L’efficacité des porte-avions US remise en question, une aubaine pour la Russie ?

Alors qu’en mai dernier, le capitaine de vaisseau Vladimir Triapitchnikov, chef de la direction de construction navale de la Marine russe, a indiqué qu’un porte-avions russe de nouvelle génération devrait entrer en service d’ici 2026-2027, la presse russe met désormais en avant un rapport du centre d’études New American Security mettant en cause l’efficacité des porte-avions américains.

Selon cette étude, ces navires pourraient devenir inefficaces dans les prochaines années en raison d’erreurs stratégiques commises il y a plusieurs années.

New American Security a en effet récemment publié un rapport de l’expert Henry Hendrix pointant le principal point faible des groupes de porte-avions, à savoir les avions eux-mêmes, dont la portée est limitée.

Le développement de moyens de dissuasion, notamment de missiles capables de frapper des porte-avions, pourra de facto réduire la capacité des vaisseaux américains à s’approcher sans danger à une distance suffisante de la côte et à déployer effectivement l’aviation, estime parallèlement Henry Hendrix cité par CNN.

Selon l’expert, la décision prise il y a deux décennies de privilégier les porte-avions légers, maniables, polyvalents, mais non de « longue portée », s’avère au final être une erreur, car bien qu’ils soient moins chers et plus rapides, ces avions mettent en péril toute la stratégie américaine à l’origine des groupes de porte-avions.
En outre, toujours d’après son analyse, le développement de missiles anti-navires de moyenne portée par des adversaires potentiels, en particulier la Chine, la Russie, l’Iran et la Corée du Nord, remet en question l’efficacité de la stratégie de défense américaine.

L’expert prend notamment pour exemple le « tueur de porte-avions« , ou DF-21D, présenté par la Chine lors du défilé militaire à Pékin, lequel a une portée maximale de plus de 1.450 km. Il s’agit du premier missile balistique à longue portée basé à terre et capable d’engager un porte-avions et son groupe de soutien en mouvement, menaçant directement le potentiel maritime militaire américain.

En 2009, l’Institut Naval des Etats-Unis a ainsi déterminé que sa charge militaire serait suffisante pour détruire un porte-avions en un seul coup, et qu’il n’y avait « à l’heure actuelle aucun moyen de défense contre lui  » s’il fonctionnait comme cela était supposé.

Une remise en cause qui tombe tout de même bien à pic, alors qu’en mai dernier, M. Triapitchnikov avait déclaré sur les ondes de la radio Echo de Moscou que  d’ici 2026-2027, la Russie projetait de construire un bâtiment de cette classe pour remplacer le porte-avions en service Admiral Kouznetsov. Ajoutant que les travaux de conception de ce navire étaient déjà en cours.

En juillet 2007, Vladimir Massorine avait indiqué que la Russie pourrait lancer la construction d’un deuxième porte-avions après 2015. Soulignant alors que la construction d’un porte-avions posait « un problème délicat pour n’importe quel Etat ». « Nous avons prolongé la durée de vie du porte-avions, mais il n’est pas éternel. C’est pourquoi nous envisageons la conception et la construction d’un porte-avions moderne », avait résumé à cette date le chef de la Marine russe.

En novembre 2013, le vice-premier ministre russe Dmitri Rogozine avait déclaré pour sa part que la Russie n’avait pas besoin de nouveaux porte-avions pour des raisons géopolitiques.   »Nous avons démontré que nous sommes capables de construire de tels navires. Mais il faut une décision politique. Pour le moment, nous n’avons pas besoin d’un navire de cette classe », avait indiqué le vice-premier ministre au terme de la remise du porte-avions modernisé INS Vikramaditya (ancien croiseur porte-avions soviétique Admiral Gorchkov) à l’Inde.

« La présence de porte-avions au sein de la Marine ne s’explique pas par des raisons militaires, mais par des raisons géopolitiques », avait-t-il alors expliqué.  Des propos qui ont au moins le mérite d’être francs …. Il avait alors estimé que si la Russie décidait de se doter de nouveaux porte-avions, ses chantiers navals seraient capables de construire des navires du même tonnage que celui du Vikramaditya, voire plus. A l’heure actuelle, la Marine russe est dotée d’un seul croiseur porte-avions, l’Admiral Kouznetsov, construit à l’époque de l’URSS et renové en 2007.

A noter enfin que la publication de cette étude intervient alors que selon un responsable américain de la Défense, un sous-marin chinois a suivi de près le porte-avions américain USS Ronald Reagan aux larges des côtes japonaises le 24 octobre dernier. « C’était plus qu’une brève rencontre », a précisé l’officiel américain, ajoutant qu’aucune communication n’avait été engagée entre les deux navires. Le responsable américain a toutefois minimisé la nature menaçante de l’incident, expliquant qu’à chaque fois que les États-Unis procédaient à des exercices avec le Japon, les Chinois « sortaient pour jeter un œil à ce qui se passe ».

Reste que cet incident voit le jour dans un contexte de tensions entre Washington et Pékin. La Chine revendique en effet des droits sur la quasi-totalité de la mer de Chine méridionale, certaines zones étant également disputées par le Vietnam, la Malaisie, les Philippines et le sultanat de Brunei.

Les Etats-Unis et certains pays d’Asie du Sud-Est redoutent un coup de force de Pékin en vue de s’assurer le contrôle de l’une des routes maritimes commerciales les plus stratégiques du globe, par laquelle transite notamment un tiers des cargaisons mondiales de pétrole.

Sources : sputniknews.com, Ria Novosti, 20minutes

Elisabeth Studer – 5 novembre 2015 – www.leblogfinance.com

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