Scandale VW : joute politico-financière USA/ Europe, le TTIP comme enjeu

Jour après jour, l’accusation de fraude portée contre VW prend de l’ampleur. Emportant désormais dans son sillage, l’Union européenne. Comme si c’était elle, qu’au final on chercherait à affaiblir.

Selon le Financial Times, le commissaire européen à l’environnement a averti dès 2013 ses collègues que des constructeurs automobiles truquaient des moteurs en vue de fausser les tests antipollution, mais le scandale Volkswagen n’a éclaté au grand jour qu’il y a quelques semaines à peine. Sous-entendu, au delà du constructeur allemand, c’est l’Union européenne qui est fautive dans cette affaire.

Or, cette affaire voit le jour alors même que le traité transatlantique de libre-échange (TTIP) est en cours de négociation entre Bruxelles et Washington. Au final, la tricherie de Volkswagen entame la crédibilité des Européens comme l’affirme elle-même la commissaire européenne au Commerce, Cecilia Malmström. Et ce, alors même que Etats-Unis et Union européenne rivalisent d’efforts pour faire accepter leurs normes respectives.

Si l’on en croit le journal anglo-saxon, les dirigeants de l’UE étaient informés du problème deux ans avant sa révélation et l’ont laissé persister. En vue d’appuyer ses propos, le Financial Times indique que le commissaire à l’environnement, Janez Potocnik, mentionne le problème dans une lettre adressée en février 2013 au commissaire à la politique industrielle Antonio Tajani.

« Il y a des préoccupations répandues selon lesquelles la performance a été ajustée pour se conformer au cycle de tests, en dépit d’une spectaculaire augmentation des émissions en dehors de ce contexte », aurait ainsi écrit M. Potocnik, selon le journal.

Rappelons à cet égard que les autorités américaines ont accusé le groupe Volkswagen d’avoir équipé des millions de moteurs d’un logiciel permettant d’activer les systèmes de limitation de la pollution durant l’exécution d’un test environnemental, mais les désactive lorsque le véhicule circule. Une falsification qui, au final, conduit à des taux d’émission dangereux.

– Une affaire liée au traité transatlantique de libre-échange ?

On peut raisonnablement s’interroger sur les liens potentiels entre le scandale VW et le traité transatlantique, et ce, d’autant plus que la reconnaissance mutuelle des législations sur l’automobile entre les États-Unis et l’UE qui est prévue dans le texte pourrait générer 18 milliards d’euros de profit par an, dont 90 % iront à l’UE.

Ce traité bilatéral imposera en effet des règles réciproques à tous les pays partenaires. Un contexte de nature à créer un véritable
rapport de force entre l’Union Européenne et les Etats-Unis, lesquels souhaitent devenir la référence en jouant les gros bras, alors que l’Europe ne dispose pas à l’heure actuelle de leadership dans ce domaine.
« Outre la dimension environnementale, l’affaire Volkswagen présente une évidente dimension géopolitico-économique. L’occasion rêvée pour les Etats-Unis d’imposer leurs normes en pleines négociations avec l’Europe sur le traité transatlantique » affirmait en septembre dernier France Info.

Une affaire qui tombe très mal alors la commissaire européenne au Commerce s’est échinée depuis deux ans à expliquer aux Américains que les Européens seront intraitables sur les normes et les contrôles, ceci faisant partie de leur culture.

– L’Allemagne, moteur économique de l’Europe dans le collimateur US

Selon les termes mêmes de Cecilia Malmström, l’ »affaire Volkswagen » est « un immense scandale industriel », mais «  c’est aussi la face cachée de l’offensive économique américaine qui se joue avec des exemples marquant l’opinion publique. L’occasion fait le larron ». Ainsi, « en touchant Volkswagen, les américains touchent directement l’Allemagne, orgueil du savoir-faire et de la rigueur, surtout moteur de l’économie européenne » indiquait-elle récemment dans un entretien accordé au Figaro.

« Le modèle allemand à l’épreuve » titrait ainsi  Le Monde  le 15 septembre dernier pour décrire les difficultés économiques éprouvées par le groupe allemand en 2015.

Sources : Financial Times, France Info, Le Figaro, EurActiv

Elisabeth Studer – 26 octobre 2015 – www.leblogfinance.com

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