Obsolescence programmée : le Parquet de Paris ouvre une seconde enquête

AppleLe 5 janvier 2018, le Parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire visant Apple pour « tromperie » et « obsolescence programmée ».

Cette enquête confiée au service national des enquêtes de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), fait suite à une plainte déposée par l’association Halte à l’obsolescence programmée (HOP), le 27 décembre 2017.

L’association estime qu’Apple réduit délibérément les performances et la durée de vie de ses Iphone par des mises à jour de son système d’exploitation, afin d’en accélérer le remplacement.

Cette enquête s’ajoute à celle ouverte quelques jours auparavant contre le fabricant d’imprimantes Epson, accusé lui aussi, de raccourcir la vie de ses produits (imprimantes et cartouches).

Si le droit européen n’a pas encore légiféré sur la question l’obsolescence programmée, la France elle, entend être le fer de lance en la matière.

Depuis la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation (dite « loi Hamon »), le délai de présomption d’antériorité des défauts de conformité a été étendu à 24 mois (article L. 217-7 du code de la consommation). Les consommateurs disposent également, d’une meilleure information sur la durée de disponibilité des pièces détachées indispensables à l’utilisation d’un produit mis sur le marché (article L. 111-4 du code de la consommation).

La loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte a créé quant à elle, le délit d’« obsolescence programmée ».

Depuis l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, ce délit est prévu à l’article L. 441-2 du code de la consommation, dans les termes suivants : 

« Est interdite la pratique de l’obsolescence programmée qui se définit par le recours à des techniques par lesquelles le responsable de la mise sur le marché d’un produit vise à en réduire délibérément la durée de vie pour en augmenter le taux de remplacement ».

L’obsolescence programmée est sanctionnée par deux ans d’emprisonnement et 300.000 euros d’amende. Le montant de l’amende peut être porté de manière proportionnée aux avantages tirés du délit, à 5 % du chiffre d’affaires moyen annuel du fabricant, calculé sur les trois derniers chiffres d’affaires annuels connus à la date des faits (article L. 454-6 du code de la consommation).

Cette nouvelle incrimination n’a toutefois pas été épargnée par les critiques. Pour certains, elle fait double emploi avec le délit de tromperie. Pour d’autres, elle se heurte à des obstacles probatoires insurmontables. En effet, l’application de ces dispositions demeure soumise à la preuve particulièrement difficile à établir, de l’intention du fabricant de réduire la durée de vie de son produit.

Compte tenu de l’actualité, l’obsolescence programmée devrait néanmoins faire l’objet de nouvelles mesures : le gouvernement présentera sa feuille de route au début du mois de mars 2018.

Il s’inspirera sans doute des nombreuses propositions de l’association HOP, laquelle sollicite notamment, l’affichage d’un message clair aux consommateurs sur la durée d’usage maximum d’un bien et l’adoption de mesures fiscales incitatives en faveur de la réparation (crédit d’impôt, réduction de la TVA…).

Pour les téléphones mobiles, le gouvernement pourra s’appuyer également sur le rapport de recherche « Des tiroirs pleins de téléphones remplacés : consommateurs et objets à obsolescence perçue », publié par l’ADEME en juin 2017 et le rapport sénatorial rendu par la mission d’information présidée par Madame Marie-Christine BLANDIN, sur le « devenir des matériaux et composants des téléphones mobiles ».

Publié en fin d’année 2016, ce dernier souligne « l’urgence d’une stratégie » et préconise notamment, :

  • l’allongement du délai de présomption de la garantie légale de conformité à 4 ans ;
  • l’imposition d’un dispositif de réversibilité des mises à jour aux fabricants de Smartphones.

Dans ce contexte, les fabricants sont vivement encouragés à s’emparer de ce sujet de premier ordre et à ajuster leurs pratiques.

Pour s’assurer de la pérennité de leurs achats, les consommateurs disposent quant à eux d’un arsenal juridique qui ne saurait être taxé… d’obsolète.

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