la ville d’Artigat, petite bourgade de l’Ariège, et ce, en ces termes : « la mouvance afghane s’articule à  Toulouse autour de 2 groupes dont celui de la communauté islamite d’Artigat composé essentiellement de français convertis à  l’Islam. Cette communauté regroupe quelques militants islamistes qui vivent en autarcie en lisière de la petite commune ariégeoise d’Artigat, située en zone rurale au pied des Pyrénées et à  mi-distance entre Toulouse et la frontière franco-espagnole ».

Qu’à cela ne tienne, selon le procureur de Paris François Molins, Mohamed Merah aurait déclaré que ses nombreuses armes et ses munitions étaient financés via l’argent des cambriolages.

Des larcins qui pourraient permettre de blanchir Al Qaïda … mais un argumentaire qui pourrait tout de même sembler bien plus que léger à certains  …

A moins  que les  armes  ne viennent elles-mêmes des dits cambriolages et qu’une  filière toulousaine  de remilitarisation des armes démilitarisées –  volées aux  membres de clubs de tirs et  aux collectionneurs –  ne « sévisse » à Toulouse et dans sa région, précise un confrère journaliste proche du dossier.
L’existence d’une telle filière pour le moins « artisanale » n’ayant rien de rassurant …
 

Sources : AFP, France 3, Le Monde, Le Parisien, DDM, Charlie Hebdo, L’Express, Le Figaro

A lire également : 

Afghanistan : quid de l’armement des taliban ?


Le Blog Finance