Prêt immobilier : entre hypothèque et caution, comment choisir ?

Négocier un taux avantageux, se pencher sur l’assurance de prêt, tout en finalisant l’achat immobilier : bien souvent, les emprunteurs s’intéressent en dernier lieu à la question du choix de la garantie. Tout ce qu’il faut savoir avant de signer son offre de crédit.

Lorsqu’une banque vous octroie un crédit immobilier, elle veut la garantie d’être remboursée. L’assurance de prêt couvre l’emprunteur contre les événements de la vie (incapacité, décès, etc.), et protège donc aussi la banque contre ces mêmes événements. La garantie protège elle uniquement la banque contre les défaillances de l’emprunteur, autrement dit s’il ne parvient plus à rembourser. Dans le jargon bancaire, on parle de « sûreté ».

L’existence d’une sûreté est non négociable : la banque va exiger cette garantie ! Les deux formes les plus courantes sont le cautionnement, une garantie collective, et l’hypothèque sur le bien acheté, solution individualisée. Actuellement, la caution a clairement pris le pas sur l’hypothèque, qui représente désormais moins d’un tiers de la production de crédits.

Choix réel ou théorique ?

Pourquoi les emprunteurs  »préfèrent »-ils le cautionnement ? Dans l’immense majorité des cas, ils n’ont pas le choix. « C’est la banque qui préfère le cautionnement », confirme Cécile Roquelaure, directrice des études du courtier Empruntis. « Pour la banque, c’est le meilleur système de délégation du risque : en cas de problème, l’organisme de caution se débrouille pour recouvrer la dette. » Les banques ont en outre la main sur ces organismes de cautionnement : il s’agit soit d’une filiale interne au groupe bancaire (Camca au Crédit Agricole, CEGC pour Caisse d’Epargne et Banque Populaire, etc.), soit de Crédit Logement, un organisme détenu par l’ensemble des grandes banques françaises.

Comme nous l’ont confirmé plusieurs sources bancaires, l’emprunteur a une infime marge de négociation sur ce point. Il peut tout de même mettre les banques en concurrence : dans ce cas, l’une pourrait opter pour la caution, et l’autre pour l’hypothèque. Mais la garantie ne sera alors qu’un élément de comparaison parmi d’autres entre les offres de prêt.

Des alternatives méconnues

Pour l’achat d’un bien ancien, la garantie peut être le privilège de prêteur de deniers (PPD), dont le fonctionnement est très proche de l’hypothèque mais qui permet d’éviter la taxe de publicité foncière.

Certaines mutuelles peuvent par ailleurs se porter caution, le coût étant généralement moindre qu’auprès d’un organisme de cautionnement classique.

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L’hypothèque obligatoire pour certains prêts réglementés

Si les banques « préfèrent » la caution, pourquoi 3 prêts sur 10 font-ils encore l’objet d’une hypothèque ? D’une part car les organismes de caution refuseront systématiquement certains types de dossiers, d’autre part pour des raisons réglementaires. « La garantie d’un Prêt à l’accession sociale (PAS) est obligatoirement une hypothèque dès lors que le montant du prêt est supérieur à 15 000 euros », souligne LCL. « Pour le Prêt à taux zéro (PTZ), la garantie hypothécaire n’est obligatoire qu’en présence d’un PAS associé dans le plan de financement », ajoute le service juridique de la banque. Tous les autres types de crédits (prêt bancaire classique, prêt PEL, PTZ non lié à un PAS, etc.) peuvent être couvert par un organisme de caution.

« Pour un prêt sans apport, la probabilité d’une hypothèque est très forte »

Sans qu’il existe une contrainte réglementaire, certains dossiers spécifiques feront eux aussi quasi systématiquement l’objet d’une garantie hypothécaire : « Pour du 110% [les dossiers sans apport personnel, NDLR], la probabilité d’une hypothèque est très forte », juge Cécile Roquelaure, « mais c’est vraiment la banque qui reste décideuse ». Les emprunteurs au statut professionnel spécifique (indépendants, personnes morales) ont eux aussi plus de risques de se voir imposer une hypothèque selon la directrice des études d’Empruntis.

La délicate comparaison des coûts

Faut-il privilégier hypothèque ou caution pour une question de coût ? Il existe des simulateurs (celui de l’Adil notamment pour l’hypothèque, celui des notaires de Paris pour la mainlevée, et celui de Crédit Logement pour la caution) mais la comparaison reste périlleuse du fait de « l’hétérogénéité des offres » des sociétés de cautionnement, comme l’a souligné l’Autorité de la concurrence en 2015.

Et le principe même de tarification des deux solutions diffère. Le cautionnement occasionne un coût initial proche de 1,5% du montant du prêt, mais une partie de cette somme sera restituée à l’issue de l’emprunt. La tarification de l’hypothèque est « plus simple » selon Antoine Dejoie, vice-président du Conseil supérieur du notariat (CSN) : « Un coût à l’origine », incluant émoluments du notaire, taxe de publicité foncière et contribution de sécurité immobilière, puis « un coût éventuel à la fin », les frais de mainlevée en cas de vente et de rachat de crédit avant la fin du prêt. « Il y a une date de péremption », image Antoine Dejoie, « si vous remboursez le crédit jusqu’à son terme, il n’y a aucun coût supplémentaire ». Par ailleurs, le coût de l’hypothèque est moindre en cas de PTZ ou de prêt conventionné, l’emprunteur étant alors exonéré de taxe de publicité foncière.

Simulation : des coûts très variables

Un emprunteur achète un bien neuf de 250 000 euros près de Dijon en sollicitant un crédit bancaire classique de 200 000 euros. Dans ce cas de figure, le coût initial de l’hypothèque est d’un peu plus de 3 000 euros selon l’Adil, et la caution de 2 500 euros selon le barème classique de Crédit Logement en pouvant espérer une restitution de 1 081 euros à la fin du prêt.

En revanche, si le même emprunteur débourse cette somme pour un bien dans l’ancien, la caution reste identique mais une garantie PPD ne lui revient qu’à 1 442 euros grâce à l’absence de taxe de publicité foncière. Un coût réduit qui vaut aussi pour l’hypothèque en cas d’achat incluant un PTZ.

Hypothèque : une lourdeur administrative ?

« L’hypothèque peut coûter moins cher, mais cela représente un parcours plus lourd », juge toutefois Cécile Roquelaure, d’Empruntis. Le notaire Antoine Dejoie réfute l’idée de délais supplémentaires occasionnés par l’hypothèque : « Cette lourdeur administrative, c’est plus une idée répandue qu’une réalité. » Le vice-président du CSN estime ainsi que les emprunteurs sont mal informés sur l’hypothèque, et qu’ils la craignent surtout à cause de clichés persistants : « La symbolique de l’hypothèque fait peut-être peur. Certains se disent que leur maison va appartenir à la banque. » Des craintes non justifiées selon lui.

Des risques quasi équivalents en cas de problème financier

Les notaires mettent logiquement en avant les bienfaits de l’hypothèque. Sur le site du CSN, le notariat décrit un scénario « extrêmement onéreux pour l’emprunteur » en cas de défaillance dans le cadre de la caution. L’organisme de caution va prendre en charge les premiers impayés, puis chercher à « trouver des solutions amiables » avec la banque. Ensuite « l’établissement caution procède (…) à une inscription hypothèque judiciaire aux frais de l’emprunteur ». Bref, en cas d’impayés, la finalité est la même pour l’emprunteur. Autrement dit, la scrupuleuse comparaison du prix initial reste le principal critère de choix, lorsqu’un choix est envisageable…

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