Venezuela : plombé par cours du pétrole et Moody’s, le pays se tourne vers la Russie

Voilà qui devrait déplaire à l’oncle Sam …

Alors que les lobbies pétroliers US semblent redoubler d’effort pour plomber le Venezuela en jouant sur les cours du pétrole, ils n’ont semble-t-il pas prévu l’effet boomerang … puisque la situation a ni plus ni moins poussé le gouvernement à trouver une solution pour se sortir de l’ornière et de la faillite, mais  cette solution passe par la Russie. Au grand dam des majors US … lesquelles pourraient voir leur filer sous le nez de bien intéressantes licences d’exploitation ou de production. Qui est pris qui croyait prendre ? Allez savoir ….

En tout état de cause, la chaîne de télévision vénézuelienne RT rapporte ainsi que Moscou va accroître ses investissements dans les projets pétroliers au Venezuela conformément à une entente intervenue jeudi à Moscou lors d’une rencontre des présidents russe et vénézuélien, Vladimir Poutine et Nicolás Maduro.

« Nous avons décidé d’augmenter la participation de sociétés russes à la mise en valeur des gisements de la ceinture pétrolifère de l’Orénoque et d’autres projets d’investissement », a indiqué M. Maduro.

Rappelons que la ceinture de l’Orénoque  constitue l’un des gisements pétroliers les plus riches au monde, avec une surface de 55 000 km² et des réserves de pétrole estimées à 84,6 milliards de barils. Cette région est divisée en quatre champs pétroliers : Boyacá, Junín, Ayacucho et Carabobo.

Si l’on en croit le chef d’Etat du venezuela, cette décision est appelée à protéger le marché mondial du pétrole et à renforcer la coopération énergétique russo-vénézuélienne.

Maduro semble avoir plus d’une corde à son arc, tenant à rappeler qu’il s’était rendu récemment en Iran, en Arabie saoudite, au Qatar et en Algérie. Précisons que ces pays producteurs de pétrole ont également choisi d’investir dans l’économie vénézuélienne.

« J’ai trouvé les ressources nécessaires pour maintenir le rythme de développement actuel du pays », a noté au final M. Maduro.

Un président tout de même quelque peu fanfaron ?

Rappelons en effet que ces propos interviennent alors que l’agence de notation financière Moody’s a annoncé mardi avoir abaissé de deux crans à Caa3 la note du Venezuela. Raisons invoquées : le risque de faillite du pays, producteur de pétrole de tout premier ordre sur le plan international, a nettement augmenté, selon Moody’s. Laquelle  estime  que le Venezuela se situe désormais dans la catégorie des pays emprunteurs à très haut risque.

L’agence de notation mentionne que la chute des prix du pétrole est le principal facteur de cette dégradation de la note.

Pour 2015, l’agence de notation table sur un déficit courant de 2% du produit intérieur brut pour le Venezuela, le premier depuis 1998.

En octobre dernier, le quotidien russe Novye Izvestia déplorait d’ores et déjà que la situation économique du Venezuela s’aggravait au fur et à mesure que le cours pétrolier diminue.

« En dépit de l’optimisme du gouvernement, le marché ne croit pas non plus en un avenir prospère du pays », ajoutait le journal. Lequel précise que les taux d’intérêt pour les obligations de 10 ans avaient atteint 18% la semaine précédente, un niveau record inégalé depuis cinq ans et supérieur à celui des pays les plus endettés, dont l’Ukraine et l’Argentine.

Au final, le quotidien estimait que les obligations du pays étaient devenues les plus risquées du monde. Pire encore, selon lui, le marché se prépare ni plus ni moins au crash financier du Venezuela. D’autant plus qu’en un peu plus d’un mois, le tarif du pétrole vénézuélien avait alors baissé de presque 15 dollars.

Autre élément notable : la chute du pétrole a provoqué une forte baisse des réserves de change du pays. Selon la Banque centrale du Venezuela, ces dernières sont tombées en-dessous de 20 milliards de dollars au mois d’octobre 2014.

Une situation d’autant plus alarmante que la production pétrolière locale ne cesse de diminuer. Durant l’époque Chavez, le Venezuela produisait 3,5 millions de barils par jour, il n’en produit que 2,6 millions aujourd’hui. Autre élément inquiétant : seulement 1,2 million de barils vendu quotidiennement rapportent des devises au pays.

Car le Venezuela pratique une politique de troc et de tarifs bas avec ses voisins de Cuba et d’autres pays des Caraïbes, le pays de Fidel Castro profitant de l’excellent niveau de ses médecins pour s’approvisionner à bas coûts.

Parallèlement, Caracas envoie des milliers de barils en Chine en vue de rembourser les intérêts des prêts de plusieurs milliards de dollars. 800 000 barils sont quant à eux destinés au marché intérieur. Vendus à un prix modique, ils ne rapportent rien au Trésor.

Si les marchés vénézuéliens s’avèrent quelque peu pessimistes, en octobre dernier, le président Maduro déclarait encore à qui voulait l’entendre que tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes, et que la dégringolade du cours pétrolier devrait permettre au Venezuela de rebondir après avoir touché le fond.

Mais la situation est loin d’être aussi idyllique …. En effet, le journal vénézuélien El Universal indiquait parallèlement que le Venezuela importait du pétrole pour la première fois dans son histoire. Un porte-conteneurs en provenance d’Algérie devait ainsi arriver le 26 octobre sur les côtes vénézuéliennes avec quelque 2 millions de barils d’un pétrole algérien ultraléger, dénommé Saharan Blend.

Le quotidien espagnol El País, considérait quant à lui qu’il s’agissait d’une « atteinte à la souveraineté d’un pays qui compte les plus grandes réserves pétrolières au monde ». Ajoutant au final que « la chute des prix du pétrole aggrave la crise économique du Venezuela ».

L’importation de ce pétrole algérien léger est destiné à réduire le coût de la transformation du pétrole lourd issu des gisements de la ceinture de l’Orénoque, dans le nord-est du pays.

Le coût élevé du naphta, solvant utilisé par l’industrie pétrolière vénézuélienne en vue de le mélanger au brut avant exportation, grève en effet es comptes de la PDVSA, et ce d’autant plus dans le contexte actuel de baisse des prix du baril. Le gouvernement de Nicolás Maduro a donc choisi de s’approvisionner en pétrole léger d’Algérie pour remplacer le naphta.

Cinquième exportateur mondial du brut et fournisseur majeur des Etats-Unis le Venezuela est un pays dont l’économie est essentiellement basée sur le pétrole. Ce dernier est non seulement le pilier de l’économie vénézuelienne mais aussi celui de la politique diplomatique menée successivement par Hugo Chavez et Maduro.

Sources : Presse russe et espagnole, Courrier International

Elisabeth Studer – www.leblogfinance.com – 16 janvier 2015


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