Analyse et Stratégie : 2018 une année à oublier en Bourse… pour les offres publiques aussi

« Nous sommes revenus plusieurs années en arrière, au niveau des années de crise, » souligne Marc Lefèvre, associé chez EY pour résumer la dixième édition de « L’observatoire des offres publiques », que publie ce jeudi la société de conseil. Avec 22 offres publiques en France l’an dernier, on est loin des 40 de 2017 et même en recul par rapport aux 27 de 2009 et 2010. « C’est le nombre le plus bas depuis que nous publions le baromètre avec un second semestre particulièrement peu actif » constate Sonia Bonnet-Bernard, elle aussi associée chez EY. En montant, la chute est encore plus spectaculaire avec une division par 8, à 2,6 milliards contre 21,5 milliards en 2018. Seules quatre opérations : Euler Hermes, Naturex, Direct Energie et Altamir ont dépassé 400 millions.

Une seule grosse introduction : Neoen

Cette étude compile, également, les introductions en Bourse et les augmentations de capital et, là aussi, le bilan est peu flatteur. S’il y a eu 17 introductions contre 14 l’année précédente, une seule opération, Neoen, a, avec 697 millions levés, dépassé la barre des 100 millions. Les autres grosses introductions comme Novares, Autodis ou Delachaux ont finalement été annulées en raison des conditions de marché ou d’une vente à un fonds d’investissement. Alors que l’Allemagne et les Pays-Bas ont accueilli des « deals » d’envergure (DWS, Adyen…), la France est restée bredouille. « Paris a moins bien affronté le vent de face que d’autres Bourses. Même le Royaume-Uni, malgré le Brexit, s’est mieux positionné », remarque Marc Lefèvre, qui insiste par ailleurs sur l’absence de fonds de pension et le peu d’entrain de certains grands institutionnels lors des introductions : « Des investisseurs français tels qu’Amundi ou Axa IM ne sont pas suffisamment présents alors que les anglo-saxons jouent davantage le jeu des IPO dans leur pays. ».

Les augmentations de capital ne permettent pas de redresser la barre de ce bilan décevant : 51 sociétés contre 69 en 2017 ont fait appel au marché… et pour des montants en net recul : 2,5 milliards, contre 10,9 milliards. Aucune très grande société n’a sollicité ses actionnaires, la plus importante étant Altran, qui a levé 750 millions.

Un « pipeline » bien rempli pour 2019

On le comprend, 2018 ne laissera pas un souvenir impérissable. Peut-on, dans ces conditions, compter sur de meilleures perspectives en 2019 ? « Il y a pas mal d’opérations d’introductions dans le pipeline avec à la fois celles qui ne sont pas sorties en 2018, quelques sociétés familiales, de belles sociétés technologiques et des scissions d’activités, explique Marc Lefèvre, mais il est difficile de savoir ce qui va réellement sortir. La volatilité induit une certaine frilosité. Il faudra sans doute un peu de temps pour que les prix se réajustent entre des acheteurs qui veulent que soit pris en compte la baisse des marchés et des vendeurs qui considèrent que la société qu’ils souhaitent introduire vaut toujours aussi cher ».

« Il n’est pas évident de se projeter, la volatilité se poursuivant. On peut imaginer des offres par échanges de titres, car il est plus facile de se mettre d’accord sur des valeurs relatives que sur des prix absolus en période de volatilité. La loi Pacte, qui devrait abaisser le seuil des retraits obligatoires à 90%, pourrait aussi avoir pour conséquence d’augmenter le nombre d’offres de retrait », pronostique de son côté Sonia Bonnet-Bernard au sujet des offres publiques.


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