Pénibilité: les réactions des patrons et syndicats aux propos de Valls

A cinq jours de la conférence sociale, la décision de Manuel Valls de donner satisfaction à plusieurs demandes du patronat, en particulier sur la pénibilité, a fait l’effet d’une bombe mercredi 2 juillet auprès des syndicats qui dénoncent en choeur, réformistes comme contestataires, un « coup porté » au dialogue social. 

Après les menaces des organisations patronales (Medef, CGPME, UPA) de boycotter la conférence sociale, le Premier ministre a annoncé une série de mesures qui répondent à leurs exigences: report partiel à 2016 de la mise en place du compte pénibilité, révision du dispositif sur le temps partiel, demande de négociation syndicats-patronat pour simplifier le code de travail et revoir les seuils sociaux ouvrant des obligations aux entreprises. 

Le patronat, lui, s’est globalement félicité de ces décisions. Voici les principales réactions d’un côté et de l’autre.

La CFDT : L’interview de Manuel Valls dans les Echos « est une rupture en termes de dialogue social », a déclaré au Monde Laurent Berger, numéro un de la CFDT. Selon lui, « le Premier ministre a cédé à l’ultimatum du Medef  » qui « n’accepte pas qu’on crée des droits pour les salariés ». Il a commis « une erreur ». Il voit dans les annonces du Premier ministre aux Echos « une alerte très grave, un mauvais coup pour le dialogue social ». Pour autant, le leader de la CFDT ne remet pas en cause sa participation à la conférence sociale, mais prévoit « beaucoup de tensions » lundi et mardi au Palais d’Iéna qui abritera la grand-messe.

Jusqu’à présent principal partenaire syndical du gouvernement, la CFDT a opposé une fin de non recevoir à la demande du Premier ministre de négocier sur le code du travail. « Nous ne rentrerons pas dans une telle négociation d’autant plus qu’il faudrait que le patronat explique ce qu’il met aujourd’hui dans le dialogue social », a affirmé Laurent Berger. Partisan du pacte de responsabilité, la CFDT s’inquiète désormais de voir le gouvernement pencher la balance du côté du patronat et de poursuivre ses aides aux entreprises au-delà de 2015, sans s’assurer des contreparties en termes d’emploi: « pour 2016 et 2017, cela devra être conditionné aux engagements pris par les entreprises », martèle-t-il.

La CFTC : Le gouvernement a cédé « au jeu de chantage du Medef » au risque de mettre à mal « la crédibilité des acteurs du dialogue social », a regretté la CFTC.

La CGT: « Le gouvernement choisit son camp: celui du patronat qui ne veut rien lâcher », dénonce la centrale dans un communiquéLa CGT reproche à Manuel Valls de « donner raison au patronat qui ne veut plus entendre parler de la reconnaissance de la pénibilité », d' »affaiblir » la nouvelle réglementation sur le temps partiel et d’ouvrir la voie à un relèvement des seuils sociaux dans les entreprises, trois revendications formulées par les organisations patronales, qui avaient menacé de boycotter la conférence sociale des 7 et 8 juillet. « La CGT est fortement préoccupée par les dernières annonces » du Premier ministre qui « entendent cantonner le syndicalisme tout entier dans un rôle de figuration, particulièrement méprisant, pour l’exercice de la démocratie sociale », affirme le syndicat.

Dans une lettre au président de la République, Thierry Lepaon demande donc à François Hollande « une clarification sur l’ordre du jour et les objectifs » qu’il assigne à la conférence sociale. « Les engagements pris par le Premier ministre vis-à-vis des organisations patronales modifient de fait l’ordre du jour de la conférence sociale, puisque l’objectif est de répondre à la question: comment satisfaire les exigences posées par le patronat », écrit-il. Pour Thierry Lepaon, qui attend une « réponse » du chef de l’Etat, « l’exercice du dialogue social ne peut pas se traduire par la définition qu’en donne aujourd’hui le Premier ministre ».

FO : Le numéro un de Force ouvrière, Jean-Claude Mailly, qui mettait déjà en doute l’utilité des conférences sociales, s’est dit « en colère ». « Qu’on ne nous parle pas de dialogue social, moi j’appelle ça du diktat social », a-t-il lancé laissant planer un doute sur sa participation à la conférence sociale. « Il suffit que le patronat éternue » pour que le gouvernement « lui apporte la boîte de mouchoirs! », a-t-il ironisé. « Nous ne négocions pas avec un revolver sur la tempe » et « on n’est pas aux ordres du gouvernement », a-t-il prévenu.

Le Medef : Le président du Medef, Pierre Gattaz, avait salué ces annonces du chef du gouvernement dès mardi soir, parlant d’un « discours encourageant » et d' »avancées ». Mais il n’a pas été jusqu’à confirmer la participation de son organisation aux débats alors qu’il avait laissé planer la menace d’un boycott.

L’UNSA : Le syndicat réformiste juge les annonces du gouvernement, « sur le fond comme sur la méthode », comme « une entaille dans le dialogue social » et voit la conférence sociale « fragilisée ».

La CGPMELa Confédération générale des petites et moyennes entreprises a voté en assemblée générale en faveur de la participation à la conférence sociale de la semaine prochaine, à l’unanimité, a annoncé son secrétaire général à l’AFP. « Nous avons considéré qu’au vu du report partiel du compte pénibilité » annoncé par Manuel Valls, et des « assurances que nous avons reçues » sur le temps partiel, « le dialogue était à nouveau possible », a expliqué Jean-Eudes du Mesnil. « Nous avions l’impression que sur ces deux points, qui sont pour nous des points de blocage, tout était déjà dit », a-t-il rappelé.

La FFB : La Fédération française du bâtiment a estimé avoir été « entendue » par le gouvernement.

La FNSEA : « Ca bouge », s’est félicité le président de la FNSEA Xavier Beulin, au téléphone avec l’AFP.

L’UPA : Le syndicat qui représente les artisans a dit vouloir « participer activement » à la conférence sociale, estimant dans un communiqué que « l’ouverture dont fait preuve le Premier ministre est salutaire ».

LireCe que prévoit le gouvernement pour le compte pénibilité

(Avec AFP)


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