Fitch rétrograde la note de l’Azerbaïdjan : double peine pour un pays stratégique pour pétrole et gaz

Nouvelle victime de la chute du prix de baril. L’Azerbaïdjan vient de voir vendredi l’agence de notation financière Fitch abaisser sa note, laquelle a été revue à la baisse d’un cran à BB+, le tout étant assorti d’une perspective négative, ce qui signifie qu’une nouvelle dégradation n’est pas à écarter.

Au final, le pays pourrait subir une triple peine : baisse des revenus budgétaires suite à la dégringolade du prix du pétrole, méfiance des agences de notation et donc coût de la dette accrue. Ce qui ne doit pas nous faire oublier qu l’Azerbaïdjan est doté d’une position géopolitique  on ne peut plus importante sur l’échiquier énergétique mondial.

Fitch prévoit que le déficit budgétaire du pays, lequel représentait 5,3% du Produit intérieur brut (PIB) en 2015, affichera un taux de 12,5% en 2016 avant de fléchir à 7,5% en 2017.

Une notation qui s’appuie sur la chute d’environ 40 % en 2015 des recettes du pétrole et du gaz de l’Azerbaïdjan, lesquelles représentaient plus de 50% des recettes de l’Etat sur les cinq dernières années. Selon les prévisions de l’agence de notation, elles devraient baisser encore de 30% en 2016.

Cette ancienne républiques soviétique, riche en hydrocarbure, se voit également affectée par la récession qui sévit en Russie, avec qui elle maintient d’étroits liens commerciaux.

Fitch souligne aussi que la dévaluation de la monnaie azérie – le manat – contribue également à augmenter les pressions sociales, notant parallèlement que le gouvernement prévoit de porter les dépenses destinées aux catégories les plus défavorisées de la population à environ 2% du PIB cette année. Depuis le début de l’année, l’Azerbaïdjan est secoué par des manifestations quotidiennes, alors que sa monnaie a perdu le tiers de sa valeur en un mois. Cette chute s’avère d’autant plus dramatique qu’un tiers des ménages azéris a contracté des emprunts immobiliers en dollars.

L’agence de notation rappelle par ailleurs que la politique de défense du manat mené préalablement par le gouvernement aura réduit les réserves de la Banque centrale de la moitié de sa valeur, alors que Bakou a instauré récemment un contrôle des capitaux.

Pour 2016, Fitch prévoit que le PIB azéri devrait se contracter de 3,3%, tablant parallèlement sur une inflation proche de 14% et une faiblesse prononcée du secteur bancaire.  La croissance devrait toutefois être de retour en 2017, et plus fortement encore en 2018 grâce l’ouverture à l’exploitation du champs gazier de Shah Deniz 2.  lequel est doté d’une importance géostratégique des plus cruciales à l’heure actuelle.

Simple coïncidence ? Rappelons qu’en janvier dernier, une mission du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale s’est rendue en Azerbaïdjan en vue de discuter d’un éventuel plan de secours de 4 milliards de dollars.

Précisons ainsi qu’en janvier 2016, la presse azérie indiquait que les travaux sur le projet de TANAP – gazoduc Transanatolien visant l’acheminement du gaz extrait du gisement de Shah Deniz-2 de la mer Caspienne vers l’Europe via la Turquie – se poursuivent rapidement. Ajoutant que tous les pipes qui seront utilisés pour le projet avaient déjà été remis après avoir été fabriqués en Chine à hauteur de 20 % et en Turquie à hauteur de 80 %.

Avec une longueur totale de 850 km (19 km sous la mer de Marmara), le projet TANAP est la partie principale du corridor gazier Sud, qui se connectera au gazoduc du Caucase du Sud et à celui Transadriatique, sa mise en exploitation étant prévue pour 2018.

Eléments notables au niveau géopolitique : deux stations de compression liées au réseau de transport de gaz naturel seront installées à Eskiseher et Trakya en Turquie. TANAP reliera en effet la cité de Posof de la province d’Ardahan, stiuée à la frontière de la Turquie avec la Géorgie à la cité d’Ipsala de la province d’Edirne située à la frontière avec la Grèce, en passant par 21 provinces.

TANAP acheminera 10 milliards de mètres cubes de gaz naturel de l’Azerbaïdjan vers l’Europe et 6 milliards de mètres cubes de gaz naturel vers la Turquie. La capacité initiale sera 16 milliards de mètres cubes, en 2023 elle atteindra 23 milliards de mètres cubes, et 31 milliards de mètres cubes en 2026. TANAP,  qui est la partie la plus longue du couloir gazier Sud, se joindra au gazoduc TAP (Trans Adriatic Pipeline) à partir du début de 2020 et acheminera le gaz naturel en Europe via la Grèce, l’Albanie et l’Italie. Les actionnaires sont : la SAF Couloir gazier Sud (58%), BOTAS (30%) et British Petroleum (BP) (12%).

Sources : AFP, Presse azérie, Les Echos

Elisabeth Studer – 27 février 2016 – www.leblogfinance.com

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