Grèce : quand le référendum permet à la BCE d’être encore plus gourmande

Ne vous réjouissez pas trop tôt du oui grec au référendum …. Cela ne pourrait être ni plus ni moins la porte ouverte  à la BCE pour lui permettre de prêter de l’argent à Athènes via des conditions on ne peut plus draconiennes voire prohibitives …. et ceci, en toute impunité … ou presque …

La Banque centrale européenne (BCE) a annoncé lundi soir le maintien au niveau actuel des prêts d’urgence (ELA) aux banques grecques, tout en durcissant les conditions d’octroi.

Le conseil des gouverneurs de la BCE a ainsi décidé lundi de maintenir la ligne de crédit d’urgence (ELA en anglais) aux banques grecques au niveau décidé le 26 juin 2015. Date à laquelle, son  plafond  a été plafonné à près de 89 milliards d’euros.

L’ELA peut seulement être octroyé en échange de collatéraux suffisants, a toutefois tenu à rappeler la BCE lundi dans son communiqué. Or, la dégradation financière de la Grèce a un impact sur lesdits collatéraux, à savoir : les titres mis en garantie par les banques grecques pour avoir accès aux prêts d’urgence auprès de la Banque de Grèce. S’il s’avère que ces garanties sont souvent des obligations d’Etat, précisons qu’en l’absence d’accord entre Athènes et ses créanciers (UE, BCE, FMI), la note attribuée à la dette grecque a été récemment révisée à la baisse par toutes les grandes agences de notation.

Alors que la Grèce est engluée dans une situation financière des plus alarmantes, peinant à rembourser ses créanciers, la spirale infernale ne fait ainsi que s’accentuer …. Rappelons que depuis février dernier, c’est par le seul biais de relèvement du plafond de la ligne de crédit d’urgence, que la BCE soutient à sa façon les établissements financiers grecs.

Au final, si on réfléchit bien … la Grèce se voit donc contrainte d’emprunter à nouveau, l’impasse dans laquelle elle se trouve augmentant encore sa dépendance financière vis à vis des banques, lesquelles n’ont rien de philanthropes et sont bien évidemment rémunérées pour leurs services. Comme quoi, la quasi-faillite de la Grèce ne présente pas que des inconvénients.

La ligne de crédits d’urgence a été demandée par la Banque de Grèce le 21 janvier dernier, après des retraits massifs de dépôts de l’ordre de 13 milliards d’euros en janvier. Révocable à tout moment, sa mise en œuvre nécessite l’aval de la BCE tous les quinze jours. Très précaire, son coût pour la Grèce est plus cher que le financement « classique » de la BCE mais permet certes aux banques grecques de faire face à un éventuel «bank run», une panique bancaire, situation qui pourrait survenir en cas de volonté des déposants de retirer leur argent en cash ou de le faire virer hors de Grèce.
En échange de la liquidité, les banques grecques fournissent des titres de qualité médiocre à la Banque de Grèce. Le mécanisme évitant au passage un partage du risque grec avec autres actionnaires de la BCE.

En février dernier, la Banque centrale européenne (BCE) a annoncé  dans un communiqué sa décision de priver les banques grecques d’une de leurs sources de financement.Des mesures qui pourraient conduire à terme à l’asphyxie financière de l’Etat grec , avais-je alors laissé entendre. A moins que quelques banques sortant de l’ombre n’apparaissent tels des sauveurs pour porter secours à Athènes, laquelle pourrait être contrainte de céder à leurs « avances »  avais-je également suggéré.Une suspension que l’institution – anticipant les critiques – présentait d’entrée comme étant conforme aux règles de l’eurosystème.

Arguments invoqués pour suspendre « le régime de «faveur » dont bénéficiaient jusqu’alors les banques grecque : l’impossibilité de prévoir actuellement une issue positive du programme d’aide international dont bénéficie Athènes.

Rappelons que la BCE fournit des liquidités aux banques de la zone euro  sous forme de prêts, moyennant des garanties, dénommées « collatéraux » dans le langage des banques centrales. Les titres que les banques  ont en portefeuille – telles par exemple des obligations souveraines – permettent ainsi de garantir l’emprunt. Mais, la BCE, en vue de limiter ses risques, n’accepte comme « collatéraux » que les titres les mieux notés par les agences de notation.Or, si les banques grecques peuvent principalement apporter en garantie des obligations émises par l’État grec, ces dernières ne remplissent pas les critères de la Banque Centrale européenne, la Grèce étant un investissement considéré comme « pourri » (« junk »).

Depuis plusieurs années, les banques grecques bénéficiaient d’une exemption, la BCE acceptait les titres de dette publique grecque comme collatéraux. Seule  solution possible  pour les banques grecques : activer l’option d’urgence – mécanisme appelé ELA – qui permet aux banques centrales nationales, telle la Banque de Grèce, de débloquer des fonds pour aider les établissements de crédit à surmonter une crise de liquidités.

Rappelons enfin qu’en février 2010, alors que certaines rumeurs laissaient entendre que des banques américaines – et non des moindres – pourraient être derrière les spéculations visant la Grèce, le New York Times affirmait de son côté que des banques de Wall Street – telles que Goldman Sachs – auraient usé d’instruments financiers complexes en vue « d’aider » Athènes à dissimuler l’ampleur de sa dette. Des montages, précisait le journal,  »de même ordre que ceux qui ont été à l’origine de la crise financière outre-Atlantique ».
Selon le New York Times, citant « des personnes au courant de la transaction », un montage élaboré par Goldman Sachs aurait ainsi permis en 2001 d’aider le gouvernement grec à emprunter des milliards. Un « soutien » qui serait intervenu quelques temps après l’adhésion d’Athènes à l’Union monétaire européenne.

Goldman Sachs n’ayant rien d’un philanthrope, la banque aurait rémunéré ses « services » à hauteur de quelque 300 millions de dollars. C’est en tout cas ce qu’affirmait alors le NYT.

Certains affirmaient également alors que des banques US pourraient tirer les ficelles, histoire de plomber la zone euro ….. et de pouvoir proposer à terme à la Grèce des emprunts à des taux prohibitifs.

Cqfd ?

Sources : AFP, Le Figaro

Elisabeth Studer – 6 juillet 2015 – www.leblogfinance.com


Le Blog Finance